Cladisme

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Quelques références:
* P. Darlu et P. Tassy , La reconstruction phylogénétique, Concepts et méthodes, Masson, 1993, disponible sur internet
* P. Duris
(Professeur d'épistémologie et histoire des sciences à l'Université Bordeaux 1) et P. Tassy, Encyclopedia Universalis (EU) 2009, article "La classification du vivant" (extraits sur la page nommer-classer)
* De la phylogénie... sans bouillir ou les bases de la reconstitution phylogénétique, Bruno Chanet, Biologie-Géologie (Bulletin de l'APBG), n°3-1997, 505-527
* La construction de phylogénies, Guillaume Lecointre, Biologie-Géologie (Bulletin de l'APBG), n°1-1995, 109-136
Reconstitution phylogénétique : l'origine des oiseaux, Guillaume Lecointre, Biologie-Géologie (Bulletin de l'APBG), n°3-1995, 475-499
(l'auteur, à l'aide de l'exemple des oiseaux , s'efforce de montrer qu'après bien des batailles, les cladistes utilisant les données moléculaires comme caractères évolutifs peuvent parfois se mettre d'accord et valider les hypothèses évolutives obtenues de longue date sans la méthode cladistique; le TP proposé qui utilise le logiciel "évolution moléculaire" donne un exemple de matrice de caractères bien choisi et de règles de construction qui conduisent à un arbre cohérent avec nos connaissances; bref, un énorme travail pour l'enseignant pour un résultat bien mince).
* Classification phylogénétique du vivant, Guillaume Lecointre et Hervé Le Guyader, Belin, 2001
* Manuels de TS et de 1L et 1 ES du nouveau programme (2000-2002)

http://smileys-gratuits.fr/


Nouvelle version en travaux juillet 2009
les ouvrages de vulgarisation sur le cladisme n'ont pas suivi les développements rapides dans les laboratoires. Je livre ici ce qu'en tant qu'enseignant je m'efforce de comprendre. je serai honoré d'avoir d'autres ouvertures.


Plan

 

 

 


1. Le petit cladiste illustré

2. La logique cladiste et les phylogénies

3. Les voies de recherche

4. Des exemples de "vrais" et de "faux" cladogrammes




1. Le petit cladiste illustré: comprendre comment passer d'une classification d'objets à une classification évolutive


Au début, c'est très simple, on voit bien qu'il ne s'agit que de comparer deux objets... on voit clairement que l'on est dans un discours logique et non pas naturaliste (biologique).


Avertissement:
cette caricature se veut pédagogique. Son but est de montrer les implicites (qui sont parfois cachés ou considérés comme évident) et les limites des classifications cladistes. Comme toute caricature elle est injuste dans le sens où elle ne reflète que certains aspects de la cladistique.

On classe des objets logiquement sans se préoccuper de l'histoire



Un exemple de cladogramme simple avec deux objets à roues permettant de s'asseoir...


Ces deux cladogrammes sont totalement identiques
(on peut faire tourner les "branches" au niveau des nœuds)...

Ce qui compte c'est la distribution des caractères pour chaque branche ou groupe de branches (réunies au niveau d'un nœud, représenté par un point noir)


Les éléments de comparaison qui sont choisis comme déterminants sont encadrés. On les nomme caractères. On voit bien dans le cas présent que ce cladogramme ne représente pas une histoire mais juste une comparaison; un cladogramme est un «graphe connexe non cyclique» disent des cladistes (Classification phylogénétique du vivant, G. Lecointre et H. Le Guyader, 2001, Belin, p 21).
hypothèses évolutives de départ

le nombre de roues (et donc le point par où passe le vecteur poids qui part du centre de gravité et est dirigé vers le centre de la terre) est dérivé (logiquement et non historiquement; voir par exemple http://pages. globetrotter.net/ groleau/ amq/ francais/ history.htm ) par rapport à l'invention de la roue (?) et la la position du pédalier horizontale ou verticale est aussi dérivée de la présence d'un pédalier (transmission d'une force verticale en rotation) , que celui-ci soit centré sur la roue ou décalé grâce à l'intervention d'un axe supplémentaire et d'un moyen de transmission. On a donc choisi de faire un clade avec les véhicules à pédalier et roue(s) et selle (par exemple). Tous ceux qui n'ont pas ces 3 éléments ne sont pas dans le clade (outgroup). Le nombre de roues est ici considéré comme une caractère innovant, une synapomorphie (voir-ci-dessous) avec 2 valeurs: 1 ou 2 roues. On peut aussi choisir comme caractère dérivé le décentrage horizontal ou vertical du pédalier par rapport à l'axe de la roue et au sol.

Certains diront que l'on peut imaginer le temps disposé verticalement; et dans ce cas le cladogramme présenté ci-contre est faux, car le pédalier a été inventé après la roue. Mais le cladisme n'exige pas que les caractères dérivent les uns des autres dans le temps : le temps n'intervient pas dans le choix des caractères qui ne sont choisis que pour séparer ou rassembler des objets. Le cladisme peut être utilisé en biologie pour chercher des similitudes entre des espèces ou des individus mais on restera toujours dans un discours logique. Celui qui veut illustrer une phylogénie va bien sûr s'efforcer de respecter une dimension temporelle mais celle-ci ne vient pas du cladisme mais de la paléontologie. Or les arguments paléontologiques ne seront jamais expérimentaux. Le cladisme peut déboucher sur une phylogénie mais celle-ci ne vient pas de la méthode. Le cladisme est ANHISTORIQUE.

Commentaire
Une classification cladiste d'objets montre bien que ce que l'on classe importe peu, tout est dans la méthode.

L'évolution comme bricolage
Le cladisme est une excellente illustration de l'idée que l'évolution est un bricolage génétique: des gènes qui mutent et s'ajoutent les uns aux autres au cours des temps géologiques (théorie synthétique).



Mais en ajoutant des objets et des caractères, tout se complique et le temps réapparaît comme par magie... toujours de façon erronée, mais le dépistage de l'erreur devient nettement plus difficile:




Une représentation "cladistique (cladogramme)" de quelques objets "à roues"
(non optimisée)


hypothèses évolutives de départ

l'évolution se fait dans l'ordre suivant (il s'agit d'un ordre logique et non historique); ces inventions dérivant logiquement les unes des autres (mais pouvant très bien apparaître dans un ordre temporel différent (ceci est par exemple évident pour le nombre de roues ou l'invention d'une toupie par rapport à une meule ou un cerceau....)): roue sans axe et avec déplacement, roue avec axe fixe, axe avec mouvement d'entraînement décalé / avec axe centré, axe et déplacement, point d'entraînement très proche du centre ou décentré, force mécanique musculaire / thermique-électrique, 1-2-3-4 roues


groupe monophylétique = clade = branche (clade) ou ensemble de branches (groupe) de l'arbre qui contient un ancêtre et tous ses descendants (la branche "automobile" forme un clade à elle toute seule, comme l'ensemble monocycle, bicyclette, tricycle et kart)


groupe polyphylétique = groupe qui n'a pas d'ancêtre commun (qui contient au moins une homoplasie) par exemple, dans notre représentation, la toupie forme un groupe polyphylétique avec la poulie et la meule


innovation 1 = synapomorphie = caractère dérivé = caractère (à l'état) apomorphe; caractère qui provient d'un autre avec modification: deux synapomorphies sont séparées par un nœud; la manivelle est un caractère dérivé de l'axe de rotation fixe ; en fait un caractère dérivé est une relation logique de similitude, il n'entre dans cette relation aucune idée de temps.
innovation 2 = plésiomorphie = caractère primitif = caractère ancestral = caractère (à l'état) primitif ; caractère "non évolué" ou original que l'on ne trouve pas dans un autre groupe apparenté (une plésiomorphie peut être partagée par plusieurs taxons: c'est une symplésiomorphie); ici c'est la roue qui était le caractère primitif ; en fait un caractère primitif est une relation logique de similitude (il n'y a aucun élément voisin semblable qui possède le même caractère de façon aussi originale - c'est-à-dire sans lien avec d'autres caractères, logiquement associés et qualifiés de dérivés - c'est une relation de dissimilitude et non d'antériorité), il n'y a encore ici aucune idée de temps.




homoplasie = similitude entre deux taxons (éléments de la classification) qui ne dérive pas d'une relation de parenté et donc d'un ancêtre commun - par exemple le cerceau et une poulie; mais aussi , dans notre choix de représentation, la présence de plus d'une roue entre la bicyclette et l'automobile (alors quec'est une homologie de filiation entre la bicyclette et le tricycle ou le kart.... toujours selon nos choix de représentation : on voit facilement que l'on pourrait faire un choix tout à fait différent en considérant le nombre de roues comme une homologie pour tous les taxons...).
convergence = cas particulier d'homoplasie mais répétée chez plusieurs taxons (le présence de 4 ou 3 roues pour tous les véhicules à moteur pourrait être considéré comme une convergence) - pour les non-cladistes cette similitude était considérée comme résultant d'un même facteur, le plus souvent l'action du milieu...
analogie cladiste = cas particulier d'homoplasie où les deux caractères ont la même fonction: le cerceau et la roue de vélo par exemple




phylogénie cladiste = classification évolutive


une classification cladiste ne reflète pas l'histoire: un arbre cladistique n'est pas une généalogie; l'évolution, pour le cladiste, n'est pas dans l'arbre mais dans la méthode (polarisation des caractères principalement); dans notre exemple, une classification historique se préoccuperait de savoir quels ont été les brevets déposés, quelles ont été les conditions sociales, culturelles, politiques de l'avancée des inventions... alors que l'arbre cladiste ne reflète que la considération actuelle des inventions, qu'il projette en arrière dans le temps.


c'est pour cela que les classifications cladistes ne sont pas vraiment évolutives dans le sens où elles n'en apportent pas la preuve (au sens d'argument) mais elles illustrent une évolution qui est ailleurs. Les classifications vraiment évolutives sont des classifications qui prennent l'évolution comme causalité et cherchent à en préciser les modalités. Elles donnent un sens biologique à l'évolution: perfectionnement, diversification, complexification, sommation et mise en mémoire... que l'on y mette un vitalisme ou un matérialisme ou toute autre philosophie.

