Cours de seconde

Biologie II - Cellule, ADN et unité du vivant (11 semaines)


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1. Des cellules... à la cellule, unité du vivant

Un être vivant c'est une forme vivante.
Un être vivant c'est d'abord une forme, perçue habituellement par le sens le plus développé chez l'homme: la vision. Cette forme peut être décrite géométriquement. La géométrie est une branche des mathématiques qui étudie les formes dans l'espace; c'est-à-dire qu'elle s'intéresse à l'espace de tout un chacun (à trois dimensions) mais sans s'intéresser au temps qui forme la quatrième dimension de notre espace de vie. Il faut donc, en plus de la géométrie une cinématique qui est la science des corps en mouvement (des corps qui changent de coordonnées dans l'espace au cours du temps). Enfin, comme les formes se déforment avec le temps, il faut une dynamique qui décrive ces transformations au cours du temps.

Les biologistes ont l'habitude de décrire les formes en termes de structures et les dynamiques et mouvements en termes de fonctions. Mais ces termes recouvrent des notions qui n'ont cessé de s'appauvrir au fil des siècles (et qui ne parlent plus aux élèves) au point qu'il apparaît urgent de les définir le plus précisément possible avec l'outil intellectuel le plus performant et universel qui soit (neutre éthiquement de plus): les mathématiques.
Remarque: la notion de forme, notamment en biologie, a été particulièrement développée par un mathématicien académicien, René Thom, récemment décédé. Ses outils qui continuent d'être développés en France pourraient s'avérer être essentiels. Voir un aperçu dans une page annexe.  

1.1 . La cellule est une unité de structure

Parfois il est préférable d'utiliser le terme de forme au sens courant de volume dans l'espace usuel à 3 dimensions plutôt que de structure mais dans ce cas il est clair que c'est une forme statique (sans le temps) que l'on s'efforce de décrire.

1.1.1 - Les formes vivantes les plus simples sont les unicellulaires mais elles vivent rarement isolées

1.1.1.1 - Les plus petites formes vivantes sont des bactéries, unicellulaires procaryotes, qui forment des groupes d'un grand nombre d'individus

Un schéma simplifié de l'ultrastructure* d'un unicellulaire procaryote

 

* l'ultrastructure est la structure visible au microscope électronique (MET); il est important de savoir que les structures mises en évidence ici sont dues à la coloration au tétroxyde d'osmium et sont vues sur un organisme mort (voir TP1 et par exemple le film CNRS sur le site CanalU à ouvrir dans RealPlayer: http://media.cines.fr:80/ramgen/3517/real/canalu/science/178009/178009-0.rm) : ce ne sont pas des formes que l'on peut voir à l'œil nu ni au microscope optique.

Un schéma plus complet en vue d'une classe de 1èreS

caractères
cellules procaryotes
taille

100 nm de diamètre pour les plus petits mycoplasmes à 7 µm de diamètre pour certaines bactéries bleues (Oscillatoria); Escherichia coli, de taille moyenne mesure 1 à 1,5 µm de largeur sur 2 à 6 µm de longueur. La plus grande cellule procaryote connue a été découverte en 1999 par Heide Schulz et col. (Inst. Max Planck, Brème) et atteint 0,1 à 0,7 mm de diamètre (Thiomargarita namibiensis : la perle de soufre : Pour la Science, 260, juin 99, 26)

formes

très variées dans le détail mais deux formes simples dominent: les sphères ; et les bâtonnets plus ou moins allongés (filaments), incurvés ou en hélice. A cette forme générale il faut ajouter les prolongements comme les flagelles qui peuvent être très nombreux. Enfin les cellules peuvent rester attachées après leurs divisions et donner des chaînettes ou des longues files.

compartimentation*

habituellement un seul compartiment interne délimité par une membrane s'oppose à un compartiment externe comprenant la paroi; certaines cellules comme celles des bactéries bleues possèdent des sous-compartiments internes délimités par des invaginations de la membrane

contenu cytoplasmique

pas d'organites délimités par une membrane donc pas de vésicules donc pas de transport rapide de matière dans la cellule

matériel génétique

pas de noyau délimité par une enveloppe (procaryote signifie "sans noyau") et jamais de chromosomes lors de la division cellulaire

associations - écologie

les cellules procaryotes peuvent survivre isolées à l'état de spore mais elles sont habituellement en grand nombre dans un milieu car elles se multiplient très rapidement. Dans un milieu liquide elles se déplacent mais on tendance à former des amas (voile bactérien par exemple) et sur un milieu solide elles forment toujours des colonies

* cette notion est contestable pour les compartiments internes; elle repose sur l'idée d'une membrane qui limite structuralement alors qu'il est plus probable que les membranes internes soit des traces de dynamiques (comme la membrane externe est le bord (au sens topologique) de la cellule; la compartimentation existe mais elle est plus dynamique ou métabolique que structurale.

1.1.1.2 - Les unicellulaires eucaryotes restent de taille modeste (micro-organismes) mais peuvent former de colonies de grande taille (quelques dizaines de centimètres)

Un schéma simplifié de l'ultrastructure* d'un unicellulaire eucaryote

 

* l'ultrastructure est la structure visible au microscope électronique (MET); il est important de savoir que les structures mises en évidence ici sont dues à la coloration au tétroxyde d'osmium et sont vues sur un organisme mort (voir TP et par exemple le film CNRS sur le site CanalU à ouvrir dans RealPlayer: http://media.cines.fr:80/ramgen/3517/real/canalu/science/178009/178009-0.rm ): ce ne sont pas des formes que l'on peut voir à l'œil nu ni au microscope optique.

Un schéma plus complet en vue d'une classe de 1èreS

caractères
cellules eucaryotes
taille

Les micro-organismes eucaryotes sont des cellules de quelques micromètres à quelques dizaines de micromètres dans leur plus petite dimension. Mais certaines cellules peuvent avoir des prolongements de plusieurs dizaines de centimètres. Des cellules peuvent fusionner pour donner de grandes cellules contenant plusieurs noyaux (plasmodes).

formes

La variété des formes est nettement plus importante que pour les cellules procaryotes. On pourrait dire qu'il y a une "souplesse" beaucoup plus importante de la cellule dues à des structures du cytoplasme permettant le mouvement. Des prolongements en filaments ou en lamelles apparaissent. Une paroi existe souvent mais l'on a aussi des tests (sorte de coquilles externes) qui n'empêchent pas la sortie de prolongements par des pores.

compartimentation*

Un compartiment principal interne (délimité par une membrane) et un compartiment externe comprenant souvent une paroi ou un test. De nombreux sous-compartiments internes (délimités ou non par des membranes) permettant une division du travail du vivant (chaque compartiment ayant une ou des fonctions spécifiques)

contenu cytoplasmique

nombreux organites délimités par des membranes simples ou doubles (mitochondries, chloroplastes, vacuoles...); les transports de matières peuvent se faire rapidement par des vésicules dans la cellule

matériel génétique

noyau délimité par une double membrane ou enveloppe nucléaire (eucaryote signifie "avec un noyau vrai") et chromosomes apparaissant lors de la division cellulaire

associations

les cellules eucaryotes forment soit des organismes libres soit des colonies soit des organismes pluricellulaires en se regroupant en tissus et en organes qui se partagent le travail du vivant

* même remarque que précédemment; la compartimentation est plus dynamique (métabolique) que structurale; l'absence de membrane dans un espace cytoplasmique n'empêche absolument pas une réelle compartimentation. Il serait plus exact de dire que l'on ne connaît pas le rôle des membranes en tant que traces de dynamiques internes. On sait qu'elles sont le support de nombreuses protéines qui agissent à l'interface entre le compartiment supposé et son environnement.

1.1.2 - Les formes vivantes complexes de grande taille sont composées de cellules de type eucaryote: ce sont les pluricellulaires

Les cellules eucaryotes des pluricellulaires ne sont pas des organismes vivants mais des cellules vivantes qui font partie d'un tout, l'organisme vivant. Elles ne possèdent que partiellement les fonctions globales (nutrition, relation, reproduction). Ces cellules sont spécialisées ou différenciées.

1.1.3 Tous les êtres vivants sont composés de cellules et uniquement de cellules: c'est la théorie cellulaire

On doit à T. S. Schwann (1839), un zoologiste, le premier énoncé de la théorie cellulaire: « il existe un principe général pour la production de tous les corps organiques, et que ce principe est la formation de cellules, aussi bien que les conclusions qu'on peut tirer de cette proposition, peut être compris sous le terme de théorie cellulaire». Cet énoncé fait suite à une correspondance avec botaniste contemporain M. J. Schleiden que l'histoire a donc associé à Schwann. Avec nos mots du XXIème siècle cette théorie peut s'énoncer ainsi:

Tout être vivant est formé à partir de cellules et uniquement de cellules.

Cette théorie, rapidement adoptée est précisée par de nombreux biologistes dont le plus célèbre est Virchow connu pour son axiome: Omnis cellula e cellula  (1858) : toute cellule est issue d'une autre cellule. La branche de la biologie qui étudie les cellules est la cytologie.

Pour un organisme unicellulaire, c'est la cellule unique qui réalise tout le travail du vivant.
Pour un organisme pluricellulaire, il y a division du travail, les cellules se différencient (se spécialisent) et s'organisent en tissus puis en organes pour réaliser une même fonction, division du travail de l'organisme.

1.2 La cellule est une unité de fonctions globales
la vie de la cellule est un travail de relation, de nutrition et de reproduction

Si le terme de fonction en biologie est familier aux enseignants il ne l'est pas (plus) aux élèves. Une fonction en mathématiques c'est une relation (y = f(x)) représentée par une courbe dans un plan; l'ordonnée étant la valeur de la fonction (y) et l'abscisse (x), étant la variable. Parler de "fonction du vivant" (ou de "fonctionnement") pour désigner la respiration, la circulation ou une réaction chimique dans une cellule est une image mathématique utilisée depuis très longtemps (peut-être même d'abord utilisée en biologie avant son utilisation en mathématiques - voir René Thom, Analyse sémantique d'un mot polysémique : la fonction, , 1993, Séminaires de la Société de Biologie Théorique, année 1992-1993, Acta Biotheoretica, 42 ; 1993f5.pdf). Utiliser le terme fonction suppose que l'on puisse représenter graphiquement (sous forme d'une fonction mathématique) le phénomène que l'on étudie. Cela est parfois possible mais échoue toujours lorsque l'on s'intéresse aux caractéristiques mêmes du vivant - ce qui fait qu'un être vivant est vivant est non une machine-. On nomme ces caractéristiques des grandes fonctions ou des fonctions globales, c'est-à-dire des fonctions non locales (ou non localisables) car elles ne peuvent être situées dans tel ou tel organe, mais mettent en jeu d'innombrables parties agissant ensemble. Je propose de parler de travail. Toute partie de l'être vivant (molécule, cellule, organe...) participe à ce travail, c'est sa fonction participative. Cette fonction participative, biologique, conceptuelle, s'ajoute à une fonction propre, locale, qui peut être explorée chimiquement (expérimentalement).

La vie est un travail

Le travail de nutrition comprend l'ensemble des phénomènes de prise ou de rejet de matière et d'énergie vis-à-vis du milieu extérieur et qui permettent à l'organisme de se maintenir en vie. (alimentation, digestion, respiration, circulation,excrétion ...). Les autotrophes (du grec "auto" = "soi-même" et "trophé"= "nourriture")) se nourrissent seuls sans dépendre d'autres êtres vivants. Les hétérotrophes ou plutôt allotrophes* (du grec "hétéro" = "l'autre, en tant que différent" et du grec "allo"= "l'autre, en tant qu'un autre que moi") consomment d'autres organismes vivants ou morts qui sont les proies.

La vie se construit à partir de la matière qu'elle prend dans le milieu extérieur. L'être vivant renouvelle ses structures et rejette des déchets.
La vie coûte de l'énergie.
Certains êtres vivants se nourrissent aux dépens d'autres.

Le travail de reproduction correspond à la capacité des êtres vivants à se multiplier. La reproduction peut être asexuée (solitaire) ou sexuée (entre deux organismes de sexe opposé).

La vie colonise tous les milieux. Elle se propage sans cesse. La vie se donne.

Le travail de relation correspond aux communications entre l'organisme et son milieu (écosystème) ou entre les différentes cellules d'un organisme.

La vie est sociale. La vie est coordonnée. La vie est altruiste.

Le métabolisme (du grec métabolé = changement) désigne l'ensemble des mouvements du vivant. Le métabolisme c'est la dynamique de la vie.
Pour les biochimistes, qui étudient le vivant avec les outils et les concepts de la chimie, la vie est un ensemble de réactions chimiques. Le métabolisme désigne alors les synthèses ou les dégradations de molécules chimiques qui ont lieu dans une cellule. Le synthèses forment l'anabolisme, et les dégradations forment le catabolisme.
Pour un biologiste il est préférable de relier le métabolisme aux fonctions globales du vivant et dire qu'il existe un métabolisme de relation, un métabolisme de nutrition et un métabolisme de reproduction.
Remarque philosophique:
C'est le métabolisme qui donne sa forme au vivant. Ce qui revient à dire que les dynamiques (de nutrition, de reproduction et de relation) maintiennent la forme du vivant (ce sont les prégnances de René Thom que l'on peut assimiler aux fonctions globales du vivant). La matière (au sens d'Aristote) est un continu qui prend forme (ce qui conduit à une saillance dans le vocabulaire thomien) grâce aux dynamiques qui l'informent. Pour simplifier on pourrait dire que les dynamiques correspondent à peu près à l'énergie. L'interaction matière-énergie étant qualifiée d'information (informer = donner une forme). (Voir compléments sur la
page des 4 causes d'Aristote en SVT)

* allotrophie est parfois employé en écologie pour désigner un commensalisme.

L'activité cellulaire (le fonctionnement de la cellule) ce sont des mouvements (des échanges et des transformations):

- mouvements (échanges et transformation) de matière (pour se nourrir, pour croître...)
- mouvements (échanges et transformation) d'information
(pour connaître le milieu extérieur et pour communiquer avec d'autres cellules ou organismes)
- mouvements (échanges et transformation) d'énergie
(pour se maintenir en vie.)


3 informations et non une seule

la vie reste un mystère

L'information génétique, contenue dans l'ADN (Acide DésoxyriboNucléique), conserve la séquence des ARN (acides ribonucléiques) et l'ordre dans lequel la cellule doit assembler les aa qui composent les protéines.

L'information génétique est conservée, dupliquée, manipulée et exprimée par la cellule. Elle est aussi modifiée par l'environnement et par le cytoplasme.

