PARTIE 1 (8) - REPRÉSENTATION VISUELLE   - repère 13SCELP03 

Au début du XXeme siècle, un ophtalmologue a soigné le peintre impressionniste Claude Monet, qui souffrait de cataracte.
Après son opération, Monet lui écrit : « Je lis certes non sans mal, mais cette diminution de vision dehors n'est pas sans m'inquiéter. Songez que, dans quelques jours, il y aura six mois de la première opération. Ce n'est guère encourageant et je dois vous l'avouer, cette opération, je la regrette bien. »
Lettre extraite de : http://www.biusante.parisdescartes.fr/

Document 1 : la cataracte de Monet et les conséquences sur son œuvre.
« La nuit s'abat progressivement sur l'œuvre de Monet, de 1910 à 1923. Ses œuvres s'obscurcissent, les contours s'estompent et certaines couleurs disparaissent. Une maladie de la vision plonge jour après jour davantage le peintre dans les ténèbres. [...]
Le monde à peindre n'est pas composé d'objets, il n'est rien d'autre qu'un patchwork lumineux et coloré. Ironiquement, Monet allait se rendre compte de la différence entre la théorie et l'expérience directe lorsqu'il commença à perdre la vue. Victime de cataracte, le peintre vit son monde se voiler d'année en année, perdant progressivement les principes clés du mouvement qu'il avait inauguré : la lumière et les couleurs.
Maladie liée à l'âge, la cataracte est une opacification du cristallin. [...] Le cristallin perd progressivement sa transparence, jusqu'à ce qu'il finisse par absorber complètement la lumière. En 1911 déjà, il dit avoir « constaté avec terreur qu'il ne voyait plus rien de l'œil droit. » [...] Il écrit : « Ma mauvaise vue signifie que je vois tout comme au travers d'un brouillard». [...] Sa rencontre avec l'ophtalmologue Charles Coutela fut déterminante. Celui-ci commence par prescrire au peintre des gouttes qui ont pour effet de dilater la pupille. Ce faisant, Monet peut « voir » autour du voile de la cataracte. Grâce à ce traitement, la pupille se dilate à un tel point que son diamètre dépasse celui du cristallin opacifié, si bien que la lumière parvient à passer et à impressionner la rétine. Cette solution ne fonctionne toutefois qu'un temps et l'opération ne peut plus être évitée [...].
D'après : « Maux d'artistes, ce que disent les œuvres » Sébastien Diémoz.

Document 2a : fonctionnement de la pupille.

La pupille est l'orifice situé au milieu de l'iris. Elle nous apparaît noire étant donné que la majorité de la lumière entrant à l'intérieur de l'œil est absorbée. La variation du diamètre de la pupille est contrôlée par des mouvements involontaires de contraction et de relâchement du muscle de l'iris. Ces mouvements permettent de réguler l'intensité de la lumière entrant dans l'œil.


Document 2b : description de l'opération de la cataracte.
A l'époque de Monet, l'opération consistait à retirer le cristallin mécaniquement en pratiquant une incision dans la cornée et en retirant la lentille en entier. Aujourd'hui, on utilise de plus en plus une sonde à ultrasons qui fragmente le cristallin qui peut être retiré de façon moins invasive. Il faut ensuite insérer un implant oculaire, lentille de plexiglas, d'hydrogel ou de silicone. Aujourd'hui, dans 90% des cas, l'amélioration de la vision est notable après une opération de la cataracte.

Document 3 : intensité minimale de stimulation des photorécepteurs en fonction de la longueur d'onde.
On soumet chaque type de photorécepteur à des rayonnements lumineux de longueurs d'ondes différentes et on mesure l'intensité lumineuse à partir de laquelle il réagit. Les données obtenues permettent de construire le graphique suivant :



COMMENTAIRE RÉDIGÉ
Donnez les raisons pour lesquelles les gouttes prescrites à Monet, puis l'opération de la cataracte qu'il a subie, n'ont pu apporter qu'une amélioration limitée de sa vision, et expliquez en quoi le traitement actuel est plus efficace.
Vous développerez votre argumentation en vous appuyant sur les documents et vos connaissances (qui intègrent, entre autres, les connaissances acquises dans différents champs disciplinaires).