Il y a une séduction trompeuse dans le travail de classification cladistique : au fur et à mesure que l'on accumule les caractères, en décidant progressivement de leur caractère primitif ou dérivé, on se forge une histoire, que l'on en vient progressivement à considérer comme l'histoire. On ne peut s'empêcher de placer le temps verticalement alors que dans la méthode il n'y a PAS de TEMPS. Il n'y a que des comparaisons.



ancêtre commun


l'ancêtre commun n'existe pas réellement, il n'a pas existé; le premier objet à roues n'était ni un monocycle ni une bicyclette, il possédait seulement une roue; le rechercher relève de l'impossibilité historique. Les ancêtres communs NE sont PAS aux NŒUDS de l'arbre (qui séparent simplement les synapomorphies), mais à leur voisinage.


Cette notion cladiste de parenté réduite à l'ancêtre commun - introuvable - revient à nier toute relation à la fonction. En effet, une fonction se révèle toujours efficace, dès sa première apparition: le concept de roue a certainement commencé à exister mais pour une fonction précise à un moment donné. Ce concept a évolué depuis. Dans une classification naturelle on considère que la fonction est le point d'entrée dans l'histoire de l'évolution d'une structure, alors que cladisme nie cette relation, et remplace la notion de fonction (d'où dérive le terme d'homologie classique) par une notion relativiste d'homologie de filiation (voir ces mots ci-dessous).

De la même façon - et sans quitter le sujet, car le cladisme compare souvent des séquences d'ADN qu'il qualifie de gènes - on pourrait dire qu'un gène n'a de sens que dans une cellule, à un instant donné de son histoire. La présence ou l'absence de la séquence d'ADN qui lui correspond sont insuffisants pour déduire autre chose qu'une possibilité de fonction: le gène est une unité fonctionnelle comme la génétique moderne ne cesse de le prouver (voir un des derniers commentaires en date sur la page d'accueil). Un même gène peut avoir plusieurs fonctions différentes dans divers environnements cellulaires.



homologie cladiste


L'homologie de position (primaire) s'affirme de deux structures ayant la même organisation et les mêmes connexions avec les organes voisins (position anatomique). L'homologie de filiation (secondaire) s'affirme de deux structures similaires héritées d'un ancêtre commun (donc cette homologie est déduite a posteriori de l'arbre le plus parcimonieux).



Deux structures homologues occupent une même position anatomique et ont une origine embryonnaire commune.
Voir ancien cours de TS et nouveau cours de TS (en jachère), pour une discussion de ce concept.




2. La logique cladiste et les phylogénies






2.1 Logique de la méthode pour classer des êtres vivants selon l'évolution




Les principes sur lesquelles repose la vérité de la classification évolutive cladiste du vivant

Cette partie présente certains principes qui, je crois, sont acceptés par tous, d'autres, qui sont davantage sujet à discussion, et d'autres enfin qui sont des interprétations personnelles que j'essaie de préciser dans le paragraphe suivant.


* Les êtres vivants ont une unité profonde qui s'exprime au niveau de leurs caractères qui se ressemblent (plus ou moins).



Ce principe est le fondement de toute classification. Il n'est contesté par personne. Ce qui donne l'unité aux êtres vivants c'est le phénomène vivant, la vie, quelle que soit l'approche (philosophique) que l'on en fait. Il est clair que les similitudes matérielles (comme les molécules) n'expriment qu'une très faible part de cette unité.

* Les espèces évoluent (se transforment au cours des temps géologiques), ce qui doit aussi s'exprimer au niveau des caractères (des individus qui appartiennent à ces espèces) dont la ressemblance peut résulter de l'évolution. Aucune théorie particulière n'est supposée, ce qui est la grande force du cladisme.


L'évolution est utilisée pour dire si un caractère dérive logiquement d'un autre ou non. Si l'évolution est un phénomène qui touche l'espèce son expression au niveau d'un caractère d'un individu n'est qu'une hypothèse théorique NON EXPÉRIMENTALE.



Il est symptomatique que certains refusent le critère de ressemblance comme élément caractérisant les individus appartenant à une même espèce mais utilisent la ressemblance pour comparer phylogénétiquement des individus (voir espèce).

* La construction de cladogrammes repose sur l'optimisation des relations logiques entre caractères (et donc des relations phylétiques entre individus).



Optimiser c'est choisir le mieux (il y a une référence à un bien, donc à une finalité : il faut ordonner les possibles par rapport à une fin). Dans l'espace, pour aller d'un point à un autre, c'est le chemin le plus court (mais il faut se méfier de la représentation du temps comme un paramètre).

* Les relations phylétiques mises en évidence entre les espèces ou les individus grâce aux caractères sont toujours relatives (aux choix du classificateur), ce qui est une faiblesse.



Ce sont des relations logiques complexes de similitude.
On peut parler à mon avis de
relativisme au sujet de phylogénies cladistes. Ce qui est pour moi une faiblesse.

* Le cladisme recèle une autre faiblesse: il ne tient pas compte d'une théorie de la variation. Le cladisme pourrait peut-être être complété en ce sens.


En effet, le cladiste classe de façon optimale (vis-à-vis d'une relation logique évolutive de type filiation: B venant de A ou non) mais les mécanismes responsables de la variation lui échappent TOTALEMENT (il ne peut pas dire que A va évoluer en B ou C). C'est en quelquesorte une classification a posteriori puisqu'elle découle d'une filiation posée a priori.



analyse
de la méthode


Fondement
La méthode cladistique est rapportée à Willi Hennig en 1950 (Grundzüge einer Theorie der phylogenetischen Systematik) qui, pour éviter la dichotomie (présence ou absence de tel ou tel caractère chez un individu fossile ou non), propose d'affecter à chaque caractère utilisé un qualificatif évolutif, c'est-à-dire, en fait, à le rapporter à une phylogénie a priori (en posant cette filiation comme point de départ).



Le cladisme relie logiquement des caractères.


Je rappelle que l'évolution porte sur les espèces et non les individus et encore moins les caractères (voir Qu'est-ce que l'évolution ? et la fiche Nommer-classer)





1ère étape: le choix des caractères.



La méthode de classification cladiste est fondamentalement une comparaison...


Le choix du terme caractère renvoie ici à un élément classificatoire et non héréditaire. En fait il s'agit de ressemblances (ou de plus ou moins grandes différences concernant des éléments ressemblants donc d'analogie au sens large). Les caractères pourraient très bien être appelés ressemblances ou similitudes.


... entre caractères comparables, phylogénétiquement, c'est-à-dire homologues = portés par 2 individus ayant un ancêtre commun exclusif.

On passe donc des caractères aux individus.


Mais, pour le cladiste, tous les caractères ressemblants ne sont pas utilisables, il faut qu'ils traduisent des homologies "objectives". Les caractères choisis pour construire la phylogénie sont tous mis sur un plan d'égalité classificatoire.

L'homologie de filiation (ou secondaire) est seule retenue comme objective et déterminante. Elle est définie par une relation logique dite de filiation (parenté exclusive) qui est une variante d'un principe d'unité des êtres vivants mais qui comporte une composante évolutive (phylogénétique), sans référence à une théorie particulière: deux caractères sont homologues s'ils sont portés par deux individus ayant une ancêtre commun exclusif (ce qui est déjà une expression du critère extra-groupe). Cette homologie NE pouvant être déduite des caractères eux-mêmes, elle est RELATIVE au choix des clades et s'énonce en fin d'opération classificatoire. Mais elle ne pourrait être affirmée si on ne disposait que d'un seul caractère.


Homoplasies et homogénies sont des «concepts formalisés en 1870 par le zoologiste britannique Edwin Ray Lankester qui décomposa la notion d'homologie. Les homologies dues à la parenté sont appelées « homogénies » ; les autres, présentes chez diverses espèces sans pour autant avoir été héritées d'un ancêtre commun, sont appelées « homoplasies ». Depuis, on a restreint le sens de l'homologie à celui de l'homogénie, ce dernier terme tombant dans l'oubli.» Duris et Tassy (voir nommer-classer)



En fait, cette première étape est précédée, en plus du choix de l'individu (ou du groupe : ingroup) que l'on cherche à classer, par:
- la définition des groupes extérieurs (outgroup) qui ne peuvent pas, a priori, contenir l'individu ou le groupe à classer
- le choix des individus dans chaque groupe afin de déterminer leurs caractères.
(On peut noter que le cladisme ne pourra jamais traiter l'ensemble des individus connus car les temps de calcul informatique des arbres optimisés croît exponentiellement avec le nombre d'individu à prendre en compte: à titre d'exemple une analyse cladistique regroupant 20 espèces et donc au moins autant de caractères homologues nécessite d'analyser 8.1021 arbres; actuellement les méthodes de comparaison sont établies pour un maximum de 30 taxons).

Le clade regroupe des individus partageant des caractères homologues (et donc un ancêtre commun exclusif).


Les individus regroupés par des caractères homologues forment un clade (nom masculin du grec klados = rameau): groupe monophylétique de référence.