L'information cytoplasmique contrôle l'ensemble des activités de la cellule (métabolisme, mouvement, ...) et conserve la mémoire cellulaire.

L'information cytoplasmique est la personnalité cellulaire.

L'information environnementale est en permanence reçue et envoyée par la cellule qui réagit à son environnement et communique avec lui.

L'information extérieure permet à la cellule de coordonner sa propre activité avec celle des cellules voisines.

 

1.3 Les êtres vivants sont classés en 5 royaumes* aux limites incertaines:
les procaryotes, les protistes, les mycètes, les plantes et les animaux

* Linné distinguant classiquement dans le regna tria naturae, les trois regnum animale, regnum vegetabile et regnum lapideum (les trois royaumes: des animaux, des végétaux et des pierres). Le terme latin regnum a perdu progressivement sa signification de royaume et a été malheureusement traduit par règne (voir http://www.necker.fr/sfbt/baillaud.html); il est incontestablement plus clair de parler de royaumes (kingdom en anglais et Reich en allemand) car cela permet notamment des changements de souveraineté dont nous laisserons l'initiative aux spécialistes.

royaumes*
exemples
travail de relation
travail de nutrition
travail de reproduction
Procaryotes
(Monères)

bactéries du yaourt (Streptococcus, Lactobacillus)

Une bactérie ne vit jamais seule (sauf à l'état de spore) mais forme une colonie dès qu'elle est en présence d'eau et de nourriture. Deux bactéries peuvent se conjuguer et échanger du matériel génétique. Les bactéries se déplacent souvent grâce à des flagelles. Une paroi les protège.

Les bactéries ont un métabolisme très peu élevé et souvent très original. Si de nombreuses bactéries sont allotrophes on en trouve aussi des autotrophes comme les bactéries bleues (Cyanophytes) qui sont chlorophylliennes. Certaines bactéries utilisent même des minéraux (comme le soufre) comme source d'énergie.

Les bactéries se divisent incessamment par scissiparité (une cellule mère s'allonge puis se sépare en deux).

Protistes
(unicellulaires eucaryotes)

Paramécie, levure de boulanger (Saccharomyces cerevisiae)

Les protistes vivent presque tous dans l'eau et se déplacent souvent par des flagelles ou des cils (comme la paramécie). Certains sont protégés par une paroi.

Certains protistes anciennement rattachés aux animaux se nourrissent de matière organique (allotrophe) comme la Paramécie (Protozoaire) qui capture des bactéries. D'autres utilisent le carbone de l'air, de l'eau et de l'énergie solaire pour synthétiser (autotrophie) leur propre matière organique (anciens végétaux ou Protophytes) comme l'Entéromorphe qui forme des colonies filamenteuses (les communes "algues vertes" de nos côtes).

Les cellules peuvent se diviser seules (mécanisme de la mitose): c'est la reproduction asexuée. Ou se reproduire à deux: c'est la reproduction sexuée : après s'être réunies (fécondation) elles se séparent lors du mécanisme de la méiose. Le bourgeonnement (par exemple de la levure) est un mode de reproduction asexuée.

Mycètes
(champignons)

Champignon de Paris, moisissure du pain

Les champignons vivent sous la forme de filaments (mycélium). Ils ne se déplacent pas. Ils ont une paroi. Ils se développent dans des milieux humides.

Ils consomment la matière organique en décomposition (saprophytes) ou capturent des proies vivantes (vers Nématodes): ils sont allotrophes.

La reproduction sexuée des champignons est très complexe, les spores germent et donnent des mycéliums qui se fécondent et donnent d'autres spores.

Plantes

algues rouges et brunes,
plantes sans fleurs (mousses, fougères...) et à fleurs

Les plantes sont composées de nombreuses cellules réunies en tissus. Leur paroi les protège et réunit les cellules entre elles. La plupart des plantes vivent en milieu aérien et certains arbres sont les plus grands êtres vivants.

Les plantes sont autotrophes et chlorophylliennes (la chlorophylle est le pigment des chloroplastes sensible à la lumière). Cependant, elles possèdent des cellules chlorophylliennes (des feuilles et des tiges...) et des cellules non chlorophylliennes (comme les cellules des racines qui n'ont pas de chlorophylle et consomment des sucres apportés par la sève).

Les plantes se reproduisent par reproduction sexuée (par les fleurs et les graines ou des organes équivalents). Mais leur reproduction asexuée est souvent facile: on peut multiplier de nombreuses plantes en les fragmentant (boutures).

Animaux

invertébrés et vertébrés (Poissons, Amphibiens, Reptiles, Oiseaux, Mammifères)

Les animaux sont aussi composés de nombreuses cellules regroupées en tissus. Les animaux vivent nombreux en milieu aquatique mais ils se déplacent souvent facilement et ont conquis tous les milieux terrestres. Leurs organes des sens sont très développés, et ils communiquent entre eux. Certains vivent en société.

Les animaux sont allotrophes: ils consomment tous des proies vivantes ou mortes. Certains se contentent de filtrer l'eau dans laquelle leurs proies vivent, d'autres ont des mécanismes actifs de capture qui sont de véritables méthodes de chasse. Certains sont charognards. En milieu terrestre de nombreux animaux se nourrissent des plantes comme les insectes.

Les animaux invertébrés sont souvent capables de reproduction asexuée mais cette faculté diminue fortement chez les vertébrés qui ne se reproduisent que par reproduction sexuée.

On peut ajouter, avec Gœffroy Saint Hilaire, un sixième royaume: le royaume de l'homme ou royaume hominien avec une seule espèce: Homo sapiens, animal, mammifère et primate social (du point de vue biologique) mais qui peut être aussi considéré comme le seul à avoir un esprit (mais celui-ci sort du domaine d'étude de la biologie).

2. Il existe deux grands types trophiques: l'autotrophie (se nourrir seul) et l'hétérotrophie (ou plutôt l'allotrophie - se nourrir des autres)

Cette notion est juste citée ici, comme élément qui sera repris dans le programme des classes ultérieures: elle ne fait pas l'objet d'une étude. Quand à l'affirmation du programme: «Les activités fondamentale des cellules telles que le métabolisme et la division sont sous le contrôle d'un programme génétique»; elle relève pour moi de la pétition de principe et je refuse de la colporter (certains manuels scolaires n'en touchent pas mot d'ailleurs (Belin) ou sinon sous forme d'exercice (Bordas, quoique la nouvelle édition en fasse un paragraphe du cours)).

Quelle nourriture un organisme consomme-t-il ? Peut-on modifier son régime alimentaire ? Quelle nourriture minimale doit-il consommer pour survivre ? .... Tant de questions et tellement de réponses différentes pour chaque organisme.

2.1 La nourriture des êtres vivants se compose de matière et d'énergie.

énergie

capacité de travail; force vitale; en physique, elle est exprimée en joules (J) et caractérise la capacité d'un système à modifier l'état d'autres systèmes en interaction avec lui

matière
minérale

qui contient des minéraux, composants des roches; s'oppose à organique.
Pour les chimistes la chimie minérale s'intéresse à tous les éléments chimiques autres de le carbone (C); on dit aussi la chimie inorganique.
L'eau et ses éléments minéraux dissous est une substance minérale. Mais l'eau dans la cellule n'a plus les propriétés des substances minérales pures. L'eau dans la cellule n'est jamais un solvant (voir page sur la cellule). Il faut donc préciser l'état de l'eau: minérale sous les trois états à l'extérieur de l'organisme, liquide dans la cellule (en très petite quantité), liquide dans les liquides sanguins ou lymphatiques, mais surtout eau interfaciale (plus proche de l'état solide que de l'état liquide): on pourrait parler d'eau intracellulaire mais le terme est vague. La biochimie manque d'outil pour désigner les états de la MATIÈRE VIVANTE.

organique

qui contient des composés du carbone ET que l'on trouve dans les organismes vivants; s'oppose à minéral; en biologie les substances organiques sont classés en glucides, lipides, protides et acides nucléiques: ce sont des CHONPS (composés de C (carbone), H (hydrogène), O (oxygène), N (azote), P (phosphore) et S (soufre)).
Pour les chimistes la chimie organique au sens large s'intéresse à tous les composés carbonés qu'ils soient ou non issus du vivant. Mais il existe aussi une acception qui rappelle une conception plus ancienne (Lémery 1690) d'une chimie des substances organiques du vivant, ou encore, chimie des substances organiques naturelles.

On ne peut pas dire que le CO2 est une substance minérale. Un autotrophe ne se nourrit pas de carbone minéral. Il ne se nourrit pas uniquement à partir de substances minérales (ni plus ni moins qu'un allotrophe). Il consomme du carbone oxydé et absorbe des substances minérales avec sa boisson.
vivante

En résumé:
la matière vivante est celle des êtres vivants. La distinction organique-minéral étant délicate à utiliser il est préférable d'étudier pour chaque élément et pour chaque substance l'état de la matière dans l'être vivant.
* l'eau (H2O): gazeuse, liquide, interfaciale (liée à de grosses molécules)
* des éléments minéraux, sous forme d'ions, le plus souvent liés à de grosses molécules
* des gaz: CO2, O2, le plus souvent sous forme ionisée (HCO3- et CO32- pour le CO2) ou liées à de grosses molécules transporteuses
* de petites molécules (sous-entendu carbonées): acides, alcools...
* de grosses molécules ou macromolécules (sous-entendu carbonées) qui sont des polymères (voir ci-dessous): glucides complexes (sucres), acides nucléiques (voir prochain chapitre ci-dessous), protéines
* les lipides (acides gras et graisses) sont classés à part car ce ne sont pas des polymères mais ils peuvent constituer de grosses structures (gouttelettes, plans ou membranes...).

Un polymère est une molécule composée de sous-unités identiques (ou monomères) reliées par des liaisons fortes (covalentes)

Des polymères... comme des colliers de perles (chaque perle est un monomère)

homopolymères:
les perles sont toutes identiques
(un seul type de monomères)
copolymères :
les perles sont de taille différente
(ici 2 types de monomères)
-O-O-O-O-O-O-O-O-O-O-O-
ou
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

deux types d'homopolymères sont possibles avec deux types de monomères

-O-O-o-O-o-o-o-o-O-O-o-O-o-O-O-o-o-o-

de très nombreux types de copolymères sont possibles avec deux types de monomères (cela dépend de la longueur du polymère)

Une nourriture est ce qui permet à l'organisme de se nourrir. Elle doit comprendre de la matière et de l'énergie.

2.2 Il existe deux grands types trophiques et 3 types accessoires

La matière peut provenir soit de l'air soit des autres organismes, sans oublier la boisson qui est nécessaire pour tous.
L'énergie peut être le soleil ou l'énergie chimique contenue dans les minéraux ou encore dans les composés organiques (pour des détails voir &2.4 de l'ancien cours d'immunologie de TS).

On regroupe les organismes par type trophique (du grec "trophein" = "se nourrir"). On désigne par là un type de travail de nutrition.

Un être vivant peut se nourrir seul, c'est-à-dire sans l'aide d'autres êtres vivants, il est alors à proprement parler autotrophe (au sens étymologique de "se nourrit seul").
Un être vivant peut se nourrir des autres de façon plus ou moins étroite, il est hétérotrophe au sens large ou, mieux, allotrophe (ceci est un néologisme formé à partir du grec "allo" = "les autres").

Au sens restreint l'autotrophie est la capacité à trouver sa matière carbonée dans le dioxyde de carbone de l'air. Au sens large l'autotrophie englobe aussi la capacité à utiliser l'énergie lumineuse du soleil comme source d'énergie (phototrophie).
Au sens restreint l'hétérotrophie est la capacité à utiliser la matière organique comme source de matière carbonée. Au sens large l'hétérotrophie englobe aussi la capacité à utiliser l'énergie chimique (chimiotrophie) de ses proies vivantes ou mortes ou d'hôtes parasités ou associés en symbiose.

(La colonne de droite n'est pas à mémoriser);

se nourrir seul

"autotrophie"
au sens large

se nourrir d'air et de soleil
(autotrophie
(au sens restreint au carbone) et phototrophie)

Plantes, nombreux Protistes, certaines bactéries (comme les bactéries bleues)

se nourrir d'air pour le carbone et de minéraux pour l'énergie
(autotrophie (au sens restreint au carbone) et chimiolithotrophie)

certaines bactéries

se nourrir des autres

hétérotrophie au sens large
ou
"allotrophie"

ne se nourrir que des autres
(hétérotrophie
(au sens restreint au carbone) et chimiotrophie)

Animaux, Mycètes, nombreux Protistes, nombreuses bactéries

se nourrir des autres pour sa matière carbonée mais de soleil pour l'énergie
(hétérotrophie (au sens restreint pour le carbone) et phototrophie)

certaines bactéries

se nourrir d'air pour le carbone mais trouver son énergie dans la matière d'autres organismes
(autotrophie (au sens restreint pour le carbone) et chimioorganotrophie

rares bactéries

Dans cette "classification" on peut peut-être mieux voir en quoi le royaume des bactéries innove du point de vue du métabolisme (colonne de droite). On aurait tendance à considérer ces pistes comme autant d'étapes évolutives aujourd'hui abandonnées, qui ne sont conservées que dans quelques groupes reliques.

royaume
autotrophie
hétérotrophie
Procaryotes
x
x
Protistes
x
x
Mycètes

x
Plantes
x

Animaux

x

Remarques (voir TP):
Les notions qui suivent NE SONT PAS AU PROGRAMME mais elles ont déjà été utilisées au collège; il ne s'agit ici que d'employer les mots sans approfondir les concepts;
La photosynthèse (synthèse de matière organique à la lumière) fait partie du métabolisme des autotrophes phototrophes comme les plantes et de nombreuses bactéries. La réception de lumière (énergie lumineuse) et sa conversion en énergie chimique se fait grâce à des pigments comme la chlorophylle (phase de phototrophie) et s'accompagne de rejet de dioxygène suite à la coupure des molécules d'eau (photolyse de l'eau). L'énergie chimique sert ensuite à la synthèse de matière organique à partir du CO2 qui est donc consommé, ce qui est le signe de l'autotrophie vis-à-vis du carbone.
La respiration fait partie du métabolisme de nombreux organismes aussi bien autotrophes que hétérotrophes, phototrophes ou chimiotrophes. C'est un échange gazeux entre le milieu extérieur et l'organisme. L'organisme consomme du dioxygène et rejette du dioxyde de carbone. Le dioxygène est utilisé, et le dioxyde de carbone est produit, dans les réactions de dégradation (catabolisme) de substances organiques, essentiellement pour produire de l'énergie chimique pour la cellule (chimiotrophie). La plupart des cellules eucaryotes respirent puisqu'elles dégradent de la matière organique, quel que soit leur type trophique. Ainsi, même les cellules chlorophylliennes, que l'on pourrait croire autotrophes réalisent aussi une chimiotrophie. Il faut donc réserver ces types trophiques aux organismes et non à une seule cellule d'un pluricellulaire.
Du point de vue du bilan, et en termes d'échanges gazeux, photosynthèse (rejet de dioxygène, absorption de dioxyde de carbone) et respiration (rejet de dioxyde de carbone, absorption de dioxygène) semblent antagonistes (avoir des échanges opposés), mais les gaz absorbés et produits n'ont ni la même origine, ni le même rôle. Ce bilan sera repris dans le
chapitre sur l'écosystème terrestre.