Éléments de correction:
Les gouttes prescrites, en augmentant le diamètre de la pupille (voir doc 2a : c'est l'iris qui est le muscle dont l'orifice central constitue la pupille ; en se contractant, la pupille s'agrandit par contraction des fibres radiales), permettent, comme cela est parfaitement précisé dans le texte, de laisser passer des rayons lumineux sur le bord du cristallin, voir même à l'extérieur en périphérie, lorsque le cristallin est contracté et donc quasiment sphérique, ce qui n'est le cas que dans une vision de très près, lorsque le cristallin devient une lentille à convergence maximale. Mais on comprend aisément que les rayons lumineux qui passeraient alors sur le bord du cristallin  ne peuvent toucher que la zone la plus périphérique de la rétine (très éloignée de l'axe optique). Or, cette zone correspond à la zone la moins riche en cellules photoréceptrices et elle ne contient quasiment que des bâtonnets, ce qui implique que la vision de Monet, après la prise de ces gouttes devait être très peu précise et quasiment sans possibilité de distinguer les couleurs. C'est peut-être l'intérêt du document 3 qui peremet de montrer que, si les bâtonnets sont les cellules sensibles à une moindre intensité lumineuse (le plus faible seuil d'excitation vers 1 lux), ils restent cependant responsables d'une vision peu précise et sont surtout utiles dans la pénombre ou la nuit. Alors que les cônes (les trois types ont des sensibilités équivalentes) sont sensibles à des luminosités plus fortes (seuil vers 1000 lux), mais permettent une vision plus acérée, notamment le jour, dans de bonnes conditions d'éclairement. Comme les cônes occupent essentiellement la zone centrale (près de l'axe optique) de l'œil, c'est là que les rayons convergent dans une vision de près, lorsque le cristallin est intact. Enfin, l'on sait que les cônes (de l'ordre de 5 millions/œil) sont 20 fois moins nombreux que les bâtonnets (de l'ordre de 100 millions/œil), mais comme ils couvrent une surface bien moindre, ce fait n'est pas déterminant dans l'acuité visuelle. Cependant il existe de grandes variations individuelles sur le nombre de cellules visuelles (de 1 à 10). Il est possible que Monet ait eu un plus grand nombre de cônes que la moyenne des individus, ce qui aurait expliqué sa grande sensibilité aux couleurs (on pourrait avoir le raisonnement inverse en pensant qu'un petit nombre de cônes lui aurait permis de faire une synthèse plus originale de taches colorées qu'il reportait sur ses toiles : bref, une explication physiologique est toujours possible).
L'opération de la cataracte, qui consiste à enlever le cristallin opacifié (directement par chirurgie, soit après fragmentation au laser comme on le fait désormais) et à le remplacer par une structure amorphe - dans le texte on ne comprend pas si le remplacement fait partie de la technique moderne ou ancienne -  (incapable de converger et encore moins de modifier sa convergence en fonction du type de vision - éloignée ou rapprochée -, permet de retrouver une vision lorsque la totalité du cristallin s'est opacifiée et que la vision est totalement floue, voire nulle (cécité). Dans le cas de Monet, l'opération a été réalisée alors que la vsion était voilée mais pas nulle. 6 mois après l'opération il se plaint de voir mal alors qu'il dit aussi qu'il est capable de lire (même si cela reste difficile). Comme de nombreux patients... impatients, il dit "regretter" cette opération, alors qu'il est clair qu'elle le conduisait vers la cécité. Même si l'on peut considérer que la technique moderne, moins invasive, aurait été plus efficace, il n'en reste pas moins que chez 10% des patients il n'y a pas d'amélioration de la vision. Le texte ne dit pas pourquoi.