C'est ici qu'intervient une autre hypothèse qui ressemble toujours à la première mais qui est rarement énoncée: les caractères appartiennent à des êtres vivants et leur unité ou leur harmonie est l'expression de l'unité du vivant. Ainsi tous les caractères homologues choisis doivent permettre de construire UN arbre, qui est appelé l'arbre le plus parcimonieux en raison des hypothèses logiques qui seront présentées ensuite.



L'optimisation des relations logiques de l'arbre est une condition méthodologique qui prend deux orientations différentes selon la philosophie de son utilisateur:


* pour la plupart des gens cette optimisation signifie que l'évolution, comme processus de filiation, est l'expression d'une relation des parties (individus) au tout (l'ensemble des êtres vivants ayant existé)



* pour un réaliste, cette optimisation signifie que l'évolution comporte une finalité interne.



Elle est d'autant plus acceptable qu'elle est impersonnelle et calculable. Cette optimisation est sous-entendue comme une caractéristique du vivant dans tous les processus naturels habituellement décrits au moyen de l'outil mathématique. Le cladisme n'y échappe pas.


Cette optimisation se rapporte à l'évolution. On peut y voir une expression de la sélection naturelle revisitée (ce n'est plus un hasard mais bien une loi). On peut aussi davantage se retrouver dans le terme de finalité ou téléologie. Dans le cas où une caractère choisi ne serait pas homologue au sein du clade, on le verra apparaître dans deux clades différents, ce qui est incompatible avec l'hypothèse de départ (celle du clade ou celle de l'homologie, au choix, car il s'agit en fait de la même hypothèse). Les homoplasies, convergences, réversions ... et autres appellations des "non-homologies" sont ainsi dépistées.






2ème étape: La polarisation des caractères







Lors de la polarisation des caractères homologues le cladiste décide si le caractère est primitif (valeur 0), c'est-à-dire hérité sans modification au sein d'un clade (et nul part ailleurs), ou si le caractère est dérivé (valeur 1), c'est-à-dire hérité avec transformation une seule fois entre deux membres du clade (et nul part ailleurs).

Cette polarisation repose donc sur plusieurs hypothèses évolutives qui varient selon les caractères car ils sont soumis à deux critères:


- le critère extra-groupe :


- et le critère ontogénique :


 

  • si une espèce d'un extra-groupe (dont l'ancêtre commun est antérieur au plus ancien ancêtre du groupe étudié ou groupe intérieur) possède le caractère que l'on cherche à qualifier sous une forme identique, ce caractère est donc dit voisin (plésiomorphe ou primitif);
  • s'il est présent sous une forme éloignée (apomorphe) le caractère est dit dérivé (il y a une synapomorphie entre les deux caractères).

il repose sur une hypothèse : plus un caractère apparaît tard dans le développement ontogénétique d'un organisme actuel, plus il est spécialisé et dérivé (apomorphe); plus il apparaît précocement, plus il est primitif (plésiomorphe).


Remarque:
Cette hypothèse semble, de premier abord dépasser la "loi biogénétique fondamentale" de Haeckel (voir
ancien cours de TS) selon laquelle "l'ontogenèse est une courte récapitulation de la phylogenèse". Il faut se méfier de cette référence à Haeckel. Il serait surprenant que les cladistes acceptent cette théorie alors qu'ils sont si prudents au sujet de l'évolution (voir aussi la discussion dans la première partie du cours de TS). Si l'on essaye de comprendre la portée de cet argument pour un biologiste qui refuse toute référence à l'histoire, il faut peut-être envisager que la succession au cours du développement doit être assimilée par le cladiste à une proximité logique. En effet, selon leurs mots, «lors d'un développement embryonnaire, les caractères généraux apparaissent avant les caractères particuliers de l'espèce» (La construction de phylogénies, Guillaume Lecointre, Biologie-Géologie (Bulletin de l'APBG), n°1-1995, p 116). Si c'est une proposition logique, le "d'abord" signifiant une similitude plus forte, cela conduit à dire que les caractères les plus généraux, c'est-à-dire partagés par le plus grand nombre des individus d'un clade, sont primitifs, c'est-à-dire voisins pour les membres du clade. Ce qui est acceptable. C'est à mon avis dans ce sens que Haeckel est (mal !) compris.




Remarque IMPORTANTE


Il n'y a pas de temps pour le cladiste.


Trois termes sont ambigus:




- le terme d'ancêtre ne désigne pas un fossile mais un concept (ce n'est pas un individu) qui regroupe un certain nombre de caractères. Quand on parle d'ancêtre "antérieur", il faut comprendre "plus éloigné en terme de similitude". Un ancêtre commun à deux groupes-frères est le point de rencontre logique le plus proche de tous les caractères propres à chaque groupe. Ce que le paléontologue interprète comme un indication bien sûr de l'emplacement du véritable ancêtre, historique, d'une lignée qui posséderaient les caractères portés par le clade.


- les termes de primitif et dérivé ne signifient pas une succession temporelle. Seuls, les individus se succèdent dans le temps (hypothèse évolutive). Mais les caractères sont hiérarchisés non pas dans une succession temporelle (d'abord l'écaille puis la plume) mais dans une succession logique (le caractère plume de l'Archéoptéryx est éloigné logiquement de l'écaille de la Tortue mais est proche logiquement de l'écaille d'un reptile thécodonte). Le vocabulaire cladiste exact synapomorphie (partage de l'état apomorphe (du grec apo = loin de et de morphos = la forme), caractères éloignés) et plésiomorphie (du grec plésios = voisin et morphos = la forme, caractères voisins) évacue cette idée de temps avec justesse. Bien sûr, tout le monde va dire que la succession logique exprime la succession temporelle mais ce n'est pas exact. La succession logique exprime la plus parcimonieuse parenté, c'est-à-dire la phylogénie qui satisfait le mieux aux hypothèses logiques choisies. Si celles-ci ont une réalité, la phylogénie cladiste s'approche alors du réel, si elles ne sont qu'approchées, elle s'en éloigne. C'est en cela aussi que le cladisme est relativiste car il s'oppose à l'idée d'une connaissance certaine, non relative, par exemple historiquement définie.




N'est-ce pas jouer sur les mots ?


NON, le cladisme est utilisé par le paléontologue qui accepte les relations logiques de similitudes comme raisonnables et sûres. Mais le cladisme se garde de porter le rôle de faiseur de vérité historique. Il s'arrête à ce qui est raisonnable logiquement, avec ses postulats. Alors que le raisonnement historique est autre: l'histoire suppose que les événements ont une lieu une seule fois, d'une certaine manière, même si cette connaissance est difficile à atteindre, elle repose sur une certitude... historique.






Dans cette étape il y a un basculement des caractères aux individus. Chaque individu est défini comme un ensemble de caractères et le graphe relie les individus (et non plus les caractères qui ont été choisis, comparés et polarisés).
C'est pour cela que le cladogramme ne pourra jamais représenter de façon juste une phylogénie puisque l'évolution se fait entre espèces et non entre les individus (voir ci-dessous : "3.2 cladisme et phylogénie").


3ème étape : calcul du graphe


Le cladogramme représente des liens de similitude (logiques) entre individus (seuls existants pour un nominaliste) qui ont (probablement) existé (et dont l'existence est attestée par les fossiles) ou qui existent (actuellement).


Il est hors de question de détailler ici les règles logiques utilisées pour la construction d'un cladogramme : règles de parcimonie, UPGMA... Je n'en ai pas la compétence, ni le goût.



Il semblerait, pour ce qui nous intéresse, qu'elles reposent tous sur le même principe logique exposé plus haut d'une optimisation du graphe obtenu à partir des caractères choisis. Cette optimisation est, encore une fois, selon la philosophie de l'utilisateur, l'expression d'une relation logique de l'évolution ou une finalité interne.




Remarque :


On en arrive à un point délicat, que je présente ici sous une forme non définitive.


Je crois comprendre différemment maintenant les mots de Mme Chandebois. Ce qu'elle stigmatise ici est peut-être ce que j'ai compris (grâce au travail d'André Pichot) comme étant une confusion entre évolution (phylogénie, relation de parenté) et histoire. Une fois encore, il n'y a pas de temps pour le cladisme donc pas d'ordre temporel mais uniquement logique.

Étant donnée la profondeur de pensée de Mme Chandebois il est peu probable qu'elle ai mal compris le cladisme. Sa remarque touche à mon avis un problème de fond du cladisme qui ne s'intéresse qu'aux relations de similitude (le cladisme est sans aucun doute une classification qui répartit en classes d'équivalence des individus en fonction de leur degré de similitude) et qui ne suppose donc seulement qu'une théorie de la similitude. Celle-ci est fournie d'une part par l'unité du vivant et d'autre part par une théorie de l'évolution. Mais cette théorie évolutive nécessaire au cladiste ne s'intéresse qu'à la parenté et évacue le second aspect de l'évolution qui est celui de la variation. Certes, la filiation est définie comme transformation dans le cas d'apomorphie, mais celle-ci me paraît incapable de décrire la spéciation. Car pour comparer en termes de similitude il faut deux membres, or il n'y a rien, dans la classification, au delà de l'espèce. C'est pour cela que le cladisme échoue aussi pour les premières étapes du vivant. Il ne peut comparer l'hypothétique première cellule avec des éléments non organisés et non vivants.
C'est peut-être aussi pour cela que le cladisme a eu tant de mal à être accepté des darwinistes car le darwinisme contient une théorie de la variation, qui est un mutationnisme pour faire simple. Or ici les mutations ne sont plus un moteur d'une évolution divergente, buissonnante, mais juste un facteur de proximité: une évolution fermée dont le rôle ne peut que cesser de s'amenuiser. Les néodarwinistes ont pour la plupart contourné le problème en rapportant toute innovation à la sommation (?) de mutations ou encore à la mutation de gènes qui seraient majeurs.