Respiration cellulaire
O2 -------> H2O
C6H12O6 --------> CO2
Photosynthèse
H2O -------> O2
CO2 --------> C6H12O6

C6H12O6 + 6 O2

(1)
------------------>
<------------------
(2)

6 CO2 + 6 H2O

(1) équivalent au bilan de la respiration et (2) équivalent au bilan de la photosynthèse (il faut ajouter la présence de lumière)

 

Un petit exercice d'histoire...

Jan Baptist Von Helmont (1577-1644), comme les chimistes de son époque, considérait que la terre n'est pas un élément car elle résulte de la transformation de l'eau. Il démontra son hypothèse en faisant pousser un jeune saule dans une caisse de bois contenant une quantité de terre bien déterminée. Après arrosage, durant cinq ans, avec de l'eau de pluie filtrée sur tamis, il observa que le poids de l'arbre avait augmenté de 74 kg, tandis que celui de la terre n'avait diminué que de 57 g. La terre n'ayant accusé aucune variation sensible de poids, c'est donc l'eau qui s'est changée en bois et en racines, c'est-à-dire en substances solides que l'on qualifiait de « terre ». (in EU)

Sais-tu quels sont les aliments essentiels de la plante, en plus de l'eau de "boisson", qui ont permis au saule d'atteindre 74 kg en ne consommant que 57 g de "terre".

Remarque (d'après Esquisse d'une sémiophysique, Thom, 1988, p 69-71):
la morphologie des organismes repose sans aucun doute sur le travail de nutrition.
* Pour les organismes de petite taille, unicellulaires procaryotes et eucaryotes, la forme globale est une boule (topologiquement), plus ou moins allongée, avec plus ou moins de prolongements et la nutrition demande soit un passage des nutriments ou déchets à travers les structures limitantes (paroi par exemple), soit une déformation de cette limite (phagocytose, exocytose...).
* Pour les organismes de plus grande taille (pluricellulaires) les allotrophes doivent mettre en jeu des dispositifs de capture des proies (tentacules, lacets, filets, pièces buccales...) qui vont de pair avec des organes locomoteurs et sensoriels de plus en plus sophistiqués; alors que les autotrophes s'identifient à leur milieu environnant en occupant l'espace, on croissant vers la lumière, ce qui fait que leur forme est ramifiante (leur croissance est dite indéfinie car elle ne semble pas avoir de limite nette dans l'espace). Les botanistes ont depuis longtemps modélisé la croissance des plantes avec des algorithmes basés sur les fractales.
* certaines associations symbiotiques renforcent ces idées en montrant comment deux types trophiques peuvent s'interpénétrer: les lichens, associations de mycétes et d'unicellulaires autotrophes conduisent à des formes végétales en lames plus ou moins ramifiées; ou encore les coraux, associations entre des animaux diblastiques allotrophes et des unicellulaires autotrophes conduisent à des "arborisations animales" qui les ont longtemps fait appeler zoophytes.

2.3 Il existe 4 relations trophiques chez les allotrophes

Chez les allotrophes les relations trophiques peuvent être de type consommation (un animal phytophage par exemple mais aussi une bactérie sur un cadavre ou encore un vautour sur une carcasse de mammifère), prédation (capture de proies: capture d'une bactérie par un unicellulaire par exemple; mais aussi d'un nématode (animal) par un mycète; ou encore d'une mouche par une plante carnivore comme une Drosera), parasitisme (un organisme parasite vit de façon obligatoire aux dépens d'un autre, appelé hôte; une tique sur un chien par exemple) ou encore symbiose (une association à bénéfices réciproques; des unicellulaires chlorophylliens avec des mycètes dans les lichens ou des unicellulaires chlorophylliens avec des coraux).

3. Le matériel génétique comprend de l'ADN, des ARN et des protéines

Ni les ARN, ni les protéines ne sont au programme (explicitement du moins) mais il est bien plus facile (et cohérent) de les traiter ici SIMPLEMENT (en tant que molécules polymériques) plutôt qu'en classe de 1ère. De plus il est impossible de parler d'information génétique et de gène sans parler de code génétique.

Le terme "matériel" désigne clairement la matière (mais on peut aussi y voir une information). Génétique est pris au sens étymologique de ce qui est transmis lors de la génération. C'est le sens d'héréditaire mais sans se laisser enfermer dans une génétique moléculaire basée sur un concept fourre-tout de gène. Une hérédité cytologique ou plus biologique pourrait-on dire. Matériel génétique veut donc dire "matériel dont la fonction principale est la transmission héréditaire".

3.1 Les acides nucléiques (ADN et ARN) sont de longs polymères de nucléotides

3.1.1 Les acides nucléiques sont composés de chaînes de nucléotides.

Les acides nucléiques sont des polymères (du grec poly = plusieurs et merein = partage) (voir ci-dessus) car il sont composés d'unités identiques (les monomères). Comme il peut y avoir plusieurs types de nucléotides on parle de copolymères.

Les nucléotides sont des molécules composées d'une base azotée (A= adénine, T=thymine, U=uracile, C=cytosine, G=guanine), d'un sucre (ribose ou désoxyribose) et d'un, deux ou trois groupement(s) phosphate(s). Les nucléotides ont de nombreux rôles dans le métabolisme (voir cours de 1ère et TS).

3.1.2 L'ADN est une longue molécule en hélice à deux brins

L'ADN (acide désoxyribonucléique) est formé de deux chaînes (brins) de nucléotides dessinant une double hélice dont le diamètre est de 2 nm.
Dans l'ADN le sucre est le désoxyribose (et l'on parle de désoxyribonucléotides). Les bases sont A, T, C ou G.
- Les nucléotides d'une chaîne sont associés entre eux par des liaisons covalentes (entre le groupement phosphate d'un nucléotide et le désoxyribose d'un autre nucléotide).
- Les deux chaînes sont associées par des liaisons faibles entre les bases (qui forment donc des paires A avec T (2 liaisons faibles) et C avec G (trois liaisons faibles). On dit que les bases sont appariées. La molécule d'ADN est fragile est les deux chaînes peuvent facilement se séparer (l'ADN est dit dénaturé) par chauffage modéré (<50°C) et se réassocier (renaturation) si la température redescend.

3.1.3.- Les ARN sont des chaînes à un seul brin

Les ARN (acides ribonucléiques) sont des chaînes (un seul brin) de nucléotides pouvant se replier et s'apparier partiellement.
Les nucléotides de l'ARN, contiennent du ribose (ce sont des ribonucléotides). Les bases sont A, U, C et G. Donc l'Uracile (U) remplace toujours la Thymine (T).

TD - ADN-ARN (les acides nucléiques); forme, structure des molécules; simualisation* 3D (attention applet Jmol de 540Ko à télécharger)
(* les superbes applications qui visualisent les molécules en 3D sont des simulations; pour souligner ce fait je parlerai de simualisation)

3.1.4 - Les protéines sont de longs polymères d'acides aminés

Il existe 20 acides aminés dans les protéines du vivant. Ce sont des molécules organiques donc composées de C, H, O, N et parfois S. Elles ont toutes deux groupes d'atomes que l'on appelle des radicaux et qui leur donnent leur nom: un radical acide (-COOH) et un radical amine (-NH2).
Les protéines font partie du groupe plus vaste des peptides. Le terme de peptide désigne toute chaîne d'aa (aa réunis par des liaisons covalentes). Les oligopeptides sont formés quelques aa (10...); les polypeptides sont formés de nombreux aa (10-100) mais lorsque leur poids moléculaire est supérieur à 10.000 on préfère parler de protéines. Les protéines sont souvent formées de l'assemblage de plusieurs molécules et contiennent des éléments non peptidiques. Cette distinction faite on utilisera en seconde le mot protéine comme équivalent de peptide.

3.1.5 - La séquence des molécules polymériques constitue une information linéaire

La suite linéaire (en ligne) des nucléotides d'une chaîne de l'ADN (l'autre étant déterminée par complémentarité des bases), ou de l'unique chaîne des ARN, forme une séquence propre à chaque molécule d'acide nucléique. Elle peut être représentée par la suite des bases (par exemple .....AACTAGGCTTAA....).

De même la suite linéaire des aa d'une protéine est appelée séquence ou structure primaire.

Les séquences constituent une information linéaire qui n'est pas sans rappeler l'information exprimée par la suite de lettres d'un mot. Mais ce n'est pas la seule information que peut donner une molécule qui se déploie dans l'espace avec une forme. Même si la forme est indubitablement liée à la séquence elle n'en est pas la résultante car la forme dépend aussi des conditions de milieu et de molécules additionnelles pouvant s'ajouter pour donner une structure complexe. Par exemple l'ADN s'associe avec des protéines pour donner un chromosome chez les eucaryotes et les protéines sont nombreuses à s'associer entre elles ou avec des ARN pour donner des complexes.

3.1.6 - La séquence de l'ADN peut être altérée par mutation mais est habituellement réparée

L'ADN est une molécule fragile et peut être modifiée par de nombreux mécanismes chimiques (méthylation...).

La séquence de l'ADN est considérée comme très stable au cours de la vie de la cellule.
Les biologistes moléculaires appellent mutation génique une altération de la séquence de l'ADN. Certaines mutations géniques peuvent être provoquées par des rayonnements (UV, RX) ou par des produits chimiques. Dans la nature la plupart des mutations géniques sont réparées par la cellule.

Remarque:
Les différences dans les séquences des acides nucléiques (ADN et ARN) permettent de classer les êtres vivants en 3 domaines: Bactéries, Archéobactéries et Eucaryotes

On appelle mutation chromosomique une altération du nombre ou de la forme ou de la taille des chromosomes.

3.2 L'ADN est associé à des protéines dans les chromosomes lors de la division cellulaire des eucaryotes

Un chromosome est étymologiquement une particule colorable (du grec chromos = la couleur et soma = le corps). Ces particules ont été observés et décrites en 1879 par Flemming lors de la division (mitose) de cellules animales. Depuis des chromosomes ont été observés lors de la division cellulaire des toutes le cellules eucaryotes. Les chromosomes sont composés d'ADN (acide désoxyribonucléique) et de protéines. On parle parfois abusivement de chromosome pour tous les filaments d'ADN de grande taille des cellules eucaryotes ou procaryotes. On ne parle pas de chromosome pour les plasmides ou pour l'ADN des mitochondries ou des chloroplastes. Effectivement les chromosomes se colorent à l'aide de colorants basiques (parce qu'ils sont composés de molécules acides). Mais si l'ADN peut se colorer, même sans être à l'état de chromosomes, pour que l'on puisse le voir au MO il est nécessaire qu'il soit condensé dans un chromosome.

L'ADN est très compacté dans un chromosome. Dans une cellule humaine il y a 46 chromosomes (regroupées en 23 paires de même forme et taille) soit environ 2 m d'ADN déroulé. Chaque chromosome humain ne dépasse pas quelques µm de longueur.

Avant chaque division cellulaire l'ADN est dupliqué (c'est la réplication de l'ADN), ce qui permet de répartir un même matériel génétique dans les deux cellules filles issues de la division cellulaire. Pour les procaryotes la boucle d'ADN est répliquée en deux boucles réparties dans les deux cellules filles. Pour les eucaryotes la réplication de l'ADN donne des chromosomes doubles (les deux parties identiques de chaque chromosome ou chromatides sont attachées au niveau d'un centromère). La cellule les scinde en deux puis répartit chaque chromatide dans une cellule fille (c'est la mitose). Elle divise ensuite son cytoplasme (c'est la cytodiérèse).


Duplication, compaction, association, séparation, décompaction de l'ADN dans une cellule humaine qui se divise en deux cellule filles.
Le chromosome comme structure TRANSITOIRE lors de la division cellulaire d'un eucaryote (formation des chromosomes par compaction de l'ADN, séparation des chromatides, disparition des chromosomes par décompaction de l'ADN)

Remarque:
Un petit calcul classique:
les chromosomes sont des pelotes d'ADN.... une comparaison avec de la laine

dans une cellule humaine
facteur de multiplication
ANALOGIE avec une cellule agrandie à la taille de la classe

volume de la cellule

(un cube de côté 10 µm)

103 µm3 = environ 103. 10-18 m3 = 10-15 m3
la longueur du côté du cube est multipliée par 0,5. 106
le volume du cube est multipliée par 1,25 1017....
53 m3 = 125 m3

volume de la classe

(un cube de 5 m de côté)

en gardant ce même FACTEUR DE MULTIPLICATION, on peut en déduire la longueur de la molécule d'ADN et son diamètre à l'échelle de cette classe

longueur total de l'ADN par cellule à répartir en 46 filaments (chromosomes)

2 m
0,5. 106
2. 0,5. 106 m = 1000 km

Un fil de 1000 km de long et 1 mm de diamètre pourrait être équivalent à l'ADN d'une cellule humaine réparti en 46 filaments.
Avant une division on peut considérer que les 46 filaments se dupliquent (46 doubles filaments) puis lors de la division se condensent (en 46 paires de pelotes accrochées 2 à 2).
Ces 46 paires de pelotes permettent ainsi de séparer les 46 filaments doubles lors de la division, ce qui serait "autrement coton" si les filaments étaient déroulés !!!!

diamètre de la molécule d'ADN

2 nm = 2.10-9 m
0,5. 106
2.10-9. 0,5. 106 m = 1 mm

Les chromosomes sont des structures (protéiques) de compaction et de séparation de plusieurs molécules immenses d'ADN. Sans chromosomes les 92 molécules d'ADN d'une cellule humaine en fin de réplication formeraient un fouillis inextricable....

Remarque:
il est probable que de nouveaux modèles de chromosome voient le jour avec non plus une molécule unique mais de petits ADN circulaires correspondant chacun à une sous-unité de lieu (dans le noyau) et de fonction (liée au métabolisme). Voir
remarque ci-dessous.
Encore plus attirant un modèle de chromosome comme structure stable de la catastrophe mitotique: l'œil du cyclone en quelque sorte; où les filaments ne sont plus que des artefacts d'une dynamique figée par le MET.

