PARTIE 1 (8 points) - REPRÉSENTATION VISUELLE

 Dès le Vème siècle avant JC, différentes théories expliquant le phénomène de la vision se sont affrontées. On cherche à dégager comment, au cours du temps, la réflexion et l'expérimentation de chercheurs ont contribué à écarter les idées fausses et à construire progressivement la conception actuelle de la vision.

Document 1 : La conception de la vision selon Aristote, philosophe grec (384/322 avant JC)
Dans les Météorologiques, Aristote explique la perception de la couleur d'un objet par l'altération d'une sorte de rayon visuel émis par l'œil, qui perdrait de son intensité au fur et à mesure de son éloignement.
Ainsi, la couleur perçue d'un objet dépendrait de sa distance par rapport à l'œil. Par exemple un objet blanc qu'on éloigne serait touché par un rayon visuel de plus en plus affaibli et apparaîtrait, au fur et à mesure de son éloignement, d'abord rouge, puis vert, et enfin noir .

 

Document 2 : Le mécanisme optique de la vision d'après Alhazen, scientifique et philosophe arabe (965-1036)
« [...] les géomètres appellent rayons, les rayons visuels par analogie avec les rayons solaires et les rayons du feu : en effet, les plus anciens d'entre eux considéraient que la vision est au moyen d'un rayon qui sort de l'œil pour aboutir à l'objet vu, le rayon produisant ainsi la vision. [...]
Quant à ceux qui considèrent que la vision est produite par le renvoi d'une forme de l'objet vu à l'œil, ils estiment que le rayon est la lumière qui se propage depuis l'objet vu suivant des trajectoires rectilignes se rencontrant au centre de l'œil [....] »
« Une trop forte lumière blesse les yeux. La vision ne provient donc pas de l'émission de l'œil vers l'objet, mais de l'inverse », C'est la déclaration que fait Alhazen [...]

Extraits tirés du « Discours de la lumière »d'Ibn a/-Haytham (Alhazen) et de « Quelques énigmes scientifiques de l'Antiquité à notre temps: retour à Delphes» par Marcel Nordon

 

Document 3 : Vers une compréhension du mécanisme de la perception des couleurs
Pour expliquer la perception des couleurs, Thomas Young écrit: «il est à peu près impossible d'attribuer à chaque point de la rétine un nombre infini de particules dont chacune vibrerait à l'unisson avec chaque ondulation possible de la lumière. Il devient donc nécessaire d'en supposer le nombre limité, à trois par exemple ... » Il émet donc l'hypothèse de la présence de trois types de récepteurs dans la rétine.

En 1963, les travaux de Marks et d'autres équipes de physiologistes apportent un argument décisif en faveur de la théorie de Young, discutée depuis plus de 150 ans. A l'époque, l'expérimentation sur des cellules de rétine humaine, beaucoup plus petites que celles des poissons, présentait des difficultés techniques qui semblaient insurmontables. Ils mesurent donc la quantité de lumière absorbée par des cellules visuelles de poissons rouges. Les résultats obtenus sont regroupés dans le graphique ci-dessous.


D'après "Données biochimiques et électrophysiologiques récentes sur la vision chromatique. » L. Cornu. L'année psychologique W 67-2. 1967)

 

COMMENTAIRE RÉDIGÉ :

Montrez que la conception de la vision d'Aristote a été progressivement remise en cause et ne peut plus être soutenue avec les connaissances actuelles. 
Votre argumentation s'appuiera sur les documents et sur vos connaissances, et sera illustrée par deux schémas simples présentant les théories opposées décrites par Alhazen).

Mise en garde : en histoire des sciences il faut se méfier des raisonnements simplistes. Plus votre culture sera profonde plus vous serez à même de comprendre les textes anciens. Ici, la question est très ambitieuse. Si elle n'a pas été traitée par l'enseignant, qui avait à sérieusement se documenter, l'élève ne peut guère faire un commentaire sensé.
Source utilisée que je vous encourage fortement à lire :
Comment la lumière est devenue le stimulus de la vue : approche épistémologique (Annexe B2)

La question posée montre justement une certaine ignorance des données historiques (en espérant que les miennes sont exactes !!!). En histoire, ce ne sont pas des théories fausses qui sont remplacées par des théories vraies (illusion positiviste), mais la vérité du monde qui s'éclaire progressivement d'un jour nouveau au fur et à mesure du développement des outils conceptuels.

Le texte d'Alhazen (document 2) décrit les deux courants de pensée de l'Antiquité :
- la théorie de l'intromission, soutenue par Épicure par exemple, selon laquelle l'objet perçu émettait un rayon visuel perçu par l'œil, les objets envoyant vers l'âme quelque chose qui les représente.
- la théorie de l'émission selon laquelle l'œil émettait un rayon visuel ("quid" ) dont Platon fait un prolongement de l'âme et dont Euclide et Plotémée proposent un modèle géométrique. Il est clair que
ces rayons ne sont pas de la lumière au sens actuel.
Aristote (document 1) est un
partisan de l'émission.

Alhazen propose une rupture dans ces conceptions grâce aux études anatomiques qui reprennent celles de ses prédécesseurs (comme Galien). Il est dommage que le seul texte fourni ici ne présente aucunement sa théorie moderne selon laquelle : « la vue, comme tous les autres sens, est le résultat d'une passion (action d'un agent extérieur sur un organe sensoriel) ; l'œil, parce qu'il est transparent, laisse pénétrer la lumière ; enfin, la pupille de l'œil est un régulateur d'intensité lumineuse.»

Ce n'est pas tant la perception des couleurs qui est le propos d'Aristote (si tant est que l'on puisse en juger à partir d'un extrait aussi court - document 1) mais le problème de ce que l'on peut appeler le stimulus visuel. Aristote propose quelquechose de nouveau : selon la position de l'objet, l'image perçue est différente, avec un changement de couleur. Cette expérience est encore une donnée de l'observation : les objets proches nous semblent plus colorés et contrastés que les objets lointains. On l'explique actuellement par des propriétés optiques de l'œil, mais aussi du traitement cérébral et dans ce cas la théorie d'Aristote prend tout son sens. Le mot distance pourrait être l'équivalent de la longueur d'onde de la lumière dans le sens moderne.
Le document 3 - sur quelques points historiques de la vision des couleurs moderne (théorie de Young-Helmotz qui se réfère à trois types de nerfs qui seraient sensibles chacun à une couleur, en rapport avec ses découvertes sur la composition de la lumière blanche en 13 couleurs...) et découverte chez le poisson des trois types de cônes sensibles à différentes longeurs d'onde - montre combien les théories anciennes sont en fait reprises et dépassées dans les théories nouvelles.
En travaux....