R. Chandebois: «D'après les "arbres logiques" les embranchements auraient été créés d'abord. leur genèse achevée, celle des classes aurait commencé, puis celle des ordres aurait emboîté le pas, et ainsi de suite jusqu'à l'individualisation des espèces qui, pour cette raison, se trouvent toutes à la périphérie de l'arbre. (...) La filiation entre les embranchements, les classes, les ordres, n'a pu se faire autrement que par des espèces particulières. C'est sur ce point que la schématisation cladiste est défectueuse. Sur le dessin elle est fausse, dans le texte elle est ambiguë » (Pour en finir avec le darwinisme; une nouvelle logique du vivant, Éditions espace 34, 1993, p 111-112).





Une fois établie la relation à l'ordre, à la classe, à l'embranchement, l'individu reste plus que la somme des similitudes. Pour que le cladisme puisse produire des phylogrammes qui tiennent compte à la fois de la stabilité et de la variabilité dans l'évolution il faudrait une représentation de l'individu en tant que tel et non pas comme "le phénomène de ses relations avec les autres". Est-ce possible sans un réalisme ? Je laisse ce travail en suspens... Mais le cladisme sera sans aucun doute dépassé.

Un cladogramme n'est pas une phylogénie


La difficulté est de comprendre la liaison du graphe avec l'histoire évolutive ou phylogénie au sens strict que, comme paléontologue, nous souhaiterions établir.


Si l'on place verticalement le temps le long du graphe on remplace la succession logique par une succession temporelle, ce qui est parfois acceptable mais souvent l'est moins. En tout cas le sens d'un tel passage n'est jamais donné par le cladisme, il faut lui trouver une justification extérieure.


Le cladogramme nous présente des individus, seuls réels, qui sont situés aux extrémités des branches (liens de similitude les plus forts) ou au voisinage des nœuds (points de divergence ou plutôt convergence de groupes de similitudes) représentent des innovations qui peuvent permettre de nommer les clades qui en partent...; il n'y a pas de proportionnalité entre la distance entre deux individus et leur degré de parenté (proximité phylogénique) qui est seule représentée par les droites et les nœuds. Même si certaines présentations scolaires , à mon avis confuses, s'efforcent d'ajouter cette dimension, que je crois savoir extérieure au cladisme.

Les arbres ne sont pas comparables entre eux


Pour essayer d'y voir clair il faut bien garder présent à l'esprit la valeur relative de l'attribut évolutif affecté à chaque caractère (primitif-évolué). Cette valeur n'a de sens que dans une phylogénie posée comme point de départ (provisoire). De plus la valeur change pour un même caractère selon les groupes-frères considérés. Cette valeur relative à un arbre de chaque caractère, fait que les arbres ne sont pas comparables entre eux. Lorsque l'on construit un cladogramme, celui-ci n'est qu'une représentation de l'hypothèse de départ *, illustrée par les fossiles étudiés, ou plutôt par les caractères étudiés dans les groupes étudiés. Un cladogramme n'apporte AUCUNE PREUVE de la filiation entre des organismes fossiles ; il n'est en est que l'illustration.


* pour essayer de montrer ce point important je préciserai cette hypothèse dans les graphes analogiques pris en exemples ci-dessous

Par exemple comparez l'intérêt pédagogique des deux classifications des animaux très simplifiées données dans mon cours de seconde: une classification cladiste est à mon avis plus difficile à mémoriser et moins signifiante qu'une classification phylogénétique "embryologique" classique.


Certes cette méthode présente l'avantage de rendre accessible à tous la classification; désormais, n'importe quel étudiant peut à l'aide d'un logiciel, et s'il dispose de la matrice actuellement acceptée par les sommités cladistes, réaliser une classification cladiste qui aura la même valeur que celle du plus grand spécialiste. Il y a cependant une double tromperie:


* la matrice, seule à refléter les hypothèses évolutives, échappe à l'étudiant et donc c'est toute idée de travail scientifique qui lui échappe.


* lors de la polarisation des caractères, je serais tenté de dire - de façon peut-être un peu excessive - que les hypothèses hardies d'ordre paléontologique ou embryonnaire, ou même d'ordre moléculaire, sont remplacées par la règle la plus aliénante qui soit: il n'y a pas de vérité. C'est ce côté relativiste de la méthode cladistique qui me paraît le plus dangereux. On pourrait dire que la cladogenèse remplace la recherche d'une phylogénie universelle par une appréciation phylétique relative à un ensemble de caractères donné dans une certain nombre de groupes donnés. Il y a une forte tendance à relativiser la valeur de la phylogénie, tout en affirmant que cette méthode est la seule scientifique et la seule réfutable, puisqu'elle change en fonction des caractères et des groupes considérés : réfutable ne veut pas dire provisoire ou encore moins relative. Je crois que l'on peut dire que, à plus d'un titre, le cladisme est une phylogénie relativiste.






2.2 Discussion








Les premières questions soulevées ci-dessous appartiennent à la première version de cette page. Je suis conscient qu'elles n'intéressent plus grand monde. Maintenant tous les biologistes utilisent les classifications cladistes et ne se posent plus de questions. Ils se sont appropriés l'outil et les emplois nouveaux que l'on en fait semblent plus intéressants (voir prochaine partie: recherche) que les questions que l'on peut se poser sur la fiabilité de l'outil. Cependant, je persiste à croire que les actuelles phylogénies ne sont ni fidèles au cladisme (qui est anhistorique) ni cohérentes avec la recherche d'une histoire du vivant (voir nommer-classer).


parti-pris

 


Que l'on pardonne parfois des affirmations trop dogmatiques: je suis bien conscient, en tant que pédagogue, que la faute m'en revient à moi et non aux scientifiques, qui, d'ordinaire, n'érigent pas leur théorie en dogme.

Comme le dit si justement G. Canguilhem (dans la théorie cellulaire) en se référant au fixisme: «...pourquoi l'historien des sciences présenterait-il Linné comme le responsable d'une rigidité doctrinale qui incombe à la pédagogie plus qu'à la constitution de la théorie ? ». En caricaturant certaines théories scientifiques, en les dogmatisant, je sais que je ne leur rend pas justice.



Mes critiques - basées sur mes sources, citées, scolaires pour certaines - ne visent peut-être que certaines idées qui ne reflètent pas tous les courants cladistes. Je serais ravi d'avoir d'autres ouvertures

naïveté

 


Le cladisme, présenté par ses actuels promoteurs, n'est pas qu'un outil de présentation de phylogénies.
Ces phylogénies ne sont pas les mêmes que celles que l'on construisait dans l'ancien programme de terminale S (matrices de caractères et arbres), contrairement à ce que semblent croire certains enseignants
qui ont adopté d'autant plus facilement le cladisme qu'on leur distribuait (pour l'instant gratuitement) un logiciel de construction d'arbres (logiciel phylogène sur le site du CNDP). Ce ne sont pas des généalogies (voir classer)- partie 3).


L'obstacle majeur est celui du temps car la phylogénie cladiste est une représentation de relations logiques et non pas un arbre généalogique avec le temps qui occuperait l'une des dimensions du plan de représentation de l'arbre.


L'ambition (démesurée) des cladistes est de fournir LA MÉTHODE (unique) de classification MODERNE et ÉVOLUTIVE de TOUS les êtres vivants.
De fait les classifications cladistes sont désormais universellement employées mais cela ne veut pas dire qu'elles soient les seules manières scientifiques et signifiantes de
classer.
Là encore, une effort philosophique, est nécessaire pour essayer de décrypter les buts plus ou moins cachés des promoteurs du cladisme.

commodité


Les classifications cladistes ne sont pas les seules classifications qui tiennent compte des caractères moléculaires.


Ceux-ci peuvent entrer dans TOUTES les classifications, mais il faut pour cela expliciter des hypothèses qui sont souvent implicites pour les classifications cladistes. Par contre les comparaisons entre molécules ont surtout été réalisées avec l'outil cladiste qui a été mis au point avec les données obtenues par ces études moléculaires. Le cladisme reste donc un outil tout à fait adapté pour des études comparatives de séquences.


D'ailleurs la considération des étapes de la méthode cladistique à partir de séquences moléculaires permet pédagogiquement de mettre en évidence les limites de la méthode.
- Il est clair qu'il n'y a pas de temps : ni expérimental (une séquence ne dérive d'une autre que par pure hypothèse évolutive, jamais grâce au résultat d'une expérience) ni historique (les séquences ne sont pas datées, sauf quelques rares exemples de molécules anciennes...).
- Il est clair que les relations logiques établies entre séquences vont dépendre des mécanismes "évolutifs" (il ne s'agit que d'évolution moléculaire... une théorie très limitée, bien incapable de rendre compte de l'
évolution des espèces) supposés, pris comme hypothèse et inclus dans le diagramme (séquence stable, taux de mutation (horloge moléculaire), duplication de gènes, transposition...), mais en aucun cas commentés (pour la communauté, comme on peut le faire en systématique évolutive) ou validés (c'est à mon avis un point majeur: le cladogramme illustre mais ne prouve rien).
- Il est clair que les règles de construction de l'arbre vont reposer sur des lois logiques de minimisation des différences qui n'ont rien de biologique ou d'évolutif...

évolutionnisme


Les classifications cladistes ne sont pas les seules classifications évolutives.


Toute classification qui intègre des données paléontologiques peut se dire évolutive, mais elle ne l'est vraiment que si elle repose sur une théorie évolutive. Le cladisme en suppose une mais ne l'utilise que dans la polarisation de ses caractères, elle est donc souvent cachée.
Habituellement, la systématique évolutionniste, antérieure à la cladistique, est proposée comme une autre voie de classification évolutive
(voir cours de terminale).