3.3 Certaines séquences d'ADN, les gènes moléculaires, servent de modèle pour la synthèse de molécules polymériques

IMPORTANT
Le terme de gène désigne, historiquement une particule héréditaire transmise, support des caractères que l'on qualifie de mendéliens (en hommage à Gregor Mendel).
Cette définition est claire et ne génère aucune confusion. Mais on lui a superposé une notion fonctionnelle découverte dans le cadre de la biologie moléculaire. On s'est efforcé, tant bien que mal, de les unifier à l'aide de la théorie de l'information génétique (voir cours de terminale S, spécialité SVT). Pour préparer les élèves et éviter les confusions, je propose de préciser dès la seconde (et aussi en 1ère) la notion à laquelle on se réfère:
* j'emploierai gène moléculaire si c'est notion de gène, unité fonctionnelle de la biologie moléculaire.
* j'emploierai gène héréditaire pour désigner la particule héréditaire, sens qui a déjà été vu en troisième et qui sera revu en terminale.

Cette ILLUSTRATION ne rend pas compte de la grande taille des segments d'ADN impliqués ni de celle des ARN (quelques centaines à quelques dizaines de milliers de nucléotides); de même, les protéines sont des molécules de plusieurs dizaines d'acides aminés (aa) et il existe de petits peptides qui sont synthétisés par d'autre voie que celle représentée ici (par les NRPS, La Recherche, dec 2003).

Un gène moléculaire est un segment d'ADN dont la fonction est d'être copié en ARN.
La copie d'un segment de l'un des brins de l'ADN en ARN s'appelle la transcription.
L'ensemble des gènes moléculaires forme le génome.
Certains ARN sont traduits en protéines.
Les gènes moléculaires qui sont copiés en ARN puis traduits (selon le dictionnaire du code génétique) en protéines forment le protéome. On parle des gènes moléculaires des protéines. On dit que la cellule exprime le gène moléculaire d'une protéine lorsque le gène est transcrit puis traduit en une protéine.

On notera que la fonction de l'ADN est passive. L'ADN est transcrit. C'est la cellule qui synthétise la molécule, à partir du gène moléculaire, on dit que « la cellule EXPRIME le gène moléculaire ». Le sens usuel d' «expressions» est «un mot ou une suite de mots présentant un sens qui dépasse le sens littéral». On désigne peut-être par là le fait que la fonction du gène moléculaire va au-delà de l'ARN et englobe aussi celle de l'ARN qui peut à son tour servir de modèle (au peptides). On peut aussi dire, utilise, fait fonctionner..., ce qui fait moins appel à un pouvoir imaginaire.... On a aussi pris l'habitude de dire qu'« un gène CODE pour une protéine». Mais il faut bien comprendre que si la présence d'une protéine nécessite un gène moléculaire, l'inverse n'est pas vrai. On peut aussi dire que tout l'ADN n'est pas "CODANT". Il serait préférable de dire qu'un gène moléculaire "est associé" à une molécule. En fait, au sens expliqué ici, le gène moléculaire n'a qu'une fonction: servir de modèle; toutes les autres fonctions dérivées sont imaginaires....car indirectes. Le gène moléculaire est un modèle matériel et non au sens propre une unité fonctionnelle (au sens d'une fonction globale car toute molécule a une fonction locale - voir plus haut).

La génétique est la science des gènes (moléculaires et héréditaires).
La génomique est la science des gènes moléculaires.
Le matériel génétique est l'ensemble des molécules qui participent de la fonction des gènes moléculaires. Il comprend l'ADN, les ARN et, d'une façon dérivée, les protéines.
L'information génétique STABLE est l'information contenue dans les gènes moléculaires.
Comme la seule fonction de l'ADN connue précisément est la transcription, l'information génétique est la l'information contenue dans l'ADN et copiée (transcrite) en ARN: c'est donc la séquence de l'ADN ou de l'ARN. Par extension on peut aussi dire que l'information génétique comprend la séquence des protéines traduites à partir des ARN.

L'information génétique est la séquence de l'ADN ou de l'ARN ou encore des protéines.
La seule information génétique STABLE est celle de l'ADN.

L'information génétique est une information linéaire.
C'est la séquence (suite des monomères) des molécules polymériques (ADN, ARN, protéines).

On peut modifier les gènes moléculaires de certains organismes, par transgénèse, pour leur faire produire des molécules qu'ils ne produiraient pas ordinairement. On peut ainsi ajouter de nouveaux gènes moléculaires ou remplacer des gènes moléculaires déficients. Mais il est évident que la cellule n'utilise pas toujours ces gènes moléculaires étrangers, surtout si l'on ajoute à un organisme un gène moléculaire qui vient d'un autre organisme très éloigné. La plupart du temps la cellule est incapable d'EXPRIMER un gène moléculaire étranger.
On peut aussi injecter dans une cellule des ARN qui parfois sont traduits. Mais comme leur durée d'utilisation est très limitée (voir 1ères S) la cellule n'est pas vraiment transformée.

Tout l'ADN n'a pas de fonction connue et n'est donc pas organisé en gènes moléculaires.
Pour l'homme, le protéome constitue 1,2% de l'ADN et moins de 10% de l'ADN a une fonction connue
(voir cours de 1ère S).

Une page d'analyse des expériences de F. Griffith (1928)
On peut en retirer d'une part la très grande qualité du travail de Griffith et l'excellence de sa publication; d'autre part l'exploitation plus controversée qui a été faite de certaines de ses hypothèses, et de l'importance grandissante de la biologie moléculaire dans les années qui suivirent sans aucun doute à relier à la prospérité de l'institut Rockfeller aux Etats-Unis.

3.4 Le matériel génétique est au centre des théories de l'hérédité

3.4.1 - Allèles, génotype et phénotype sont des notions héréditaires associées aux chromosomes (donc aux eucaryotes)

Les notions d'allèles , de génotype et de phénotype ne sont pas des notions de la biologie moléculaire mais des notion héréditaires ; les termes ont été utilisés pour la première fois semble-t-il en 1902 par Bateson - voir cours de Terminale S, spécialité SVT. Les allèles sont des traits de caractères reliés à un seul gène héréditaire .Un gène héréditaire est une particule héréditaire (unité mutable appartenant à un groupe de liaison ou chromosome). Un allèle c'est une portion de chromatide.

définition HISTORIQUE claire
gène héréditaire

Un gène héréditaire est une portion de chromosome associée à la transmission d'un caractère héréditaire (uniquement chez les eucaryotes)

allèle

Un allèle est la forme d'un gène héréditaire.

génotype

L'ensemble des formes d'un gène héréditaire constitue le génotype de ce gène héréditaire.

phénotype

Le phénotype d'un gène héréditaire c'est la forme visible de ce gène, c'est-à-dire les caractères visibles associés à la possession de ce gène héréditaire.

Pour cette partie je recommande chaudement l'étude de la transmission de caractères héréditaires à l'aide de la théorie chromosomique de l'hérédité, ce qui est accessible à un élève de seconde. Allèles dominants et récessifs, regroupement des caractères qui sont transmis ensemble et qui correspondent à un chromosome qui est ainsi assimilable au groupe de liaison des généticiens. Enfin, plus délicate mais accessible la notion de disposition linéaire des gènes sur le chromosome, ce qui nécessite la notion de recombinaison intrachromosomique dont la fréquence dépend de la distance génétique. Ceci n'implique absolument pas que l'on parle de crossing-over et de méiose. On laisserait alors la partie de biologie moléculaire pour la terminale afin d'y montrer les incompatibilités posées actuellement entre une théorie chromosomique aux applications très limitées et une biologie moléculaire en perte de vitesse.

Gène moléculaire et gène héréditaire NE SONT PAS DES NOTIONS SUPERPOSABLES


Les progrès de la biologie moléculaire ayant été fait sur des procaryotes il a été facile d'imaginer que l'ADN circulaire de la bactérie qui comporte des gènes moléculaires linéairement alignés était le reflet de l'alignement des gènes héréditaires sur le chromosome eucaryote. Mais c'est aller un peu vite. Il y a à entre 10 et 1.000 ordres de grandeur entre la taille d'un gène moléculaire et celle d'un gène héréditaire. C'est pourquoi il est important de laisser la place à des théories qui essayent de structurer le chromosome autrement qu'avec une seule gigantesque molécule où les gènes moléculaires seraient alignés.

Il y a clairement une incapacité de la biologie moléculaire à définir quand la variation dans la séquence d'ADN, par mutation par exemple, cesse d'autoriser à parler de variation d'un même gène moléculaire ou d'apparition d'un nouveau gène puisque la fonction de l'ADN est passive (l'ADN est transcrit).
Dans le cadre de la théorie chromosomique de l'hérédité, un allèle désigne un trait de caractère héréditaire. On exprime par le terme d'allèle la variations des traits de caractères reliés à un même gène héréditaire. On ne peut relier ce trait de caractère à une gène moléculaire qu'en supposant une liaison unique et causale entre l'ADN et le trait de caractère.

Ces notions d'allèle, de génotype et de phénotype ne sont pas valables pour les procaryotes mais uniquement pour les eucaryotes qui ont des chromosomes. Pour un organisme qui possède un nombre pair de chromosomes (on dit "diploïde") hérités pour moitié d'un organisme paternel et pour moitié d'un organisme maternel, les allèles sont les formes différentes de chaque portion de chromosome ou gène héréditaire portés par des chromosomes homologues. Les chromosomes homologues portant alors les mêmes gènes héréditaires aux mêmes emplacements (c'est toujours la théorie chromosomique de l'hérédité mais cela n'est ABSOLUMENT PAS UN RÉSULTAT DE LA BIOLOGIE MOLÉCULAIRE. On ne voit pas de gène moléculaire sur un chromosome. Les sondes fluorescentes (FISH) ne peuvent pas localiser des gènes moléculaires comme cela est parfois écrit dans les manuels scolaires. Ils se fixent uniquement sur des séquences répétitives d'ADN. On n'est pas au même niveau de compréhension du chromosome. Le gène héréditaire comprend des millions de paires de bases et est probablement relié à de très nombreuses segments d'ADN (circulaires ?) et donc de très nombreuses protéines et donc de très nombreux gènes moléculaires. Mais la liaison est loin d'être claire et il est tout à fait probable qu'il n'y ait pas de disposition linéaire des gènes au niveau d'un ADN déroulé identique à celle de l'ADN condensé chromosomique.

Le noyau contient les chromosomes déroulés
ou
l'ADN et les protéines nucléaires se condensent en chromosomes lors de la division cellulaire

On a utilisé des colorants fluorescents spécifiques de chacun des chromosomes chez une petite "biche" femelle d'Asie (le Muntjac) qui possède 6 chromosomes (les cellules sont des fibroblastes).
Le noyau de gauche est au repos et on distingue les territoires de chaque chromosome, bien séparés; il faut donc comprendre le matériel génétique comme une forme dans un espace propre et non seulement comme une molécule chimique.
Le passage de la forme déroulée à la forme filamenteuse (chromosome) peut s'expliquer par un modèle mathématique où les chromosomes sont les singularités associées à la catastrophe mitotique (voir René Thom).
(d'après la couverture de Chromosome Research, vol 6, n°3, avril 1998, modifiée et reproduite sans autorisation avec un résolution si faible qu'elle empêche toute utilisation autre que pédagogique...)

Des résultats complémentaires ont été obtenus sur des fibroblastes humains (ce sont des cellules conjonctives qui interviennent dans la réparation des tissus endommagés, la cohérence et la liaison des tissus entre eux)

Un article en anglais accessible sur le net librement (licence Creative Commons Attribution) est à l'adresse http://biology.plosjournals.org/archive/1545-7885/3/5/pdf/10.1371_journal.pbio.0030157-S.pdf.

en voici un extrait d'image (Fig. 1-D - réf: 10.1371/journal.pbio.0030157.g001) particulièrement accrocheur:


Le positionnement des 46 chromosomes (dans un état de décondensation croissant de la gauche vers la droite) d'un fibroblaste humain en reconstitution 3D simulant les résultats obtenus par microscopie (voir l'article pour des précisions)
J'aime beaucoup la légende ajoutée par La Recherche (brève du n°388, juillet-août 2005, 15):
Paysage nucléaire
, qui rappelle le paysage épigénétique de Waddington (voir page annexe).

Références de l'article: Three-Dimensional Maps of All Chromosomes in Human Male Fibroblast Nuclei and Prometaphase Rosettes
Andreas Bolzer, Gregor Kreth, Irina Solovei, Daniela Koehler, Kaan Saracoglu, Christine Fauth, Stefan Müller, Roland Eils, Christoph Cremer, Michael R. Speicher, Thomas Cremer
PLoS Biology Vol. 3, No. 5, e157 DOI: 10.1371/journal.pbio.0030157

S'il ne tenait qu'à moi je garderai la notion d'allèle pour la terminale mais le programme et les ouvrages scolaires ne cessent de l'employer depuis même le collège (voir le programme de seconde et les documents d'accompagnement du programme de troisième)!!!!

À chaque fois que vous lirez allèle (dans vos manuels scolaires, dans un article de journal, dans un exercice scolaire...) vous comprendrez que l'on veut souvent parler de la séquence d'un gène moléculaire. Cette définition est fausse. Vous auriez intérêt à garder celle donnée au collège de "portion de chromatide" qui est incomplète mais exacte car elle fait bien référence au chromosome des eucaryotes. Et utiliser le terme de génotype moléculaire à la place d' "allèle moléculaire", ce qui ne veut vraiment rien dire.

définition HISTORIQUE claire
sens analogique
sens analogique étendu
gène

Un gène héréditaire est une portion de chromosome associée à la transmission d'un caractère héréditaire (uniquement chez les eucaryotes)

Un gène moléculaire est un segment d'ADN transcrit en ARN et éventuellement en protéine (aussi bien chez les procaryotes que chez les eucaryotes)

allèle

Un allèle est la forme d'un gène héréditaire.

AUCUN sens analogique légitime
(ne pas employer "allèle" pour désigner une séquence d'un gène moléculaire)
génotype

L'ensemble des formes d'un gène héréditaire constitue le génotype d'un gène héréditaire.

Par ANALOGIE les séquences d'un gène moléculaire constituent le génotype de ce gène moléculaire.

Le génotype moléculaire d'une cellule désigne PAR EXTENSION toutes les séquences de tous ses gènes moléculaires.

phénotype

Le phénotype d'un gène héréditaire c'est la forme visible de ce gène, c'est-à-dire les caractères visibles associés à la possession de ce gène.

