Des caractères des individus et des espèces


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1. Les individus sont étudiés à l'aide de caractères

Puisque il est préférable pour un individu pluricellulaire - voir page sur le phénotype- de parler de forme plutôt que de phénotype morphologique, de molécules plutôt que de phénotype moléculaire, de comportement plutôt que de phénotype éthologique... il faut revenir à la notion de caractère qui désigne les traits (du latin tractus = "ce que l'on tire" et donc "ce que l'on déduit" de l'observation raisonnée, notamment de la comparaison) ou éléments visibles ou mieux observables (là aussi dans le sens d'éléments raisonnés) des individus.

2. Les caractères héréditaires et classificatoires ne sont pas aisément conciliables

2.1 - Les caractères sont héréditaires ou classificatoires.

Un caractère héréditaire est un trait spécifique (au sens de "lié à l'espèce", voir ci-dessous) de l'individu pour lequel des différences héréditaires variées peuvent être définies. (voir page sur l'histoire de la génétique pour une discussion sur la notion de caractère héréditaire). Depuis l'avènement de la biologie moléculaire comme science fédérative le caractère héréditaire est associé à l'information génétique, qui reste principale, même si elle est modulée par les informations cytoplasmiques et environnementales. On distingue alors:
* les caractères simples pour lesquels l'information génétique permet à elle seule de décrire correctement la transmission héréditaire de ces caractères;
* et les caractères héréditaires complexes nécessitent d'autres types d'information que la seule information génétique.

Au contraire, on peut mettre l'accent sur le fait que le terme de caractère possède plusieurs sens en biologie mais tous sont un moyen de désigner la variation ou les différences entre individus (le terme de caractère désigne en français un élément d'une écriture, une marque ou signe distinctif d'un individu). On parlera alors de caractère classificatoire pour désigner les caractéristiques d'un individu qui font qu'on peut le classer dans tel ou tel groupe.

2.2 - L'hérédité et l'évolution ne sont pas encore compris comme un seul mécanisme.

Bien sûr, la biologie moléculaire du gène se présente comme vision unificatrice.
En voici quelques éléments de raisonnement simplifiés:
* les espèces sont les seules divisions naturelles du vivant et une espèce est définie par un pool de gènes
* les seules classifications modernes sont les phylogénies et l'évolution des espèces résulte de l'évolution des gènes
* la transmission des gènes explique à la fois la transmission des caractères héréditaires au cours d'une génération mais aussi au cours de l'évolution et donc les mécanismes évolutifs sont génétiques.

Ces affirmations sont peut-être un peu caricaturales mais elles expriment la théorie unificatrice sous-jacente. Elles peuvent être critiquées une à une.
* la définition de l'espèce (population d'individus semblables, interféconde, et occupant une niche écologique) est ouverte à des interprétations autres que des celles issues de mécanismes génétiques. Une étude de spéciation à l'aide de la génétique est riche mais n'épuise pas le sujet.
* les classifications évolutives utilisent les caractères des fossiles, seuls à nous donner des indications sur le temps. La génétique ne peut s'appliquer aux fossiles qui sont du ressort de la science paléontologique qui n'est pas expérimentale.
* les mécanismes héréditaires sont ceux de la transmission stable des caractères de l'espèce et aussi ceux de la variation nécessaire à l'évolution: l'hérédité chromosomique n'est pas la seule théorie, comme nous le verrons dans le cours de terminale.

Certains caractères sont associés à des allèles et sous contrôle principalement de l'information génétique (voir ci-dessous). D'autres caractères sont sous le contrôle de l'information cytoplasmique. D'autres caractères sont sous le contrôle principal de l'information extracellulaire (environnemental par exemple).
Un caractère énoncé au niveau comportemental est évidemment beaucoup plus difficile à relier à une information génétique qu'un caractère biochimique. Certains biologistes sont persuadés que la composante génétique est principale pour tous les caractères et recherchent des "gènes du comportement", ce qui me paraît vain.
On notera que les caractères sont définis pour des individus (organisme entier). Pour un unicellulaire la relation entre les trois types d'information (génétique, cytoplasmique et extracellulaire) est assez facile à mettre en place alors que pour un pluricellulaire (champignons, plantes ou animaux) l'expression de chaque type d'information peut être différente dans différentes populations cellulaires.

Il est très regrettable que l'on emploie le terme de phénotype pour décrire l'ensemble des caractères d'un organisme, quelqu'en soit le déterminisme.
Un caractère peut aussi bien reposer sur une information principalement génétique que sur une information cytoplasmique (mémoire cytoplasmique) ou environnementale (comportement ?), ce qui le différencie du phénotype toujours lié principalement à l'information génétique (voir ci-dessus: en effet les caractères ne seraient toujours phénotypiques que si l'information génétique dominait toute interprétation du vivant...).

3. Les espèces regroupent des individus qui se ressemblent et dérivent les uns des autres

Cette définition est voisine de celle de Lamarck: «un ensemble» ou «une collection d'individus semblables ou presque semblables», «qui furent produits par d'autres individus pareils à eux» (La naissance du transformisme, Lamarck, entre Linné et Darwin, Goulven LAURENT, Collection inflexions, Vuibert/Adapt, 2001, p 19).

Même si actuellement la notion d'espèce est sujette à de nombreux débats, la définition de Mayr de 1989 semble être la plus utilisée, au moins dans l'enseignement: « une espèce est une communauté reproductive de populations (reproductivement isolée d'autres communautés) qui occupe une niche particulière dans la nature » (Mayr, 1989, cité dans l'article "A propos de la notion d'espèce", Louis Allano et Alex Clamens, Biologie-Géologie (Bulletin de l'APBG), n°3-1996, 471-472 ); la notion de niche écologique la plus utilisée actuellement est celle de Hutchinson (1957) : «ensemble des conditions dans lesquelles vit et se perpétue la population».

Si l'on ne considère qu'une hérédité génétique (tous les caractères -héréditaires- , simples ou complexes, sont dus, avant tout, à des gènes hérités des parents) les caractères de l'espèce, qui est une notion basée sur une communauté reproductive, sont alors considérés comme un ensemble de gènes (on dit, comme en anglais, "pool" de gènes). La barrière reproductive - c'est ainsi que l'on nomme les éléments assurant l'isolement reproducteur d'une population - avec les autres espèces est alors génétique. On a alors une définition génétique de l'espèce = ensemble d'individus porteurs d'un pool génétique particulier et isolé génétiquement des autres populations.
On peut aussi admettre, comme cela me semble plus que légitime, que l'hérédité comporte d'autres facteurs, matériels ou non, que les facteurs génétiques. Par exemple le cytoplasme, que l'on découvre comme étant de plus en plus structuré et donc qui transmet une information de type cytoplasmique qui ne se réduit pas à une composition chimique mais est une organisation dans l'espace (voir la page sur la cellule. On peut aussi citer la transmission héréditaire par apprentissage des parents aux jeunes.

L'espèce est un problème qui dépasse le cadre strict de la biologie, surtout si on veut aussi englober les espèces paléontologiques (voir ancien cours de terminale, partie d3 du chapitre 4 sur les phylogénies).