Les classifications cladistes sont évolutives mais ne sont pas toutes darwiniennes...


... dans le sens où le cladisme reposerait sur une théorie darwinienne de l'évolution car ce n'est qu'une méthode qui suppose une évolution , quelqu'en soit le déterminisme, s'il existe.

Par sa représentation des nœuds correspondant à des innovations biologiques et par son refus de la recherche d'ancêtres, le cladisme pose au contraire des difficultés à une interprétation anagénétique darwinienne (voir ces mots dans l'ancien cours de terminale (§4b): l'anagénèse, progressive et continue, s'opposant à la cladogénèse, discontinue ; cette distinction n'est d'ailleurs peut-être pas aussi moribonde qu'on veut bien le dire, même si l'évolution est maintenant surtout vue comme buissonnante).


relativisme ?
essentialisme ?


Du point de vue philosophique, la méthode cladistique qui nous est présentée actuellement est héritière du nominalisme et, à mon avis, fréquemment adossée au relativisme philosophique, comme je vais essayer de l'établir.


Je crois que, si l'on ne peut pas s'affranchir de la relativité des liens logiques entre les éléments d'une classification cladiste , on reste en droit, par contre, de ne pas accepter le relativisme philosophique qui va souvent avec.


Contrairement à ce que certains cladistes, philosophiquement matérialistes, affirment, l'idée d'une classification naturelle, naturellement ordonnée, n'est pas une idée du passée, une folie d'essentialistes bornés, mais le fondement de toute classification sensée. Et cela n'empêche pas d'utiliser la cladistique comme une méthode scientifiquement intéressante (de par les liens qu'elle établit dans la communauté scientifique).
Mais je rejette, du point de vue philosophique, si j'ai bien compris les éléments vulgarisé par G. Lecointre, une certaine façon de faire du cladisme , qui n'est peut-être pas la seule, et qui affirme :
une classification cladiste -relativiste- , a pour point de départ - et d'arrivée - qu'il n'existe pas de classification naturelle, qu'il n'y a d'autre ordre dans la nature que celui que l'homme y met, par sa pensée (ce que l'on peut qualifier d'idéalisme) et, plus exactement, qu'il croît y mettre en classant des mots (ce qui fait référence au nominalisme). Ainsi, le cladisme devient une classification du non-être qui veut établir en principe un refus du monde extérieur, identique pour tous les hommes, pour y mettre un consensus autour de l'absence de vérité définitive. Comme tout homme qui croit à la vérité de l'homme et du monde j'affirme que le cladisme n'est qu'une méthode, avec des qualités et des défauts, qu'elle n'est pas plus scientifique que d'autres méthodes : les classifications évolutives naturelles, qui présentent un sens à l'évolution, ne sont pas à mettre au placard. Il est aussi de notre droit d'utiliser le travail du cladisme sans croire aux balivernes de ceux qui en font leur (seul ?) outil de compréhension de la diversité du monde vivant.



L'ambiguïté est peut-être entretenue par les promoteurs-vulgarisateurs des classifications cladistes qui rejettent fortement l'essentialisme sans pour autant adhérer philosophiquement à un relativisme anti-réaliste. Leur position plus ou moins scientiste est venue ainsi ternir l'image d'une cladistique moins marquée philosophiquement par le relativisme, et qui reste, à mon avis, possible. (voir citation de R. Blanchette ci-contre)


« De fait, incapables de sortir du dilemme que leur posent leur acceptation de la condamnation de l'essentialisme et leur hésitation à embrasser pleinement l'anti-réalisme épistémologique, les écoles [de classification] se contentent de proposer des approches de la prise de décision différentes en reportant leur attention sur la question de l'objectivité en science ». (thèse de Richard Blanchette, Le problème de la classification en zoologie, Université Laval (Québec), PhD, juin 2002) que l'on peut trouver in extenso au format PDF sur internet à l'adresse: http://www.theses.ulaval.ca /2002/20168/ 20168.pdf)

Partie précédent la citation ci-dessus, qui ouvre le débat sur les autres classifications:
« Le problème de la classification en zoologie se perpétue, en grande partie, parce que les trois écoles [voir cours terminale] ont accepté la condamnation de l'essentialisme au nom du transformisme et de la thèse ontologique nominaliste (voir ci-dessous), sans que n'ait été faite toute la lumière sur la notion aristotélicienne de nature.
Ceci a eu pour principale conséquence d'exclure la taxinomie rationnelle du débat parce que la condamnation de l'essentialisme a pour corollaire le rejet de la classification typologique et de tout ce qui pourrait s'y apparenter de près ou de loin. Ce faisant, le contentieux entre les écoles se ramène à la possibilité d'avoir ou non une taxinomie à la fois objective et historique.»
(Pour un éclairage simple et personnel voir la fiche Qu'est-ce qu'une espèce ? et pour une discussion voir l'article de Louis Thaler : l'espèce: type ou population ?)



Remarques :







J'ai trouvé dans mes sources deux références au nominalisme: Bruno Chanet qui affirme que le principe de parcimonie est hérité de Guillaume d'Occam (Bruno Chanet, Biologie-Géologie n°3-1997, p 507) et Guillaume Lecointre et Hervé le Guyader qui dans leur introduction, affirment que «la plupart des phylogénéticiens ont, à l'égard du vivant, une attitude nominaliste qui fut celle de Darwin, aux antipodes de l'essentialisme» (Classification phylogénétique du vivant, Guillaume Lecointre et Hervé Le Guyader, Belin, 2001,p 18).


Les auteurs de Classification phylogénétique du vivants considèrent que «croire que l'évolution a un but , a , pour corollaire, de croire que la nature intime des êtres, l'essence, d'un point de vue philosophique, précède l'existence » (p 17). Derrière cette phrase caricaturale je pense que les auteurs se réfèrent à Popper en utilisant le terme d'essentialisme: (Popper, Conjectures et Réfutations, chap. 3,3). Ce dernier utilise ce terme pour qualifier (par opposition à l'instrumentalisme et à la définition popperienne d'une démarche par conjecture et réfutation) que l'objet de la connaissance, même scientifique, est l'essence des choses, cachée derrière les apparences; Dans le cadre d'une acception popperienne, l'essentialisme a 3 conséquences que l'on peut résumer ainsi: toute science possède un objet fixe, il existe une vérité, sens et vérité sont synonymes.


Cependant, l'acception popperienne du mot essentialisme n'est pas l'acception première de philosophie opposée à l'existentialisme sartrien. Quoiqu'il existe aussi une utilisation plus subtile, en logique, pour désigner une assertion selon laquelle s'il y a des lois vraies (logiquement), elles décrivent non seulement ce qui est (en dehors de la façon dont nous les percevons) mais aussi ce qui doit être (propriétés nécessaires ou essentielles); mais ces vérités nécessaires ne sont pas connaissables a priori mais a posteriori pour un essentialiste. La définition qui en est donnée (l'essence précède l'existence) ne vaut que dans un discours logique. On pourrait dire que Platon est essentialiste, mais pas Aristote, ni moins encore Saint Thomas.
Quand à Guillaume d'Ockham (~ 1290 ~1349) il est le père de ce qu'on appelle le terminisme (en simplifiant la synthèse de Jean Duns Scot il ne garde du réel que la matière et la forme, et place dans la logique toutes les autres distinctions de l'être: essence, existence qui ne sont que des êtres de raison) qui est sans aucun doute le précurseur du nominalisme, tout comme il l'est du positivisme et de l'expérimentalisme. C'est en ce sens qu'il est cité à mon avis par les cladistes. Que G. d'Ockham soit le père d'un principe logique comme le principe de parcimonie, comme l'affirme B. Chanet, me semble une simple référence à un fondateur du nominalisme, sans qu'il y ai ici une vérité historique (pour laquelle je n'ai pas de compétence).
Le nominalisme sur lequel s'appuie le cladiste est probablement le nominalisme méthodique au sens de Quine mais je ne suis pas philosophe spécialiste de cette question, étant je crois très nettement de sensibilité réaliste.



Le seul article, disponible sur internet, et qui s'élève un peu, au sujet de l'ouvrage de Lecointre-Le Guyader est de Claude Lévi-Strauss (Guillaume Lecointe & Hervé Le Guyader, Classification phylogénétique du vivant. Illustrations de Dominique Visset. Publié avec le concours du Centre national du livre. Paris, Belin, 2001, 543 p., annexes, bibl., index, tabl., L'Homme, 162, Questions de monnaie, 2002 à l'adresse: http://lhomme.revues.org/ document169.html



3. Les voies de recherche








Si le cladisme "pur" (anhistorique) est mort on peut identifier au moins deux prolongements (souvent mélangés) : le cladisme "statistique" et le cladisme "historique".



3.1 cladisme et statistiques




Le seul qui choisit c'est le chercheur... pas la machine

 

Comprendre et utiliser les statistiques dans les sciences de la vie, B. Falissard, Masson, 2005 Un livre qui pose de bonnes questions dans certains domaines (voir site auteur) mais presque sans mathématiques, ce qui en décevra certains


Si les statistiques se retrouvent à tous les niveaux de l'analyse cladistique, ce n'est que récemment (au XXIème) qu'elles ont pris une telle ampleur et il y a un risque d'erreur car rares sont les biologistes à maîtriser l'outil aussi bien qu'un spécialiste (mais est-ce souhaitable ?).
Voici par exemple deux domaines d'utilisation:


* Le fait de faire tourner un programme qui "choisit" l'arbre optimal pour vous (il calcule celui qui possède les caractéristiques que VOUS avez choisies) n'est pas sans induire une certaine déconnexion entre le résultat (qui est toujours comparé avec ce qui était attendu) et l'ensemble des hypothèses (parfois bien cachées) nécessaires à l'obtention de celui-ci.