Le phénotype moléculaire d'un gène désigne PAR ANALOGIE la forme visible de ce gène moléculaire au niveau de la cellule, c'est-à-dire l'ensemble des produits (ARN et peptides) résultants de sa transcription et éventuellement de sa traduction.

PAR EXTENSION le phénotype moléculaire d'une cellule désigne l'ensemble de tous les produits de tous ses gènes moléculaires.

On notera que l'on ne peut pas parler du phénotype moléculaire ou du génotype moléculaire d'un ORGANISME pluricellulaire.
Ces notions sont expliquées dans une
page annexe pour les 1ère S.

 

3.4.2 Les mutations ne sont pas toujours associées à des modifications du matériel génétique

Ce paragraphe reprende et complète ce qui a été dit dans le paragraphe 3.1.6

Le sens courant de mutation ne comporte pas de référence implicite au hasard. C'est pourtant le cas maintenant en biologie.
Une mutation c'est un changement brusque mais stable (qui se perpétue au cours des générations), ce qui permet de la différencier d'une anomalie ou d'une malformation, non transmissibles héréditairement.
Le mot, d'origine juridique ou économique depuis le 13ème siècle, semble avoir été utilisé par des biologistes comme Buffon (1766, Histoire Naturelle des Quadrupèdes) ou Lamarck dans le sens de changement biologique avant d'être utilisé dans le sens de changement héréditaire par De Vries (1903) puis étendu aux changements chromosomiques par Morgan (vers 1910).
Petit à petit le biologiste s'est habitué à considérer qu'une mutation a une cause inconnue (vague) en rapport avec le matériel héréditaire. Il est évident que tout changement brusque ne trouve pas son origine dans le matériel génétique. Il faut donc bien utiliser les adjectifs géniques et chromosomiques qui précisent la pensée.

Une mutation biologique au niveau de l'organisme se définit différemment selon le règne auquel appartient cet organisme:
- pour un procaryote l'apparition d'un caractère inhabituel: une déficience dans la synthèse d'un enzyme, un changement brusque de la forme d'une colonie...est assez souvent mais pas toujours relié à un changement dans l'ADN et donc à une mutation génique.
- pour un eucaryote unicellulaire, on connaît des mutants métaboliques pour lesquels des mutations géniques ont été identifiées mais il serait bien déraisonnable de penser que le terme de mutation puisse rendre compte de la très grande variabilité ou des adaptations plus ou moins héréditaires (pensez à l'autotrophie des euglènes) de ces organismes. Tout changement adapatatif stable transmissible héréditairement ne doit pas être relié à l'ADN sans questionnement.
Une mutation peut aussi, dans un sens élargi, désigner une modification stable du matériel génétique qui peut donc toucher les chromosomes: modification du nombre de chromosomes ou perte ou ajout d'une portion de chromatide d'un chromosome. Ce sont les mutations chromosomiques. Parmi les plus connues ont peut citer la trisomie qui est l'ajout d'un chromosome supplémentaire , le plus souvent à la paire 21, ou encore les mutations observées par De Vries en 1901-1903 chez une petite plante appelée l'onagre (nom de genre Œnothera, nom d'espèce lamarckiana), qui lui servirent pour élaborer sa théorie héréditaire des mutations associées à des pangènes (les gènes héréditaires étaient ainsi nommés, voir cours de terminale spécialité) et qui sont dues probablement à des réarrangements chromosomiques (in EU article "mutations").
Enfin, il existe de nombreux changement brusques stables, transmissibles héréditairement, que l'on ne sait pas relier à un changement du matériel héréditaire. Ce sont les mutations au sens le plus large.

Plus j'essaie de préparer mon cours, moins le chapitre suivant du programme (Parenté et diversité des organismes) me paraît cohérent. Et pourtant la compréhension de l'embryologie est une clé pour celle des mécanismes de l'évolution. Mais la réduction des mécanismes embryonnaires au contrôle génétique (et principalement celui de la drosophile) est d'un telle partialité qu'il m'est impossible de l'enseigner de façon cohérente (voir une page détaillée ancienne, qui date de l'année 2000 : le travail du développement où des arguments pour une théorie plus biologique sont développés). Si l'on se contente des exemples et documents pris dans les manuels scolaires, les élèves vont en retirer des schémas simplistes de contrôle uniquement génétique qu'il me paraît dangereux de colporter. Et combien les données sur les plans de symétrie et d'organisation paraissent arriver comme un cheveu sur la soupe, alors qu'ils sont sans aucun doute un fondement de la classification. Ce chapitre tel que je vais le présenter est une seconde version, toujours provisoire.

4. Parenté et diversité des organismes

La parenté des organismes résulte de la reproduction. Elle découle directement de la théorie cellulaire élargie à l'organisme pluricellulaire: on ne connaît d'être vivant qu'issu d'un autre être vivant.
La diversité repose sur une théorie qui est celle de l'évolution: les êtres vivants se sont transformés au cours des temps géologiques.

4.1 - Les espèces regroupent des individus qui se ressemblent, vivent ensemble et dérivent les uns des autres

Cette définition est voisine de celle de Lamarck: «un ensemble» ou «une collection d'individus semblables ou presque semblables», «qui furent produits par d'autres individus pareils à eux» (La naissance du transformisme, Lamarck, entre Linné et Darwin, Goulven LAURENT, Collection inflexions, Vuibert/Adapt, 2001, p 19).

Vous devez connaître la définition de Mayr de 1989: « une espèce est une communauté reproductive de populations (reproductivement isolée d'autres communautés) qui occupe une niche particulière dans la nature » (Mayr, 1989, cité dans l'article "A propos de la notion d'espèce", Louis Allano et Alex Clamens, Biologie-Géologie (Bulletin de l'APBG), n°3-1996, 471-472 ).
Une niche écologique étant l'«ensemble des conditions dans lesquelles vit et se perpétue la population» (Hutchinson - 1957) .

4.2 - La reproduction est une multiplication des individus au sein d'une espèce

On peut décrire la reproduction en terme de matière et d'information (voir ci-dessus).
Se reproduire signifie produire un autre être vivant de son espèce.
L'espèce (du latin "specia" = "ce qui se voit") c'est la forme, non pas uniquement au sens géométrique (la forme dans l'espace) mais aussi au sens dynamique (ce qui fait qu'un être vivant présente cette forme changeante au cours de sa vie; pour l'homme par exemple, depuis l'embryon formé d'une seule cellule au vieillard, en passant par toutes les étapes de sa vie; pour une bactérie cette forme est plus simple mais change aussi au cours de sa brève vie du fait de sa croissance).
En fait on peut même parler de forme au sens philosophique d'Aristote du principe de vie de la matière (il divise l'être de toute corps matériel en matière et forme). On pourrait donc dire que l'organisme qui se reproduit donne vie à un nouvel être vivant composé de matière et de forme. La matière est en partie héritée (chromosomes, cytoplasme...) et en partie nouvelle (synthétisée selon le type trophique à partir de matière minérale ou organique venant du milieu extérieur...). La forme est elle aussi en partie héritée (forme génétique, ou information génétique, forme cytoplasmique ou information cytoplasmique et forme environnementale, ou information environnementale) et en partie nouvelle (déformation, transformation....tous ces mots désignant des processus pouvant modifier la forme à transmettre par hérédité).

Pourquoi a-t-on besoin de parler d'espèce ? Pourquoi ne parle-t-on pas de reproduction au seul niveau d'un organisme ?
Parce que cette fonction globale n'est pas toujours le propre d'un organisme mais est toujours celle de l'espèce. Non pas dans la capacité à se reproduire, qui est bien une fonction de l'individu, mais dans son utilisation. C'est le cas de nombreux unicellulaires (les amibes acrasiales par exemple) et même de bactéries (bactéries dites sociales) qui vivent en colonies et qui peuvent réaliser cette fonction non pas chacun séparément mais en la "déléguant" à quelques individus. On considère que c'est un premier pas vers la pluricellularité.
C'est donc une propriété de la société du moins dans sa globalité. Un individu peut ne pas se reproduire et dans ce cas sa vie s'arrête à sa mort. Mais c'est impossible pour une espèce car sinon cela signifie qu'il y a extinction. Une extinction signifie qu'aucun descendant ne perpétue l'espèce. On voit que la notion d'espèce, comme population interféconde qui se transmet la vie sous une forme particulière (species en latin c'est "ce qui se voit", c'est-à-dire la "forme visuelle" au sens le plus courant de "forme"), est indissolublement liée à la reproduction.
On arrive ainsi tout naturellement aux deux autres fonctions globales de relation et de nutrition qui sont aussi liées à l'espèce mais peut-être de façon moins évidente. Dans la définition de Mayr de l'espèce qui date de 1989 il est fait mention de la niche écologique. Le mot écologique dérivant du grec oïkos (habitat) on peut non seulement y voir l'espace, le lieu mais bien aussi les habitants et donc les fonctions de relations entre les êtres vivants sont très certainement comprises dans cette définition. De la même manière la nutrition comporte toujours un volet relationnel que cela soit pour la recherche de l'énergie lumineuse ou la capture des proies. On peut à mon avis avancer comme argument que la délégation de ces deux fonctions à des cellules spécialisées au cours de l'évolution, tout comme pour les fonctions de reproduction, est un indice de cette socialisation en cours chez les pluricellulaires.

4.2.1 Il existe deux types de reproduction: la reproduction en solitaire (asexuée) et à la reproduction entre deux individus de sexe opposé (sexuée) (partie provisoire en cours de rédaction)


La reproduction en solitaire ou asexuée
Les trois types d'information et de matière sont nécessaires à toute division. Pour stopper une division cellulaire on peut, soit modifier l'information ou la matière extracellulaire (si on extrait un zygote (œuf fécondé) de grenouille de sa gangue, il ne se divise plus), soit modifier l'information cytoplasmique (la colchicine, substance toxique extraite des racines des Colchiques (plante à fleurs violettes qui apparaissent dans les champs en automne), empêche la division des cellules eucaryotes), soit modifier l'information génétique (si l'on enlève le noyau d'une cellule eucaryote, elle ne peut plus se diviser).
La reproduction asexuée est le mode habituel de reproduction de très nombreux organismes (Procaryotes, Protistes...). Pour certains c'est même le seul mode de reproduction connu. Les Plantes (pensez au bouturage...) et les Animaux invertébrés, par exemple, se reproduisent facilement par reproduction asexuée. Un fragment d'un organisme peut ainsi par divisions, dans des conditions favorables, donner un individu complet. Dans le cas d'un pluricellulaire comme toutes les cellules ne sont pas identiques, pour se reproduire il faut non seulement se diviser mais aussi que certaines cellules se différencient (des cellules différentes se forment à partir de cellules identiques, c'est ce que l'on appelle la différenciation, qui sera vue en en 1ère S).

Une illustration des deux principales étapes
de la reproduction sexuée (méiose et fécondation)
;
les modalités en sont tellement différentes chez les différents organismes des 5 royaumes qu'il est difficile de faire un schéma global; celui-ci est bien imparfait. Il existe par exemple des organismes à la fois mâles et femelles (comme chez de nombreuses plantes à fleurs) mais la plupart du temps les individus s'échangent des gamètes mâles; ils ne pratiquent pas ainsi l'autofécondation (se féconder soi-même). Dans le schéma proposé on notera que la matière et l'information cytoplasmique viennent quasi exclusivement du gamète femelle alors que le matériel génétique et l'information génétique du zygote proviennent pour moitié de chaque cellule parentale. Enfin l'environnement est parfois maternel (œuf, gestation...), très rarement paternel. La plupart du temps les embryons se développent dans le milieu extérieur mais avec des protections particulières.

Remarque:
On trouve dans certains manuels scolaires une référence au soma et au germen. Voici quelques mots sur cette très ancienne théorie (le mot "soma" semble faire son apparition dans ce sens en 1902 d'après le Petit Robert).
Cette théorie stipule que les cellules germinales (sexuelles) seraient immortelles car elles se transmettent par reproduction, alors que les cellules somatiques (du grec soma: le corps) seraient mortelles. En fait, en culture, on sait actuellement maintenir en vie des cellules somatiques plus facilement que des cellules sexuelles. Le maintien en culture passe cependant par des possibilités de division et on observe toujours un vieillissement de la culture qui se solde par un arrêt des divisions, même pour les cellules cancéreuses qui, pourtant, se divisent très facilement spontanément.

Remarque: l'opposition soma-germen a peut-être un sens en embryologie mais cette distinction me paraît artificielle chez un adulte; il faut peut-être lier ces termes à l'association du psychologique (de l'esprit) et du somatique qui a donné le terme psychosomatique qui s'efforce de décrire l'union indissociable de l'esprit et du corps dans la nature humaine cartésienne.

4.2.3 Se reproduire nécessite toujours trois types de matière et d'information: environnementales, cytoplasmiques et génétiques

Mais expérimentalement, afin de comprendre la part de chacun, on peut s'efforcer de dissocier les éléments intervenant dans la reproduction. On sait ainsi faire des transferts de matériel génétique ou orienter l'information génétique ou encore modifier le développement en contrôlant l'environnement. Ne jamais oublier que provoquer la divisions de cellules in vitro n'est pas reproduire un organisme. La reproduction est un travail qui englobe tout l'organisme et les manipulations in vitro ne sont que des moyens partiels d'en reproduire quelques aspects.