* Les statistiques sont par contre employées avec de plus en plus de pertinence pour construire des caractères simples discontinus (morphologiques par exemple..., voir exemple) à partir de regroupements de plusieurs caractères complexes dont certains peuvent être continus, ou encore pour extrapoler des caractères manquants dans certains groupes...

Cette fois ces méthodes statistiques de construction sont assez classiques et ne demandent pas un niveau de connaissance mathématiques trop élevé pour un naturaliste.










3.2 cladisme et phylogénie




cladisme et typologie


Au sens premier les taxons des cladogrammes doivent être des individus et non des espèces, concept non expérimental. Ainsi chaque taxon se trouve ainsi réduit à être représenté par une somme de caractères. Ne pourrait-on voir ici une certaine résurgence de l'espèce typologique, tant décriée par certains ?


évolution des caractères


L'évolution touche les espèces et non les individus. Encore moins les caractères. Les caractères des individus peuvent-ils être interprétés phylogénétiquement ?
Y-a-t-il une évolution concernant un caractère comme la capacité crânienne, la pilosité, la forme du lobe de l'oreille ?
Ne fait-on pas une erreur grave lorsque l'on parle de variation de caractères entre une forme ancestrale, une forme évoluée, ou lorsque l'on parle de convergence ou d'analogie... ?


représenter le temps et même la vitesse d'évolution


Dans la représentation cladistique classique de l'évolution, les traits reliant les taxons représentent une relation logique de ressemblance (similitude) évaluée statistiquement (caractères polarisés identiques les plus nombreux...). La ressemblance se traduit par une distance proportionnelle à cette ressemblance sans qu'il soit possible d'invoquer un mécanisme de changement brusque (de type catastrophique au sens de René Thom).
De même, si le temps n'est pas représenté dans un cladogramme, la vitesse d'évolution (que l'on considère maintenant comme variable) ne peut l'être davantage.

Les phylogrammes moléculaires qui sous-tendent des mécanismes génétiques moléculaires évolutifs (mutations, duplications...) utilisent clairement le temps et proposent même la notion d'horloge moléculaire. Ces représentations ne peuvent clairement plus être considérées comme des cladogrammes, même si des analyses de type cladistique sont réalisées sur les séquences.


L'utilisation de datations, avec des fossiles par exemple, conduit aussi à des phylogrammes qui ne sont plus en accord avec les principes des cladogrammes (rotation possible autour des nœuds par exemple).


Mais il existe d'autres représentations qui contiennent le temps à partir d'un vrai mécanisme historique évolutif, mais non limité aux molécules. C'est la voie proposée par André Pichot avec sa divergence évolutive mesurant une vitesse d'évolution.


Histoire de la notion de vie, André Pichot





hérédité et évolution

page spéciale à partir du travail d'André Pichot: Hérédité, reproduction et évolution


Quels sont les liens entre l'hérédité, la reproduction, la descendance et l'évolution ?

Depuis Weismann il existe une vraie confusion entre généalogie et phylogénie, entre hérédité et mémoire exprimée notamment chez Haeckel (avec les mots d'André Pichot : «... l'hérédité est supposée être une sorte de mémoire ayant gardé la trace de la phylogénèse et, en commandant le déroulement de l'ontogénèse, elle fait de celle-ci une récapitulation de la phylogénèse (voir aussi page annexe. Il est très difficile de sortir de sa tête cette séparation entre le matériel génétique héréditaire (associé traditionnellement aux chromosomes mais que l'on tend à élargir aujourd'hui aux ARN, voire à certaines protéines...) et processus acquis (souvent nommés à tort épigénétiques) stockés on ne sait où...


Quand à la reproduction elle a été bien trop longtemps enseignée comme un simple moyen de transmettre des chromosomes (quand ce ne sont pas les gènes...), ce qui occulte sa dimension proprement évolutive, du fait de son rattachement à l'espèce et non à l'individu.







En travaux

4 . Des exemples de "vrais" et de "faux" cladogrammes




Plan:
4.1 - à la racine du cladogramme du vivant
4.2 -
les dinosaures fossiles
4.3 -
la lignée humaine
4.4 -
L'origine des hippopotames et des cétacés...

Nommer-classer

http://tolweb.org/ : l'arbre de la vie... ou plutôt des arbres. Les arbres présentés mêlent à la fois les cladogrammes et le temps de façon plus ou moins claire.


Remarques:
Le cladisme ne représentant pas l'histoire mais des classements phylogénétiques d'individus il est essentiel de ne pas se représenter UNE CLASSIFICATION PHYLOGÉNÉTIQUE mais bien des cladogrammes variés qui ont tous des hypothèses évolutives claires et plus ou moins fondées. Rien n'est plus éloigné de la méthode cladiste qu'un arbre généalogique.

La présentation d'un arbre phylogénétique (phylogenetic tree) relève donc de choix discutables (et discutés) mais cache parfois une erreur de compréhension de l'intérêt ou même des fondements du cladisme.

Dans ce paragraphe je présenterais, au fur et à mesure, des cladogrammes-arbres pouvant être utiles....

4.1 - à la racine du cladogramme du vivant





http://tolweb.org/tree/ToLimages/eocytetree.png


http://tolweb.org/tree/ToLimages/archaeatree.png


Deux arbres qui sont en fait des cladogrammes (on est bien incapable de placer le temps de façon certaine, même si l'on pense que les eucaryotes devraient apparaître après les procaryotes.... mais cela aussi se discute...).

Deux hypothèses sur l'origine des Eucaryotes : les Archées (bactéries "archaïques") forment-elles un clade ?
- non : hypothèse du haut
(et dans ce cas le nom même doit disparaître...)
- oui : hypothèse du bas.


Les Eubactéries comprennent les bactéries au sens classique d'où seraient dérivées les mitochondries et les chloroplastes des cellules eucaryotes.
Les Archées vivent notamment dans les environnements "extrêmes" et comprennent les bactéries halophiles, méthanogènes et sulfureuses.

 

Un très intéressant article d'histoire des sciences par Jan Sapp (en libre accès) qui replace historiquement la signification de la séparation procaryotes-eucaryotes:
The Prokaryote-Eukaryote Dichotomy: Meanings and Mythology, Jan Sapp, Microbiology and Molecular Biology Reviews, June 2005, p. 292-305, Vol. 69, No. 2, 1092-2172


Comme il n'existe pas de définition consensuelle de l'espèce en bactériologie,
il n'existe pas non plus de classification unique et consensuelle des procaryotes
(voir par exemple le page de J.P. Euzéby).
Les taxinomies phénétique, moléculaire ou encore chimique, sont encore très employées.


4.2 - les dinosaures fossiles





http://www.dinosauria.com/pics/clados/clado.gif


Pour naviguer dans ce cladogramme pédagogique de T. Mike Keesey de 1999 mis en forme par Jeff Poling (qui insiste bien sur son côté provisoire et non consensuel), allez à la page d'accueil plus cliquez sur les nœuds rouges du cladogramme pour obtenir des parties détaillées des clades réunis au niveau des nœuds.

Les taxons "incertæ sedis" (notés i.s.) sont des fossiles plus ou moins fragmentaires inclassables. On leur attribue parfois une classification propre (parataxinomie) plus ou moins signifiante.
Pour les dinosaures il s'agit par exemple d'empreintes de pas, de coprolithes (fèces fossiles)... mais on leur donne tout de même un nom double, qui doit si possible différer fortement des noms des genres et espèces de fossiles complets, dans la classification linéenne.


Dinosauria Cladogram : http://www.dinosauria.com /dml/clado /ci.htm

4.3 - la lignée humaine




González-José, R., Escapa, I., Neves, W.A., Cúneo, R., Pucciarelli, H.M. (2008). Cladistic analysis of continuous modularized traits provides phylogenetic signals in Homo evolution. Nature DOI: 10.1038/nature06891

(version gratuite en ligne accessible le 6/06/2009)

 

cours de 1ère l'évolution de l'homme


Un autre exemple très pédagogique (et attirant) bien que fort difficile est celui de la lignée humaine.
J'ai utilisé ici l'article de Nature 453 du 5 juin 2008 qui met en avant l'utilisation de caractères CONTINUS dans les analyses cladistiques
, ce qui n'est pas pour me déplaire étant donné l'orientation de ce site.
Le but de cette étude n'est pas de fournir des résultats révolutionnaires mais au contraire de conforter des hypothèses, habituellement admises à l'aide des outils les plus performants que l'on peut fournir à l'analyse cladistique, réputée difficile d'utilisation dans le cadre de l'étude de la lignée humaine.
Les caractères qui semblent présenter une variation continue, et particulièrement les caractères morphologiques comme une hauteur, une largeur..., sont de très mauvais caractères pour les cladogrammes puisqu'il est difficile de parler d'un état dérivé ou primitif
(ils peuvent s'utiliser beaucoup plus aisément dans des analyses phénétiques où l'on chiffre un degré de ressemblance). Habituellement, on isole des classes d'équivalence afin de présenter une variation discontinue (et les méthodes de discrétisation sont complexes voir réf 3 ci-dessous). Mais ce n'est pas la seule démarche. La démarche qualifiée d'intégration morphologique s'efforce, depuis longtemps, d'intégrer les caractères continus dans les cladogrammes à l'aide de leur regroupement en complexes le plus souvent appelés modules (voir par exemple Olson, E. C. & Miller, R. L. Morphological Integration, Univ. Chicago Press, Chicago,1958).
Le traitement des caractères continus dans les arbres a fait l'objet de plusieurs approches mathématiques.
La méthode employée ici est extrêmement simple dans sa mise en œuvre: toutes les mesures (voir extraits ci-dessous) sont regroupées mathématiquement (par ACP, voir réf 1) en 4 paramètres modulaires (voir extrait ci-dessous) qui sont ensuite traités mathématiquement dans la construction du cladogramme comme des caractères continus.

Tableau 1
Tous les spécimens utilisés viennent des collections du Laboratorio de Estudos Evolutivos Humanos de l'Universidad de Sao Paolo, Brésil, sauf Prob, Hgeo and Hhei-A, qui viennent de l'Unitat d'Antropologia, Faculty of Biology, University of Barcelona, et Hsap, qui vient du Museo de La Plata, Argentina. Des projections de première génération ont été utilisées pour les spécimens fossiles. Reconstructions de Sawyer et Tattersall. Les temps sont des âgess de séparation, entre chaque lignée et H. sapiens, estimés à partir de données moléculaires (
* ca. = circa = "voisin de" en latin = environ ).

1. Aafa (A.L. 444-2) (reconstruction) Australopithecus afarensis ( ≥ 3.7 - 3.0 Ma)
2. Aafr (
Sts 5), A. africanus (ca.* 3,0-2.5 Ma)
3. Pboi-406 (
KNMER-406), Paranthropus bosei ( ≥ 2.3 - 1.4 Ma)
4. Pboi-OHS (
OH 5), Paranthropus bosei ( ≥ 2.3 - 1.4 Ma)
5. Prob (
SK 48), Paranthropus robustus (ca.* 1.5-2.3 Ma)
6. Paet (
WT 17000), Paranthropus æthiopicus (ca.* 2.7-2.3 Ma)
7. Hrud (
KNMER 1470), Homo rudolfensis (2.5-1.8 Ma)
8. Hhab (
KNMER 1813), Homo habilis (2.1-1.5 Ma)
9. Herg (
KNMER 3733), Homo ergaster (2-1 Ma)
10. Here (Zhoukoudian), Homo erectus (1.8 - 0.03 Ma)
spécimen controversé* 11 . Here-Herg ( D2700), Homo erectus / H. ergaster (1.8 Ma)
12 . Hhei-S (
Steinheim), Homo heidelbergensis (0.8 - 0.2 Ma)
spécimen controversé* 13. Hrho (Kabwe a.k.a. Broken Hill 1), Homo rhodesiensis ((0.8 - 0.2 Ma)
14. Hhei-A (
Atapuerca 5), Homo heidelbergensis ((0.8 - 0.2 Ma)
15. Hhei-G (
Gibraltar 1), Homo neanderthalensis (0.2 - 0.03 Ma)
16. Hhei-LC (
La Chapelle-aux-Saints), Homo neanderthalensis (0.2 - 0.03 Ma)
17. Hhei-LF (
La Ferrassie 1), Homo neanderthalensis (0.2 - 0.03 Ma)
Ggor (CTL-004) Gorilla gorilla (estimation de la séparation avec la llignée humaine : 9-0 Ma)
Ptro (CTL-006) Pan troglodytes (8-0 Ma)
Hsap (Patagonian, Rio negro #797) Homo sapiens (0.2- 0 Ma)


Cladogramme
(modifié pour l'aspect graphique mais pas pour le contenu) obtenu avec la méthode d'analyse parcimonieuse avec poids identique et maximum de parcimonie à partir des 4 modules crâniens. Les valeurs de robustesse de Bremer sont données en regard du n° d'ordre de chaque nœud. * Hrho et Here-Herg sont controversés selon les auteurs de l'article.


Cladogramme obtenu avec la même matrice mais avec la méthode du maximum de vraisemblance.


«RÉSUME DES MÉTHODES
Les coordonnées 3-D des marqueurs crânio-faciaux des 17 spécimens de crânes d'hominidés fossiles, de Pan paniscus, de Gorilla gorilla et d'Homo sapiens, ont été digitalisés (voir ci-contre). Les marqueurs ont été séparés en 4 groupes
[modules] décrivant :
- la
flexure de la base du crâne,
- la
compression faciale,
- la
rotondité du neurocrâne,
- et l'
appareil masticateur.
Chaque module a été superposé en utilisant l'analyse Procuste généralisée pour éliminer les effets de translation, rotation et de changement d'échelle. Chaque module a ensuite été soumis à une analyse du composant principal
(1), la projection de chaque spécimen sur les composants principaux étant alors utilisé comme descripteur de forme et considéré comme un caractère continu dans l'analyse cladistique. les arbres ont été obtenus en prenant Gorilla gorilla comme racine et en utilisant le principe de parcimonie maximale ainsi que le critère de vraisemblance maximale. Les états ancestraux obtenus à partir de l'algorithme de parcimonie maximale ont été utilisés pour visualiser les changement de forme au niveau de chaque nœud de l'arbre.»
«METHODS SUMMARY
Three-dimensional craniofaciallandmark coordinates were digitized on 17 fossil hominid specimens and Pan paniscus, Gorilla gorilla and Homo sapiens skulls (Table 1). Landmarks were divided into four different subsets describing flexure of the cranial base, facial retraction, neurocranial globularity and the masticatory apparatus. Each subset was superimposed using generalized Procrustes analysis to remove the effects of translation, rotation and scaling, and then submitted to a principal component analysis, Projection of each specimen on the principal components was used as the shape descriptor and considered as a continuous trait in the cladistic analysis. Trees were obtained using Gorilla gorilla as the root, and using maximum parsimony as well as maximum likelihood criteria. Ancestral states obtained from the maximum parsimony algorithm were used to visualize the shape changes corresponding to each node on the tree.»



Les 4 modules (regroupant chacun plusieurs mesures) utilisés comme catactères continus dans les cladogrammes. Les repères sont tracés ici sur le crâne d'Homo sapiens. L'acquisition a été faite à l'aide d'un appareil à digitaliser de type Microscribe G2X.
Il est à noter que plusieurs repères sont extrapolés étant donné les manques au niveau des crânes (voi extrait ci-dessous).


Deux exemples des grilles de déformation obtenues en visualisant la valeur de la composante principale pour chaque module. Chaque grille utilise la première composante principale comme référence.



Le principal résultat est que le genre Homo correspond à un clade (nœud 8), c'est-à-dire un groupe monophylétique (avec un ancêtre commun). C'est une des constantes des résultats de la paléoanthropologie. L'état ancestral des caractères pour le nœud 8 est représenté ci-dessus : on observe une flexure de la base du crâne plus prononcée, une face plus rétractée et une augmentation de la rotondité neurocrânienne.
On remarquera aussi le bon accord de l'arbre avec l'idée selon laquelle H. heidelbergensis et H. neanderthalensis ne sont que des variantes chronologiques d'une même lignée biologique. « Le fait qu'H. neanderthalensis au sens strict ne forme pas un clade monophylétique avec H. sapiens renforce l'idée qu'ils constituent des espèces séparées».
Enfin on remarque qu'H. rudolfensis constitue un groupe-frère de tous les clades ci-dessus et qu'H. habilis est à la base du clade monophylétique d'Homo.



«METHODS

Data acquisition and geometric morphometrics.
Data were collected as threedimensional coordinates of anatomical landmarks on the casts of specimens listed in Table 1. The landmark used in each character is provided in the Supplementary Information. All crania were measured by one observer (R.G.),) using a Microscribe G2X digitizer. Because many of the fossil specimens were incomplete, some landmarks were reconstructed using anatomical information from the preserved surrounding areas. Missing bilaterallandmarks or one side only were estimated by reflection. Scores were standardized to a mean of zero and a variance equal to the proportion of the variance explained by the corresponding principal component. Principal components have a biological meaning, as orthogonal dimensions of variance, even though that is not equivalent to the meaning of a character. They are not likely to be characters in their own right because they are directions of variation that are constrained to be orthogonal (by definition), not directions of evolutionary change. However, data matrices submitted to cladistic analysis are not formed by characters represented by consecutive principal components of a single morphological structure, but by a collection of the first principal components representing the main trends of morphological change on four independent modules, Thus, overlapping of two or more specimens in a given-character principal component score does not mean that they are similar for a principal component on the remaining characters,

Cladistic analysis.
The matrix is composed of 20 cranial specimens (Table 1) and 18 characters, which correspond to the firsts principal components of each module necessary to account for the 75% of explained variance. Maximum parsimony cladistic analysis used equal weighted maximum parsimony implemented in TNT, which allowed the use of continuous characters as such by optimizing them following the classical algorithm for additive characters. When using continuous characters, a synapomorphy could be just a subtle change in one character. Thus, using continuous characters implies that there are an infinite number of character states. The most parsimonious tree was obtained using a heuristic search with 10,000 random addition sequences followed by tree-branching-regrafting. Characters were polarized, using G. gorilla to root the tree. Branch support was estimated using the Bremer method, using the suboptimal trees from 0.1 to 1 additional steps, Ancestral shapes are the optimizations of the maximum parsimony tree using the Wagner algorithm. When using continuous traits, the usual output of this algorithm is a range of ancestral states, according to the maximum parsimony principle. Thus, to visualize the ancestral shape, we mapped back the transformations by taking the central value of the range and back-standardizing the standardized scores to recover the raw score values, These raw scores were used as the 'target' to obtain the wireframe depicting shape changes from the reference. Alternatively, because quantitative traits are expected to reverse direction in a Brownian-motion-like manner, a maximum likelihood tree was computed following Felsenstein.»