Pour essayer de comparer l'importance de ces trois types d'information (TOUTES TROIS NÉCESSAIRES CEPENDANT), voici quelques observations et expériences:
* (Belin p 207) transplantation nucléaire d'un noyau d'une cellule de glande mammaire de brebis adulte dans un ovocyte énucléé (cellule sexuelle femelle mûre) de brebis: certains techniciens affirment avoir obtenu un embryon (in vitro) puis une brebis (par gestation dans un utérus de brebis): Dolly (1996). Mais on a un très fort taux d'échec et de nombreux animaux obtenus ainsi sont anormaux. L'information extracellulaire est fournie par divers procédés chimiques lors de la fécondation in vitro puis par l'utérus pendant la gestation. L'information cytoplasmique est celle de la brebis donneuse d'ovocyte. L'information génétique est celle de la brebis donneuse du noyau de cellule de glande mammaire. La brebis obtenue possède de nombreux caractères extérieurs (couleur du pelage...) voisins de ceux de la mère donneuse du noyau. Cependant, tous les caractères qui font qu'une brebis est une brebis et non... une chienne ou une souris, peuvent aussi être fournis par l'un des trois types d'information. Il est important de souligner que tous les essais de transplantation d'un noyau d'une espèce dans un cytoplasme d'une autre espèce (du moins pour des organismes pluricellulaires avec des cellules différenciées) ont été des échecs.(voir page sur le développement, 1.3 Expériences sur les ovocytes, l'article de Axel Kahn - Clonage humain : un non événement? Pour la Science, janvier 2002, 28-31 (où, malheureusement, il y a des amalgames entre les termes d'ovule et d'ovocyte et aussi entre les différents types d'information de la cellule) et une petite mise au point sur le vocabulaire des manipulations cellulaires (en cours de rédaction))
* (Belin p 210) Si l'on fragmente une cellule eucaryote géante d'Acetabularia, seul le fragment contenant le noyau et donc l'information génétique est capable de survivre et même de régénérer une cellule entière. Cela montre la nécessite la présence des 3 types d'information et aussi de la possibilité de séparer l'information cytoplasmique en sous-unités autosuffisantes.
Remarques: La présentation de ces expériences (dans le Belin et dans le Nathan) est falsifiée:
*
l'algue Acetabularia n'est pas un simple unicellulaire mais un cœnocyte, c'est-à-dire un organisme possédant plusieurs noyaux pour un seul territoire cytoplasmique (en fait l'acétabulaire n'est cœnocytique que lors de sa reproduction mais elle est par contre siphonnée c'est-à-dire que l'on peut déterminer des territoires cytoplasmiques non cloisonnés qui peuvent être considérés comme autant ce cellules anucléées avant la phase de reproduction...). Le genre Acetabularia fait partie des Dasycladales, regroupées dans les Chlorophycées cœnocytiques (thalles siphonné à plastes chlorophylliens): leur thalle, uninucléé à l'état végétatif, est constitué par un axe dressé (dans un gel calcifié) portant des ramifications verticillées. Chez les Acetabularia , où l'axe dressé peut atteindre 4 à 6 cm de haut, les rameaux verticillés sont très minces (et caduques) et plusieurs fois ramifiés; le noyau unique et très volumineux est localisé à la base de l'axe. Lors de la fructification, il se forme au sommet de l'axe un nouveau verticille de rameaux qui constituent, par coalescence latérale, les secteurs rayonnant d'un disque en forme de parasol ou de champignon. Le noyau unique se fragmente alors en multiples petits noyaux qui migrent dans les rayons du disque; ils deviendront les noyaux des cystes; ceux-ci, entourés d'une paroi cellulaire épaisse pourvue d'une fente circulaire délimitant un opercule, sont libérés par destruction de la plante mère; après un temps de repos plus ou moins long, de nombreux petits gamètes biflagellés s'en échappent et produiront, par copulation, des zygotes. (E.U. article "Chlorophytes")
*
Chez Acetabularia il y régénération de l'algue complète avec chapeau à partir d'un fragment de pédicelle anucléé. Cependant le cytoplasme capable de cette régénération doit contenir des ARN spécifiques et donc de l'information génétique.
(L'expérience 3 du Belin p 210 n'indique que le rôle du noyau dans la reproduction (formation d'un nouveau verticille en forme de chapeau après que le chapeau végétatif soit tombé) et non dans la régénération d'un chapeau végétatif).
Chez l'algue Acetabularia mediterranea , les fragments anucléés constitués d'un fragment du pédicelle non seulement survivent jusqu'à deux mois, mais régénèrent des parties manquantes telles que le «chapeau». En pratiquant des greffes interspécifiques entre deux espèces morphologiquement différentes (A. mediterranea  et A. crenulata ), Hämmerling a cependant démontré que les substances morphogénétiques proviennent obligatoirement du noyau et diffusent dans le cytoplasme, où elles persistent et déterminent les caractères morphologiques des segments anucléés, pendant quelque temps seulement. On sait aujourd'hui que ces substances «morphogènes» ne sont autres que les ARN synthétisés dans le noyau et transmis, associés à des protéines, au cytoplasme.
L'utilisation moderne des techniques de greffe nucléaire, mises au point dès 1939 par Comandon et de Fontbrune, a conduit à préciser la nature des échanges nucléo-cytoplasmiques. On a ainsi démontré, sur des Amibes, que le noyau transmet des ARN au cytoplasme, tandis que ce dernier synthétise et transmet des protéines au noyau (Goldstein et coll.). Les échanges se font donc dans les deux sens et, sur les Acétabulaires,
Hämmerling a montré que le cytoplasme contrôle le comportement du noyau tout autant que ce dernier contrôle l'activité du cytoplasme (E.U. article "noyau cellulaire").
* Chez Acetabularia, on avait noté que près de 50% des plastes ne possédaient pas d'ADN. Cette particularité est maintenant expliquée par une hérédité plastidiale monoparentale, résultant d'une incompatibilité entre le génome nucléaire du zygote et celui de l'une des lignées plastidiales. Cette incompatibilité entraînant la dégénérescence du nucléooïde des plastes issus de l'un des gamètes (Biologie végétale, t. 1, D. Robert et J.C. Roland, Doin, 1989, p 180).

4.3 Du zygote à l'animal, le travail du développement

Le deuxième exemple du programme concerne le travail de reproduction et d'une façon plus générale encore le travail de développement chez les animaux: c'est-à-dire le passage de la cellule œuf fécondée (le zygote) à l'organisme adulte.
Nous choisirons un exemple dont nous essaierons de suivre le développement en classe: l'hermelle, un vers marin de nos côtes bretonnes.

TP 9 - Fécondation et premières étapes du développement embryonnaire chez l'hermelle

4.3.1 - Le travail du développement est fondamentalement autonome


Une vision très simpliste du développement d'une animal après la fécondation.
On notera que la multiplicité des informations extracellulaires n'a pu être représenté dans le nouvel organisme. Par contre la permanence d'une information génétique identique dans chaque cellule est un point important: cette information n'étant pas bien sûr exprimée de la même façon dans chacune des cellules.

Deux théories scientifiques du développement...

Le développement embryonnaire ou ontogenèse (du grec ontos, l'être et genesis la naissance) semble obéir à une croissance orientée qui semble résulter elle-même d'interactions permanentes entre les différentes populations cellulaires qui s'engagent dans un processus de progression autonome ou différenciation autonome.
La première étape étant l'activation de l'œuf (ou plutôt de l'ovocyte, cellule sexuelle femelle, par la fécondation (fusion avec le spermatozoïde) ou même sans spermatozoïde, ce qui n'est pas un cas si rare chez les animaux : le mécanisme étant nommé la parthénogenèse).
Un individu est un ensemble composé de populations cellulaires. A chaque instant, ce qui détermine les caractères d'une population cellulaire, sont les interactions qu'ont les cellules de cette population entre elles et avec les populations avoisinantes. Une cellule appartenant à un tissu donné, présente telle ou telle activité par ce qu'elle est issue d'une division qui résulte de toutes une série d'événements et d'interactions qui ont déterminé, à un moment précis, son engagement dans tel ou tel processus : le type de travail d'une cellule ou d'une population dépend de son histoire embryonnaire. (on remarquera que, dans cette théorie, les informations essentielles sont les informations extracellulaires et les informations cytoplasmiques, alors que l'information génétique n'intervient que comme une information manipulée, exprimée par la cellule en vue de réaliser tel ou tel travail qui dépend de son histoire.
Cette théorie repose sur une conception globale du vivant qui a de loin ma préférence. Elle a été élaborée dans le détail par Rosine Chandebois, professeur d'embryologie à l'Université de Provence (voir bibliographie, et la page sur le développement).

Le développement résulte de la mise en route progressive et coordonnée des différents gènes de chaque cellule (libération progressive de l'information génétique qui contiendrait le plan complet et déterminé de l'animal en construction). Il existerait un programme génétique qui résulterait de l'agencement des gènes et des interactions déterminées et fixées à l'avance entre les différents gènes, qui devraient être activés à tel ou tel moment du développement. Certains gènes appelés gènes "architectes" ou gènes homéotiques coderaient par des organes entiers ou des "déterminants" de ces organes.
Cette théorie semble avoir été émise pour la première fois par un illustre physicien : Erwin Schrödinger (1887-1961) qui dans son livre "Qu'est-ce que la vie ?", publié en 1944, parle déjà de programme génétique (voir une histoire de la génétique). Elle a été développée par les biologistes moléculaires et a surtout conduit à des travaux sur la drosophile, petite mouche du vinaigre. Elle semble actuellement dans une impasse (on a pas trouvé dans le génome le début d'une piste qui puisse nous faire penser à un programme et bien évidemment elle soumet toute information à l'information génétique, ce qui est assez réducteur comme vision du vivant) malgré le fait qu'elle soit enseignée notamment dans l'enseignement secondaire, alors qu'elle est en cours d'abandon par de nombreux chercheurs.

4.3.2 - La part respective des informations extracellulaires, cytoplasmiques et génétiques n'est pas la même à toutes les étapes du développement

Quelques expériences du manuel Belin à interpréter:
* n°4 p 251: que provoque une irradiation du zygote avec des U.V. ? (pour une discussion voir page sur la lumière du site associé): ici un arrêt des mouvements cytoplasmiques nécessaires à la mise en place de la symétrie embryonnaire à partir de la mémoire ovocytaire. Il s'agit ici clairement d'une information cytoplasmique.
* n°2 p 252: la séparation de 2 massifs embryonnaires au stade 4 cellules ne permet de reconstituer un embryon complet chez le Xénope que si le massif contient au moins une moitié du croissant gris. Il s'agit encore clairement de l'information cytoplasmique liée à la mémoire ovocytaire.
* n°2,3,4 p 256 ; 5 p 257; 1,2 et 3 p 260-261 : des mutations homéotiques montrent clairement que l'information génétique, manipulée par les cellules est une composante importante du développement.
La racine latine homœo orthographiée homéo en français viendrait du grec homolos = semblable et n'est donc pas différente de la racine homo. Les homéogènes ou gènes homéotiques ont été définis chez la drosophile par les travaux de Edward Lewis à partir de 1948 (Edward B. Lewis, Christiane Nusslein-Volhard et Eric F. Wieschaus ont ainsi reçu le prix Nobel de physiologie et de médecine en 1995 pour leurs travaux concernant le contrôle génétique du développement embryonnaire). Ces gènes "architectes" - comme les a nommé rapidement le grand public - avaient été postulés car on observait une modification importante et reproductible du plan d'organisation de la mouche adulte (l'homéose ou homéosis désignant le changement d'une partie du corps en une autre) à la suite d'une mutation. Des homéoses ont été décrites bien avant la connaissance des gènes : on cite notamment William Bateson, qui , en 1894, en étudiant les variations intraspécifiques chez un coléoptère, observa notamment l'apparition de pattes à la place des antennes. Il fit des observations similaires chez les végétaux, où les étamines pouvaient par exemple être remplacées par des pétales. Il n'y a pas de raison, sauf idéologique, de penser que toutes les homéoses sont d'origine génétique.
Les termes "gènes du développement " désignent aussi des groupes de gènes isolés d'abord chez la drosophile puis chez des vertébrés et dont certains possèdent des séquences communes avec certains homéogènes (voir le travail du développement). Plus on étudie ces gènes plus il devient apparent qu'ils sont très répandus chez de nombreux organismes, qu'ils présentent plusieurs fonctions différentes et qu'ils ne contrôlent pas une partie spécifique de l'organisme mais peuvent être activés dans des parties différentes et à différents moments du développement.
* des expériences de greffes (déplacement de parties embryonnaires) chez les amphibiens montrent que, selon les étapes du développement et selon les tissus déplacés, il peut y avoir compensation (les tissus greffés perdent leur spécificité et s'intègrent aux tissus en place) ou formation d'un organe ou tissu surnuméraire: dans ces expériences, la composante extracellulaire de l'information est primordiale.
* si l'on place une blastula d'amphibien dans un milieu salé, la gastrulation se fait vers l'extérieur (exogastrulation) et non vers l'intérieur, ce qui est aussi une indication d'une information extracellulaire déterminante pour la cohésion et les déplacements relatifs des cellules.

4.4 - La théorie de l'évolution affirme que les espèces se sont transformées au cours des temps géologiques

4.4.1 Des théories évolutives

L'évolution ou transformisme s'oppose au fixisme selon lequel les espèces ne se transforment pas ni ne se sont transformées. Comme l'évolution a des arguments paléontologiques très solides on peut l'affirmer scientifiquement comme théorie au passé: les espèces se sont transformées. Mais pour en faire une théorie actuelle (les espèces se transforment actuellement) c'est un autre problème que nous réservons pour la classe de terminale. Il vous suffit de savoir qu'il y a plusieurs manières de voir l'évolution et surtout les mécanismes qui nous semblent importants selon que l'on est paléontologue, anthropologue, botaniste, biologiste cellulaire ou... informaticien. Les théories de l'évolution soutenues par les uns et les autres ne se retrouvent guère que sur l'idée de base d'une évolution au passé.

4.4.2 Des classifications phylogénétiques

Nous avons maintenant tous les éléments pour comprendre les principes de la classification des êtres vivants. Classer nécessite de comparer. A la profonde unité structurale et fonctionnelle vue au niveau cellulaire et au niveau de l'information génétique dans les chapitres précédents, on va substituer une recherche des fondements de la diversité, notamment au cours du développement des pluricellulaires.
Cette classification doit pouvoir rendre compte de l'évolution des espèces au cours des temps géologiques. Les espèces dérivant probablement les unes des autres (la phylogénie, mot créé dans le sens actuel par Haeckel, vient du latin phylum= la lignée, ou du grec phulon = la race; et génie, genèse = la génération ou de genus = le genre), les mécanismes évolutifs doivent s'appuyer sur des facteurs de diversité à partir de points communs à l'ensemble du vivant.

facteurs d'unité
facteurs de diversité

la cellule avec tous ses composants et organites, y compris son information génétique, universellement composée d'ADN

cellule procaryote ou eucaryote

une seule cellule (unicellulaire)

plusieurs cellules différenciées (pluricellulaire) se répartissant le travail du vivant (division du travail)

des cellules presque identiques issues d'une cellule mère et formant une colonie (du point de vue de l'information génétique, on parle de clone lorsqu'on a une population de cellules qui ont la même information génétique)

des cellules diversifiées (spécialisées) en populations (tissus) qui restent cependant unies et coordonnées (organes) pour former un organisme

des organismes différents formant une société

des gènes en nombre fini codant pour des molécules particulières, des gènes très voisins se retrouvent dans des groupes très différents

des allèles variés correspondant à des versions différentes de ces gènes

un même gène, dans deux cellules différentes, ne conduit pas forcément aux mêmes produits: l'expression de l'information génétique dépend de l'environnement cytoplasmique et extracellulaire

des mutations peuvent affecter les gènes et être parfois conservées

chaque organisme maternel produit des cellules sexuelles (ovocytes) qui gardent et transmettent la mémoire des caractéristiques du groupe (mémoire ovocytaire)

l'information génétique des cellules sexuelles maternelles ou paternelles (germinales) est différente de celle des cellules non sexuelles (somatiques)

les conditions de développement sont toujours les mêmes au sein d'une espèce (information extracellulaire)

en modifiant les conditions de développement on peut modifier le développement embryonnaire de façon grossière (embryon à deux têtes ou autres monstruosités) mais aussi beaucoup plus fine avec des produits injectés dans l'embryon ou en réalisant des greffes

le nombre de types cellulaires formant des tissus (histologie) est réduit (par exemple les systèmes nerveux des animaux sont composés de quelques types cellulaires très semblables dans les différents groupes)

l'arrangement dans l'espace, les symétries, la forme des organes, la répartition des types cellulaires (anatomie) permet la réalisation d'une grande variété de formes organiques

 

Un exemple: une classification des animaux
(les noms en italiques correspondent à des embranchements, les points de suspension indiquent qu'il y a d'autres groupes non cités):

diblastiques:
animaux possédant deux feuillets embryonnaires (le feuillet externe donne une couche de cellules orientées vers le travail de relation et le feuillet interne possède des cellules plutôt orientées vers le travail de nutrition et de reproduction) - pas de symétrie - tous marins

Spongiaires (éponges),
Cnidaires (coraux et autres organismes possédant des phases méduses sexuées et des phases polypes, asexués),
Cténaires

triblastiques:
animaux possédant trois feuillets embryonnaires (le feuillet externe est surtout composé de cellules qui s'orienteront vers le travail de relation, le feuillet interne vers le travail de nutrition et le feuillet intermédiaire vers le travail de reproduction et de relation) - la plupart du temps symétrie bilatérale pouvant être altérée dans les phases terminales de l'embryogenèse

acœlomates:
pas de cœlome, c'est à dire une cavité qui creuse le feuillet intermédiaire de l'embryon

Plathelminthes (vers plats)...

pseudocœlomates:
le feuillet interne se creuse secondairement d'une cavité après le développement embryonnaire

Rotifères,
Némathelminthes (vers ronds)..

cœlomates:
le feuillet interne est creusé chez l'embryon d'une ou de plusieurs cavités

prostomiens:
l'orifice de la blastula ou blastopore donne la bouche de l'embryon

Annélides (vers annelés),
Mollusques (à corps mou dont les Gastéropodes, les Lamellibranches et les Céphalopodes),
Arthropodes (à "pattes" articulées dont les crustacés, les insectes...)...

deutérostomiens:
l'orifice de la blastula donne l'anus de l'embryon

Echinodermes (dont les oursins et les étoiles de mer à symétrie pentaradiée),
Tuniciers,
Vertébrés...

N.B. dans cette classification, toujours en usage, les critères principaux sont d'origine embryonnaire. Ce sont eux qui déterminent les types cellulaires et les symétries. La phylogénie est sous-jacente si l'on prend en compte la complexification et la diversification des tissus entre la première ligne et la dernière ligne du tableau.
Une remarque pédagogique: à mon avis une classification utilisable est une classification mémorisable.


Annexes:
L'information est parfois un concept flou en biologie et on pourrait souvent l'abandonner au profit de la forme et des fonctions (partie plus particulièrement à l'attention des collègues)

Comme le mot information est souvent flou (voir annexe) je vous propose ici quelques expressions de remplacement, évidemment plus complexes car faisant moins appel à l'imaginaire:
Notion floue
notion précise
théorie de l'information génétique
(celle de vos livres scolaires)
Comme l'information génétique est passée du côté obscur de la ... causalité, voici des affirmations non contestables par un biologiste moléculaire (me semble-t-il) laissant le champ libre à d'autres manières de voir

Un gène est une unité d'information génétique.

Un gène moléculaire est un segment* de l'ADN dont la séquence de nucléotides est associée à d'autres molécules polymériques.
Les gènes peuvent correspondre à des séquences de l'ARN et aussi correspondre, par l'intermédiaire des ARNm et par un code, le code génétique**, à la séquence des peptides, polymères d'aa.

L'information génétique de la cellule est contenue dans son ADN.

L'information génétique est une information linéaire pour des molécules polymériques: elle est contenue dans l'ADN et certains ARN. Une cellule utilise son information génétique pour synthétiser ses ARN et ses protéines. Tous les gènes ne sont pas utilisés en même temps par la cellule. Certains gènes, chez des cellules âgées de pluricellulaires, semblent être définitivement hors d'usage.
L'ensemble des gènes d'une cellule forme son génome. Tout l'ADN n'a pas une fonction de type gène. Certains gènes se chevauchent. Certains ARN courts peuvent servir de modèle lors de la synthèse de séquences d'ADN qui s'intègrent à l'ADN du noyau. La matériel génétique (héréditaire) n'est pas limité à l'ADN mais comprend aussi des ARN et des protéines. Les chromosomes n'ont pas fini de livrer leurs secrets.

Deux cellules d'un clone ont la même information génétique

Deux cellules d'un clone ont seulement en commun la même séquence d'ADN (du moins au départ). Elles sont construites artificiellement par des transferts d'ADN.
Mais comme on utilise la plupart du temps ce terme pour désigner des cellules issues de divisions binaires d'une cellule mère, ces cellules ont en commun bien plus que la séquence de leur ADN. Leurs cytoplasmes (avec tous leurs organites si ce sont des cellules eucaryotes) sont aussi hérités des divisions successives (et des synthèses-formation successives) d'un unique cytoplasme d'une cellule mère qui a donné naissance à toutes les cellules du clone. Ce sont des cellules "jumelles vraies"; pour les bactéries on parle de colonie (voir manipulations cellulaires)

* segment fait référence à une molécule "linéaire" et donc à une portion de droite.
** le code génétique est précisément et uniquement la correspondance entre des groupes de trois bases de l'ARNm (codon) et un des 20 acides aminés composant les protéines portés par des ARN particuliers dits de transfert (ARNt) présentant des triplets de bases complémentaires (anticodon). C'est donc une correspondance entre des triplets de l'ARN et des aa. Il ne faut pas employer ce terme à la place d'information génétique.

Remarques:
* Les fonctions de l'ADN
puisque le gène est une unité de fonction (modèle), à quoi peuvent bien servir les autres séquences de l'ADN ? Ou plutôt l'ADN n'a-t-il pas d'autres fonctions ?
On s'est focalisé sur la séquence des gènes puisque l'on cherchait une information génétique linéaire. Il est temps d'ouvrir les yeux. À dématérialiser la notion de gène (La mystique de l'ADN, Dorothy NELKIN et Susan LINDEE, 1998, Belin, Coll. Débats) on en a oublié de s'intéresser de près à la forme et à la fonction du chromosome mais aussi des molécules d'ADN, dans leurs différents états au cours de la vie d'une cellule.
Le chromosome est un élément matériel, il possède donc un forme et donc à la fois une composition chimique, une structure, une dynamique, une cinétique de formation, de déplacement, de clivage, et de décondensation,... et bien sûr des fonctions ....bref il est tellement plus qu'une particule héréditaire ou qu'une pelote d'ADN.
L'ADN (à l'état non condensé dans le chromosome) est aussi une molécule matérielle et donc possède aussi une forme en un lieu donné; ce qui veut aussi dire qu'il n'y a pas que la composition chimique ou sa séquence qui soit importante. Il faut s'intéresser aussi à son degré de tension (on parle aussi de son "tortillement"), aux molécules qui lui sont associées (groupements méthyle, protéines, ARN courts...), à son accessibilité, à sa dynamique de synthèse, de réparation, de transport, de dégradation.
* Linéarité et circularité
L'ADN est un filament. Pourquoi ? À quoi sert d'habitude un fil (plus ou moins élastique...) ? À lier (attacher), à relier deux points (un chemin courbe), à étendre - déployer (l'ADN se déploie dans la cellule en se mettant à la portée d'un maximum de molécules au sein du nucléoplasme (Eucaryotes) ou du cytoplasme (Procaryotes)). Comment imaginer un filament d'une longueur aussi monstrueuse stable dans la cellule ? À partir d'arguments géométriques, René Thom propose (in SSM (stabilite.pdf) , p 338) que chaque filament d'ADN se scinde en de multiples petites sous-unités circulaires, chacune au centre d'une sous-unité métabolique et énergétique (énergide) lors de l'interphase. On sait que l'ADN bactérien est sous forme circulaire, celui des mitochondries, des chloroplastes, des plasmides aussi. Des ADN viraux, non circulaires, doivent se circulariser avant de pouvoir être répliqués.... La structure proposée pour le chromosome n'étant qu'un modèle très perfectible, il est possible d'imaginer qu'en fait l'ADN s'y trouve sous forme de boucles et non d'UN SEUL filament.

Je ne demande pas à mes élèves de comprendre les confusions liées à la notion d'allèle employée à tort en biologie moléculaire mais je veux bien essayer de l'expliquer POUR DES COLLÈGUES. Cette question est très difficile car elle nécessite de sortir du paradigme génétique dominant.

Voici quelques exemples qui montrent les limites de cet emploi:
lisez
comprenez ...et posez vous des questions

un allèle est la forme d'un gène

la séquence d'un gène moléculaire peut varier légèrement sans que l'on puisse dire que le gène est différent; les séquences très voisines sont appelées des allèles ... mais elles ne peuvent pas être situées n'importe où car deux allèles d'un même gène ne peuvent pas être situées sur le même chromosome à moins que le gène existe en plusieurs exemplaires.

... donc définir un allèle en biologie moléculaire demande de définir une séquence + une position dans un chromosome eucaryote spécifique, définie héréditairement; un allèle n'est pas la séquence d'un gène moléculaire.

chaque cellule diploïde possède (au moins) deux allèles de chacun de ses gènes moléculaires

deux séquences identiques situées à différents endroits dans le même génome sont considérés comme des copies d'un gène unique. Deux séquences légèrement différentes doivent, pour être des allèles, être situées sur deux molécules d'ADN différentes, l'une d'origine paternelle, l'autre maternelle, ce qui implique bien un lien avec l'hérédité qui n'existe pas en biologie moléculaire.

des traits de caractères différents légèrement (par exemple la forme des graines des pois mendéliens) sont des allèles

deux traits de caractères (allèles au sens exact de traits héréditaires) ne sont pas obligatoirement dus ni tous les deux à des modifications de l'ADN, ni liés à un même gène moléculaire. Il existe bien d'autres déterminismes cellulaires de la forme qui sont plus simples que l'intervention de l'information génétique (ceci n'est pas une phrase gratuite c'est une évidence de bon sens: la forme d'un tégument qui se ride, due par exemple à un départ d'eau, ne peut être que très indirectement reliée à une information génétique; vouloir à tout prix relier toute concentration, toute composition chimique, tout agencement dans l'espace à une information linéaire est un OBSTACLE à la compréhension).
Et si l'on tient absolument à rester près du génome, voici un autre exemple: on connaît des couleurs panachées de certains pétales qui sont dus à des ARN qui interfèrent avec l'ADN: les ARNi (pour une revue simple mais bien évidemment dans le paradigme dominant voir par exemple http://www.ac-creteil.fr/svt/Big_mag/Actualite/ARN/ARN.htm). Les allèles ne sont donc dans ce cas pas liés à un unique gène mais bien à différents gènes ; on parle de phénocopies (voir paragraphe suivant). Dans ce cas précis je crois que les ARNi ne sont pas hérités mais synthétisés... mais ce n'est peut-être pas le cas général. Pour quelques données plus originales sur les ARN hérités voir les travaux précurseurs de Beljanski sur la page d'histoire de la génétique.

D'autres données... que l'on ne trouve pas dans les manuels scolaires:
Pour tous les mutants de la Drosophile connus dans les années 40 (travaux de Richard Goldschmidt) et pour de nombreux autres mutants chez différents organismes on connaît des phénocopies (de phéno = visible, en grec), c'est-à-dire des individus qui présentent le même aspect (par exemple une deuxième paire d'aile comme pour le mutant bithorax) alors que leur génome n'a pas subi de mutation (par exemple pour le mutant bithorax de la drosophile la phénocopie bithorax est obtenue par simple traitement à l'éther de l'embryon normal). Les phénocopies de nombreux papillons sont obtenues de façon tellement fréquente, par exemple par simple refroidissement des larves, qu'il est probable que les très nombreux mutants (variants) reconnus dans la nature ne sont en fait que des phénocopies qui ne doivent donc pas différer des autres papillons génétiquement (d'après Peter T. Saunders, à l'adresse http://www.utc.fr/arco/publications/intellectica/n16/16_06_Saunders.pdf ; Intellectica est par ailleurs une revue très recommandable à tous les esprits curieux) .
Ces données, insuffisamment diffusées, montrent combien le rôle de l'environnement est essentiel dans le développement. On connaît aussi des phénocopies (notamment chez le ver Cœnorhabditis elegans) qui seraient dues à des ARN induisant des répressions de gènes (voir cours de 1ère S) que l'on nomme ARN interférants; ce qui serait dans ce cas une information cytoplasmique.