Méthodes

Acquisition des données et mesures géo-morphométriques
Les données collectées sont des coordonnées tridimensionnelles des repères anatomiques placés sur les moulages des spécimens qui répertoriés dans le
tableau 1. Les repères utilisés pour chaque caractère sont détaillés dans la section Informations Supplémentaires. Tous les crânes ont été mesurés par un unique expérimentateur à l'aide d'une digitaliseur de type Microscribe G2X. Étant donné que de nombreux spécimens fossiles étaient incomplets, plusieurs repères ont été reconstruits à l'aide des informations anatomiques des aires voisines en bon état. La position des repères manquants des deux côtés ou présents d'un seul côté a été estimée par réflexion. Les mesures ont été normalisées (2) afin d'obtenir une moyenne nulle et une variance proportionnelle à la variance expliquée par la composante principale (1). Les composantes principales ont une signification biologique (3), en tant que dimensions de variance orthogonales, même si ce n'est pas une signification de même type que celle d'un caractère. Elles n'ont pas vocation a être des caractères car ce sont des directions de variation qui sont contraintes à être en position orthogonale (par définition) et non des directions de changement évolutif. De toute façon les données des matrices des analyses cladistiques ne sont pas constituées de caractères qui seraient représentés par les composantes principales d'une structure morphologique unique, mais par un ensemble des premières composantes principales qui représentent les principales tendances d'un changement morphologique au niveau de 4 modules indépendants. Et donc, le chevauchement de deux spécimens ou plus, au niveau de l'enregistrement d'un composant principal d'un caractère donné, ne signifie pas qu'ils soient similaires au niveau d'un composant principal pour les autres caractères.

Analyse cladistique
La matrice est composée de 20 spécimens de crâne (
Tableau 1) et de 18 caractères, qui correspondent aux premières composantes principales de chaque module qui rendent compte de 75% de la variance expliquée. Une analyse cladistique par maximum de parcimonie a été réalisée à l'aide du logiciel TNT (libre) qui permet aussi bien d'utiliser des caractères continus que de les optimiser à l'aide de l'algorithme classique des caractères additionnels. Lorsque l'on utilise des caractères continus, une synapomorphie peut correspondre simplement à un léger changement au niveau d'un seul caractère. Ainsi, le fait d'utiliser des caractères continus a pour conséquence le fait d'avoir une infinité d'états possibles pour chaque caractère. L'arbre le plus parcimonieux a été obtenu en effectuant une recherche heuristique avec 10.000 additions de séquences au hasard suivies par le branchement-greffage de l'arbre. Les caractères ont été polarisés en utilisant G. gorilla comme racine de l'arbre. La robustesse de l'arbre a été évaluée à l'aide de la méthode de Bremer, avec des arbres suboptimaux pour un pas additionnel de 0.1 à 1. Les formes ancestrales sont obtenues par optimisation de l'arbre le plus parcimonieux par l'algorithme de Wagner. Lorsque des caractères continus étaient utilisés les résultats donnés par cet algorithme forment une série d'état ancestraux, en accord avec le principe de parcimonie maximale. Nous avons alors cartographié les transformations en prenant la valeur centrale de la série et en étalonnant les valeurs des mesures pour revenir aux valeurs brutes. Les valeurs brutes sont ensuite utilisées comme 'cible' pour obtenir la grille de la forme décrivant les changement par rapport à la référence. Par ailleurs, étant donné que les caractères qualitatifs sont supposés changer de sens comme dans un mouvement brownien, un arbre du maximum de vraisemblance a été calculé selon la méthode de Felsenstein.

En travaux


(1) 'analyse en composantes principales (ACP) est une technique d'approximation qui consiste à réduire un grand nombre de variables (sans condition particulière sur celles-ci) à un ensemble de variables indépendantes (les composantes principales) calculées comme étant les variables qui présentent la variance maximale.
(2) normalisation des variables: technique qui consiste plus ou moins à "zoomer" sur l'intervalle des valeurs prises par les variables (on remplace chaque variable par le rapport entre sa différence à la moyenne et l'écart type, ce qui permet d'obtenir une moyenne des valeurs normalisées nulle et un écart type unité).
(3) pour une compréhension (sans calculs) des statistiques employées en SVT: Comprendre et utiliser les statistiques dans les sciences de la vie, B. Fallisard, Masson, 2005;
accès partiel sur google books et site de l'auteur: http://h0.web.u-psud.fr/biostatistiques/#





4.4 - L'origine des hippopotames et des cétacés...


Le but de cet exemple est double :
- montrer l'intérêt que tout le monde a à concilier les résultats des analyses cladistiques moléculaires avec ceux des caractères anatomiques et physiologiques.
- montrer que les erreurs de jeunesse de l'enseignement du cladisme sont maintenant dépassées et que l'on peut ENFIN séparer les cladogrammes (anhistoriques et comprenant ou non des données moléculaires) et les données paléontologiques (historiques) et les regrouper dans des phylogénies.


Objectif clairement affiché:
concilier les données paléontologiques (chronologie, anatomie...) avec les données moléculaires ayant donné lieu à des cladogrammes qui sont restés, pendant de nombreuses années, en franc désaccord avec les résultats des méthodes classiques.


Les ancêtres des hippopotames, J-R. Boisserie et al. La Recherche, 450, mars 2011, pp 52-55 : encore un article vraiment pédagogique de La Recherche et accessible à des élèves de lycée. On notera que cladogramme et chronologie sont ENFIN séparées comme l'exige la méthode cladiste.

Ce sont les cladogrammes construits UNIQUEMENT à partir de caractères moléculaires qui ont été les déclencheurs d'une recherche toujours en cours pour arriver à un consensus sur l'origine des cétacés et partant des hippopotamidés.


Avant 1990 les résultats obtenus à partir des quelques séquences d'aa comme la β-hémoglobine ou la ribonucléase indiquaient déjà un rapprochement entre les Artiodactyles et les Cétacés. Mais le gros du travail a été réalisé entre 1990 et 2001. Gatesy rapporte en 2001 que plus d'un million de paires de bases d'ADN provenant de cétacés ou d'espèces apparentées ont été collectées dans ces années (séquences de gènes de protéines ubiquistes, séquences de gènes mitochondriaux, nombreux autres gènes). Des méthodes complémentaires d'analyse de génome comme les hybridations ADN-ADN et l'insertion de transposons ont aussi été utilisées. Les cladogrammes obtenus à partir des données moléculaires allaient TOUS dans le sens de l'origine commune entre Cétacés et Artiodactyles. Un nouveau groupe - les Cétartiodactyles- était envisagé.



un cladogramme à partir des données génétiques d'animaux ACTUELS...


Comme les hippopotames étaient d'incontestables artiodactyles, cela fournissait une origine commune aux artiodactyles et aux cétacés. Mais ces données moléculaires étaient en désaccord avec les données paléontologiques, car aucun fossile ancien de cétacés (datés d'environ 53 millions d'années) ne présentait un élément anatomique toujours présent chez les artiodactyles: l'astragale (os de la rotule) à double poulie.

Les mammifères terrestres artiodactyles sont un ordre dans lequel on classait les Hippopotames, les Suidés (cochons et sangliers) et de nombreux autres mammifères dont l'axe du membre passe entre les doigts III et IV comme les Ovins ou les Camélidés). Les Cétacés avaient une origine incertaine même si les fossiles, formant le groupe des Archéocètes, extraits de sédiments datés de l'Eocène-Miocène, montraient d'évidents rapports avec les Mammifères terrestres. On penchait même parfois pour une origine différente entre les Odontocètes (Cétacés à dents: dauphins, orques et autres planistes (dauphin de rivière)) et les Mysticètes (Cétacés à fanons comme les baleines).(in Grassé, Précis de zoologie, t3, Masson, 1977).



 


une chronologie à partir des fossiles...

En 2001, deux équipes « publièrent des analyses de deux squelettes quasi complets de cétacés primitifs datés de 50 à 45 Ma et possédant des caractéristiques d'artiodactyles : quadrupèdes, avec des pattes arrière parfaitement développées, [] et un astragale indéniablement pouvu de deux poulies.» Il ne restait plus qu'à relier les hippopotames aux Cétacés grâce aux fossiles. Ceci a été réalisé par une équipe française entre 1997 et 2005. En utilisant la méthode cladiste de comparaison de nombreux caractères anatomiques de fossiles de tous les groupes qu'ils souhaitaient relier, ils ont pu enraciner les hippopotames primitifs au sein du groupe fossile des Anthracothères. Pour parfaire leur analyse, ils intégrèrent les dents de nombreux hippopotamidés fossiles (notamment Kenyapotamus, le plus ancien fossile du groupe daté de 16 à 8 Ma) à leurs arbres et c'est en 2010 qu'ils établirent de façon rigoureuse que les hippopotames dériveraient de certains Anthrocothères, d'autres évoluant vers les Cétacés.

Depuis 2001 environ on peut donc dire que les études anatomiques à partir des fossiles et les études moléculaires sur les espèces actuelles n'ont cessé d'aller dans le même sens. Les découvertes se succèdent et confortent les cladogrammes qui deviennent des phylogrammes intégrant les données actuelles et fossiles et le temps.



À gauche, un cladogramme classique incluant des fossiles et réalisé à partir de caractères anatomiques principalement; seuls les Artiodactyles, les Cétacés et les Équidés sont représentés, mais d'autres groupes existent; à droite un cladogramme récent utilisant les seules données moléculaires sur des animaux actuels.

 

Un truc pour ne plus se tromper dans l'orthographe d'hippopotame:
en grec "hippo" signifie "cheval " (c'est la même racine pour hippique et il y a deux p) et en grec ancien "potamos" = "fleuve"; "hippo-potame", c'est "le cheval du fleuve".