On dit qu'un allèle est la forme d'un gène, ou encore, la version d'un gène pour garder l'analogie avec l'information écrite. Mais, comme un gène moléculaire est défini par sa séquence, où se trouve la limite entre un gène (de séquence donnée) et un autre gène ? On voit bien qu'il est nécessaire
- soit de définir le gène comme ayant une position fixe (par rapport à un point origine sur la boucle d'ADN bactérienne ou par rapport à des repères fixes comme des bandes colorées pour les chromosomes eucaryotes) - mais dans ce cas on supprime aux gènes la possibilité de se combiner les uns aux autres de façon variable (et il faut donc trouver une forme qui en soit responsable) -
- soit de définir l'allèle non pas au niveau de l'ADN mais au niveau des molécules polymériques associées donc au niveau d'une fonction à laquelle le gène moléculaire participe mais qui n'est pas sous son contrôle direct.
On peut dire que quelques mutations ponctuelles affectant la séquence d'un gène moléculaire n'altèrent pas la fonction de gène héréditaire et que l'on a des allèles mutés. Mais est-on certain qu'une petite modification de séquence ne peut pas changer radicalement le type de caractère héréditaire transmis, c'est pourtant ce que l'on affirme quand on dit qu'un gène homéotique est un gène qui contrôle le développement. Un petite modification du gène moléculaire dit homéotique ne conduit qu'à une petite modification de la protéine associée mais à une grande modification de la forme globale de l'individu. Pour cela on suppose fixe la position et la fonction du gène moléculaire. C'est fort discutable. Quand on étudie les gènes héréditaires et qu'on les regroupe en allèles on n'est jamais sûr qu'ils correspondent à des formes voisines d'un même gène moléculaire. Dans certains cas particuliers on a bien mis en évidence qu'une variation de la séquence du gène moléculaire conduisait à une variation allèlique mais ces cas ne sont-ils pas des exceptions ? Quand on travaille dans le sens biologie moléculaire vers caractères héréditaires on est toujours dans le même paradigme sans jamais essayer d'en sortir; on n'a pas la possibilité de proposer comme interprétation que le changement d'ADN réalisé par manipulation génétique par exemple n'a pas seulement changé la séquence d'une protéine mais aussi sa fonction et pourquoi pas celle de beaucoup d'autres qui lui sont associées. Ce n'est donc plus le même gène héréditaire même si on est parti d'une séquence voisine.
Si l'on insère (ou si on supprime) dans une cellule une séquence d'ADN voisine d'une séquence d'ADN connue (appelée gène moléculaire) et qu'on observe que quequechose est changé dans le fonctionnement cellulaire (par rapport à cette même cellule sans gène modifié), on ne prouve pas la fonction d'un gène moléculaire donné. Sauf à supposer que l'ADN est composé de sous-unités fixes car, on ne voit que le résultat du travail cellulaire. Proposer un déterminisme c'est supposer que la seule chose de changée est l'ADN. Or je crois que c'est tout le contraire que l'on voit. De petits changements dans l'ADN provoquent de grands changements dans l'organisme. Dire que les gènes se chevauchent ou se déplacent est encore une vision statique. Dire que l'ADN est organisé en sous-unités fonctionnelles (probablement circulaires comme l'a proposé Thom) ne veut pas dire que ces sous-unités ont une place fixe À CAUSE DE LEUR SÉQUENCE. En affirmant cela une image vient immédiatement à l'esprit, c'est la chromosome coloré en
bandes caryotypiques. D'abord je précise que l'on ne sait toujours pas à quoi correspondent les bandes, pour ce que j'en sais. Ensuite comment concilier cette mobilité avec la position et l'association avec des gènes des bandes qui semblent fixes ? En plaçant la fonction non dans la séquence de l'ADN mais dans la structure chromosomique que l'on peut extraire, c'est-à-dire la bande colorée. En fin de compte cela reviendrait à dire que la séquence d'ADN de la bande n'est pas ce qui compte le plus mais bien les protéines qui lui sont associées (si les protéines sont suffisantes à décrire la forme du chromosome). Dans ce cas, lorsque l'on manipule l'ADN seul après l'avoir extrait d'une bande, pourquoi le retrouve-t-on toujours au même endroit dans le chromosome ? Peut-être tout simplement parce qu'il s'associe avec des protéines (ou ?) particulières de cette bande, du fait de sa séquence. Les marquages in situ (FISH) ne marquent que des séquences répétitives de l'ADN mais il n'y a pas, à ma connaissance, de marquage in situ des gènes sur un chromosome non digéré et non déroulé (techniques de peignage par exemple) (voir par exemple http://www.pasteur.fr/recherche/unites/biophyadn/ ).
Ce qui est contestable ce n'est par l'organisation linéaire des gènes héréditaires sur le chromosome (voir
spécialité de TS) mais c'est l'image que certains ont d'un chromosome déroulé linéairement et qui placent aussi linéairement les gène moléculaire le long de ce chromosome monstrueux sans se poser de questions (voir schéma ci-dessus).

Remarques:
* il ne faut jamais oublier que l'ADN est manipulé par la cellule qui est l'unité irréductible du vivant.
* de plus l'ADN peut être modifié par des éléments cytoplasmiques (des ARN peuvent être transcrits en ADN et s'intégrer au génome).
* Actuellement on s'aperçoit que la quantité d'ADN et que la séquence de l'ADN changent au cours de la vie d'une cellule: l'ADN d'un ovocyte n'est pas le même que celui d'une cellule différenciée; des ADN courts semblent s'intégrer au génome au cours de l'ovogenèse; des ARN courts semblent être capables soit de transmettre par voie cytoplasmique ou nucléoplasmique (par le noyau) leur séquence qui sera traduite en protéines sans passer par l'ADN, soit d'être "retrotranscrits" en ADN et intégrés au génome après le début du développement. (voir page sur les
manipulations cellulaires)

POUR ALLER (beaucoup) PLUS LOIN

Une analogie classique:
On a souvent comparé les bases de l'ADN (A,T,C et G) avec les lettres de l'alphabet, les gènes constituant des mots, c'est-à-dire des suites de lettres ayant un sens. On affirme ainsi qu'une série de gènes activés en même temps constitue une phrase dont les protéines sont la traduction en langage utilisé par la cellule.
Dans cette vision les gènes sont des unités de fonction, ils ont un sens pour la cellule. Ce qui fait parler de code, de gouverne, de contrôle... En tant que mémoire héréditaire, et du point de vue évolutif, les gènes se combinent entre eux pour rendre compte de la complexification des structures et des dynamiques de l'organisme. L'évolution c'est la complexification, les pertes, les modifications des gènes.

MAIS
de nombreux problèmes naissent de cette signification (ce sens) donnée aux gènes
Quelques arguments pour un lecteur qui ne serait pas élève de seconde...
car l'ADN peut être "lu" dans plusieurs sens, les gènes se chevauchent; un gène peut donner deux produits différents dans des conditions cytoplasmiques différentes et donc ne pas avoir la même fonction cellulaire; deux gènes différents en retour ont souvent la même fonction... de plus l'ADN est fortement redondant (de très nombreux gènes présentent de multiples copies dont seules quelques-unes sont utilisées...)...
On cherche de nos jours à poser clairement la question de la signification des gènes (voir par exemple pour quelques questions timides le petit dossier de La Recherche: qu'est-ce qu'un gène ?). De façon plus profonde, c'est Jean Petitot qui a parlé semble-t-il en premier de sémiophysique (une science du signe, du grec seméion = signe et phusikos = naturel) et qui continue avec d'autres à développer cette notion à la suite de René Thom (voir R. Thom: Esquisse d'une sémiophysique). Le projet est de « préciser le rapport entre une situation dynamique globale (le « signifié »), et la morphologie locale en laquelle elle se manifeste (le « signifiant »)(Thom, 1968f4). »
En biologie le sens d'une molécule c'est sa FONCTION, ce à quoi elle sert. Il est donc essentiel de se poser la question : A quoi servent les gènes ?
Et la réponse n'est pas aussi compliquée que l'imaginaire de certains veut nous le faire croire.
Avec du recul on peut dire que les gènes n'ont que quelques fonctions toujours les mêmes qui peuvent se résumer en une seule: servir de modèle pour des molécules polymériques (ARN ou ARN puis protéines). Les gènes ne sont pas "lus" (au sens d'une lecture des mots signifiants) mais sont "recopiés" dans un matériau plus stable (l'ARN) puis éventuellement convertis en molécules fonctionnelles (les protéines). Les ARN non convertis en protéines sont des molécules fonctionnelles comme les protéines (ou plutôt les complexes protéiques).
De façon simpliste et en gardant la même analogie de l'alphabet, on peut dire que les ARN sont parfois des mots (lorsqu'ils ont une autre fonction que de servir de modèle stable pour la synthèse des protéines) mais ce sont surtout les protéines qui sont les mots. Les phrases ne sont pas dans les associations de gènes mais bien dans les associations protéiques ou dans les associations ARN-protéines.
Certes, ces protéines et ARN viennent du "fonctionnement" des gènes mais les associations ne se font pas au hasard. Dire qu'il y a nécessité ou auto-organisation revient à dire qu'il y a une finalité dans la matière et donc, in fine, dans les gènes et qu'il est inutile d'aller la chercher ailleurs. Ce à quoi ne peut se résoudre le philosophe : si finalité il y a il est urgent d'en rechercher les contours (de rechercher les attracteurs ou les prégnances au sens de Thom).
Considère-t-on que le poète n'est que le jouet de l'alphabet ou même du dictionnaire des mots qu'il emploie ? Son œuvre de création poétique est bien de jongler avec les mots dont il dispose culturellement (par mémoire)? On peut penser que la cellule fait de même: avec le stock de gènes et d'ARN qu'elle possède par héritage, elle s'exprime en vivant par ses fonctions (protéiques notamment). Ses finalités sont inscrites dans des formes (les saillances au sens de Thom) qui représentent les trajectoires possibles des dynamiques.
Les partisans d'un programme génétique, souvent matérialistes, affirment que l'expression de tel et tel gène à tel instant est le résultat d'une finalité (aveugle ou nécessité comme l'on voudra) due aux conditions dans lesquelles une cellule vivante se trouve (l'environnement agit sur l'expression de l'information génétique). Au contraire, les partisans d'une finalité globale de l'être vivant, pas nécessairement matérialistes ni vitalistes si cette opposition signifie encore quelque chose, cherchent à formaliser de façon mathématique ce pour quoi une cellule vit. Voici un citation de René Thom à ce sujet.

extrait de "La notion de programme en biologie" (René Thom, 1984f5)
I Introduction : La théorie en biologie
Depuis qu'à partir du 16e siècle, on a commencé à ouvrir les cadavres afin d'en scruter les organes internes, l'explication biologique a pris un tour résolument techniciste. On assimile l'organe à un outil, lequel, construit par l'homme en vue d'une fin connue, ne présente aucun obstacle à l'intelligibilité. Dès Harvey, ce point de vue a obtenu d'indiscutables succès. Il est indéniable que le coeur est une pompe qui refoule le sang dans ces canalisations que sont nos vaisseaux. De même, les poumons se comportent (sur le plan mécanique) comme un soufflet (mais ici l'interprétation mécaniste laisse de côté la fonction physiologiquement essentielle d'échange gazeux entre l'air et le sang). Le squelette (os + articulations) permet une interprétation mécanique immédiate. Toutes ces descriptions ont abouti à la théorie cartésienne de l'Homme animal-machine, et ce n'est guère qu'avec le plus noble de nos organes (le siège de l'âme), à savoir le cerveau, que l'imagerie techniciste est quelque peu restée courte. Mais, avec la naissance quasi-simultanée, vers 1950, des ordinateurs et de la Biologie Moléculaire, cette imagerie a connu son plus récent et peut-être son plus glorieux avatar. On a fait de l'ADN des chromosomes, du génome, l'analogue du programme qui régit le fonctionnement d'un ordinateur. Cette dernière interprétation offrait, sur le plan conceptuel, un nouvel, énorme avantage. En effet, l'imagerie techniciste des organes soulève, de manière inévitable, le problème de la finalité. Comment tous ces mécanismes d'une haute efficience, d'une parfaite efficacité, comment toute cette horlogerie pouvait-elle se construire apparemment sans horloger ? À partir du moment où l'on pouvait supposer « codée » dans l'ADN du génome toute la structure organique, le mystère s'effaçait, puisqu'il suffisait d'imaginer que l'ADN, promu au rang de démiurge, dirigeait toute l'épigenèse de l'être vivant, à la manière d'un ingénieur dictant ses ordres à ses subordonnés. Moyennant quoi, on a pu rendre admissible la finalité, rebaptisée pour la circonstance téléonomie. Et cela d'autant plus que la traduction ADN ? Protéines, via l'ARN messager était un code au sens étroit, technique, du terme, puisque cette opération associe à tout triplet de nucléotides un acide aminé bien défini. Or, dans le premier cas la situation est toute différente : il s'agit de comprendre comment « l'information » supposée incluse dans l'ADN génique, peut spécifier la structure tridimensionnelle de l'organisation embryonnaire, puis adulte. (Je parle ici des Pluricellulaires, je reviendrai sur le cas des Unicellulaires en fin d'exposé.) Pratiquement toute la théorie biologique moderne s'est trouvée enfermée dans l'homonymie abusive de ces deux emplois du mot code, et cet abus de langage l'a condamnée à une stérilité conceptuelle dont elle n'est pas encore sortie...
Comment sortir de cette impasse ? Il ne fait guère de doute que seule une certaine audace théorique peut permettre de faire avancer la question. Il faut songer à réintroduire en Biologie l'imaginaire, cet imaginaire sans lequel il n'est pas de théorie. Déjà, dans l'interprétation techniciste des organes, ne peut-on songer comme autrefois le suggéra Bergson à renverser l'ordre des termes ? Plutôt que d'expliquer l'organe par l'outil, ne faudrait-il pas plutôt expliquer celui-ci par celui-là ? Autrement dit, l'imagination intuitive qui a permis à l'Homo Faber de construire, bien avant toute science constituée, des outils doués souvent d'une remarquable efficience, cette intuition ne trouvait- elle pas son origine dans un « inconscient biologique » légué par l'évolution phylogénétique de l'espèce ? Et ceci d'autant plus que la plupart des outils ne sont en fait que le prolongement d'actions, motrices ou physiologiques, et que l'action dans son organisation spatio-temporelle, nous est organiquement léguée. Il faut reprendre ici l'axiome lamarckien : la fonction crée l'organe non pas au sens banal qui voudrait qu'une structure organique se crée ou se développe à la suite de l'usage qui en est fait, mais de manière plus abstraite, plus « platonicienne ». Toute la régulation épigénétique et comportementale d'une espèce repose sur une structure formelle de caractère géométrique (topologique) qui se réalise dans l'espace des activités métaboliques de l'organisme ; une « fonction » apparaît alors comme le dispositif régulatoire partiel afférent à l'homéostasie d'un paramètre physiologique essentiel (teneur en réserves énergétiques, en oxygène, en déchets organiques... par exemple), et la réalisation organique d'une telle fonction peut comporter les agents physico-chimiques les plus variés, comme les organes les plus divers. (Par exemple, la communication entre animaux d'un même groupe social peut employer des signaux olfactifs, sonores, visuels... souvent dans un même but). Toutes ces « fonctions » concourent ainsi à la canalisation de la dynamique dans l'espace des activités métaboliques, formant ainsi un « attracteur » global (que j'ai proposé d'appeler la figure de régulation de l'espèce considérée). »

Je précise que l'article de Thom représente 25 pages de théorie détaillée sur cette idée.

La question de la définition de l'information sera encore une fois posée dans le cours de terminale S (voir spécialité, thème 3). Ici notre propos est de présenter une voie alternative basée sur un emploi rigoureux du mot fonction (dans la mesure des capacités mathématiques d'un professeur de SVT qui n'a pas poursuivi de formation mathématique depuis la classe préparatoire de maths sup biologie (actuellement BCPST); il est évident que j'appelle de mes vœux une formation continue en mathématique pour biologistes qui soit plus orientée vers la biologie théorique que vers les statistiques comme elle l'est actuellement, à ma connaissance.